Le 29 juin, Dansa Kourouma, président du Conseil national de la transition (CNT) en Guinée, a révélé plusieurs points clés du projet de nouvelle Constitution remis au général Mamadi Doumbouya. Parmi les annonces majeures : un allongement du mandat présidentiel à sept ans, renouvelable une seule fois, la création d’un Sénat, et surtout, la possibilité pour Mamadi Doumbouya de se présenter à l’élection présidentielle. Je refuse de rester silencieux face à une telle manœuvre.
Depuis le coup d’État de septembre 2021 ayant renversé Alpha Condé, Mamadi Doumbouya s’est engagé à restaurer l’ordre constitutionnel et à ne pas se porter candidat à la prochaine présidentielle. Cette promesse faisait partie des fondements de la transition. Or, voilà que les règles du jeu sont réécrites en cours de route, dans l’opacité la plus totale, avec un projet voté à huis clos et dont la publication reste suspendue au bon vouloir du chef de la junte. Une mascarade institutionnelle, un viol de l’esprit même de la transition.
L’allongement du mandat présidentiel à sept ans, dans un pays où les institutions restent fragiles, n’est pas un simple détail. C’est un signal fort : celui d’une volonté de concentration du pouvoir. La possibilité offerte à Doumbouya de se présenter est une rupture brutale avec les engagements initiaux. On passe d’une promesse de neutralité politique à une stratégie d’enracinement au sommet de l’État. Le Sénat nouvellement créé, loin d’équilibrer les pouvoirs, risque fort de n’être qu’un instrument de plus au service de l’exécutif.
Risque de dérive autoritaire : Allonger la durée du mandat présidentiel, c’est affaiblir la redevabilité démocratique. Sept ans sans rendre de comptes, c’est offrir un blanc-seing à toutes les dérives.
Affaiblissement des contre-pouvoirs : Un Sénat dont la composition n’est pas démocratiquement contrôlée, une assemblée qui fonctionne à huis clos, et un président qui décide seul de la publication du texte constitutionnel : où sont les garde-fous ?
Précédents dangereux en Afrique : Ce scénario rappelle tristement ceux du Congo-Brazzaville, du Tchad ou de la Côte d’Ivoire, où les modifications constitutionnelles ont servi à légitimer des chefs d’État en quête de pouvoir prolongé.
En 2005, le Togo modifiait sa Constitution pour permettre à Faure Gnassingbé de succéder à son père. En 2020, Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire justifiait un troisième mandat en arguant d’une « nouvelle République ». La tactique est connue : on refonde les règles pour faire table rase du passé et ouvrir un boulevard vers une présidence prolongée. Doumbouya semble marcher sur leurs traces, avec les mêmes conséquences attendues : tensions politiques, recul démocratique, et perte de confiance des citoyens.
La Guinée n’a pas besoin d’un autre homme fort, elle a besoin d’institutions fortes. Le projet de Constitution dévoilé trahit les espoirs nés après la chute d’Alpha Condé. Il menace de ramener le pays en arrière, vers le règne d’un pouvoir personnel déguisé en légalité constitutionnelle. Le peuple guinéen mérite mieux.
Il faut exiger la transparence du processus constitutionnel, dénoncer la personnalisation du pouvoir, et refuser que la promesse de transition soit piétinée au profit d’un homme. La démocratie n’est pas une option, c’est une exigence.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mohamed.
Mis en ligne : 01/07/2025
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