La récente décision du juge d’instruction financier de maintenir Farba Ngom en détention provisoire, malgré un rapport médical attestant de la gravité de son état de santé, soulève des questions éthiques et humanitaires profondes. Si la justice se doit d’être rigoureuse, elle ne peut ni ne doit faire abstraction de la dignité humaine. Cette décision, bien que conforme aux réquisitions du procureur, me paraît, au vu des circonstances, incompréhensible, injuste, et profondément inhumaine.
Farba Ngom, maire des Agnam et proche de l’ancien président Macky Sall, est poursuivi pour des faits graves : complicité de détournement de fonds publics et blanchiment de capitaux, dans une affaire impliquant des transactions suspectes d’un montant de plus de 125 milliards de francs CFA. Depuis février, il est incarcéré à la prison de Rebeuss sous mandat de dépôt. Récemment, une demande de liberté provisoire a été introduite, sur la base d’un rapport médical émis par le professeur Alassane Mbaye, cardiologue réputé. Ce dernier a déclaré sans équivoque que l’état de santé du prévenu était « incompatible avec la vie en prison ».
Comment justifier le rejet de cette demande, alors que le constat médical est clair ? Peut-on, au nom d’une justice inflexible, risquer la vie d’un détenu souffrant d’un trouble cardiaque reconnu comme potentiellement fatal s’il n’est pas pris en charge dans des conditions adaptées ? Ce refus pose un véritable problème de conscience. Il ne s’agit pas ici de défendre l’innocence ou la culpabilité de Farba Ngom, mais de rappeler une vérité fondamentale : la justice ne peut se faire au prix de la vie ou de la santé d’un homme.
Le respect des droits de l’homme ne peut être à géométrie variable. Même une personne incarcérée, accusée de crimes économiques majeurs, demeure un être humain. La Constitution sénégalaise et les conventions internationales auxquelles le pays a souscrit exigent une prise en charge humaine et médicale des personnes privées de liberté. En refusant la liberté provisoire, alors qu’une solution alternative comme le bracelet électronique aurait pu garantir le suivi judiciaire, le juge renvoie l’image d’une justice punitive, insensible et déconnectée des exigences humanitaires.
Dans d’autres pays, des décisions similaires ont soulevé l’indignation. En France, en 2020, l’ancien ministre Claude Guéant, également incarcéré, avait obtenu un aménagement de peine pour raisons médicales. L’objectif n’est pas de créer une justice à deux vitesses, mais d’appliquer avec discernement les principes fondamentaux d’équité. Il ne s’agit pas de privilèges, mais de traitement humain et digne.
Ce cas révèle une dérive inquiétante où la volonté de faire exemple prend le pas sur l’essentiel : la protection de la vie. En matière judiciaire, l’exemplarité ne doit pas signifier l’oubli des valeurs humaines. Il est impératif de reconsidérer cette décision, non pas en faveur de Farba Ngom en tant qu’homme politique, mais en tant que patient vulnérable, en danger dans un environnement carcéral inadapté à sa pathologie.
Le maintien en détention de Farba Ngom, malgré les alertes médicales, est une faute morale. Il faut une réévaluation urgente de sa situation, dans le respect des droits humains. La justice doit être ferme, certes, mais elle doit aussi être compatissante, lucide et respectueuse de la vie. Autrement, elle devient une mécanique froide, indifférente à la souffrance qu’elle engendre.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Moustapha Niass.
Mis en ligne : 05/07/2025
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