Dans un discours très applaudi à l’Union africaine, le milliardaire américain Bill Gates a promis d’investir la majeure partie de sa fortune soit, environ 200 milliards de dollars, dans le développement de l’Afrique, notamment dans la santé, l’éducation et l’économie. Si ce geste peut sembler généreux en surface, il révèle en réalité une logique paternaliste et néocoloniale dangereusement enracinée. J’affire ici, avec force, que l’Afrique n’a pas besoin de sauveurs extérieurs. Elle a besoin de souveraineté, d’autonomie, et de confiance en ses propres forces.
Depuis des décennies, l’Afrique est la terre d’accueil privilégiée des « bonnes intentions » venues de l’Occident. Que ce soit à travers les ONG, les prêts conditionnés du FMI, ou les initiatives philanthropiques de milliardaires comme Gates, une aide prétendument bienveillante s’abat sur le continent. Mais quels en sont les résultats tangibles ? Le développement reste inégal, la pauvreté persiste, et les systèmes publics dépendent souvent des financements extérieurs. Loin de libérer l’Afrique, cette aide la maintient sous perfusion.
Lorsque Bill Gates affirme vouloir « aider les mères africaines à être bien nourries » et évoque les bienfaits de l’intelligence artificielle dans le suivi des grossesses au Rwanda, il réduit des problématiques complexes à des solutions technocratiques. Il oublie que l’accès aux soins n’est pas seulement une question de technologie, mais surtout de volonté politique, de justice sociale et de souveraineté budgétaire. L’implantation d’outils conçus à Seattle ou Palo Alto n’est pas la réponse à des défis enracinés dans des contextes culturels et historiques spécifiques.
Les exemples historiques abondent. En Haïti, l’aide humanitaire massive après le séisme de 2010 a engendré un effondrement des structures locales au lieu de les renforcer. En Afrique, les campagnes de vaccination ou de distribution alimentaire pilotées par des agences étrangères ont souvent court-circuité les services publics nationaux. En se substituant aux États, les philanthropes comme Gates nuisent involontairement à la construction d’institutions solides. Leur présence rassure les gouvernements paresseux et décourage l’émergence de solutions locales durables.
Prenons l’exemple de pays comme le Vietnam ou le Costa Rica : en refusant la dépendance structurelle à l’aide extérieure, ils ont investi dans leurs propres systèmes éducatifs et de santé. Le résultat : des progrès rapides, durables, portés par une volonté nationale. Pourquoi l’Afrique ne pourrait-elle pas suivre cet exemple ? Parce qu’elle est trop souvent enfermée dans une logique où l’expertise vient toujours d’ailleurs, et l’argent aussi.
Il ne s’agit pas de rejeter toute forme de coopération internationale, mais de redéfinir les termes du partenariat. L’Afrique ne doit plus être le laboratoire des expérimentations philanthropiques occidentales. Elle doit être l’actrice principale de son propre développement. Les milliards de Gates ne remplaceront jamais une vraie volonté politique africaine.
Il faut refuser la dépendance programmée. Il faut exiger que les solutions viennent de chez nous, conçues par nous, pour nous. L’Afrique ne doit pas être le terrain de jeu des milliardaires en quête de rédemption morale, mais un continent debout, libre et maître de son destin.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mamadou Sow.
Mis en ligne : 24/06/2025
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