Dans une récente sortie au vitriol rapportée par L’Observateur, Barthélémy Dias, ancien maire de Dakar, a vivement critiqué le Premier ministre Ousmane Sonko, sans toutefois le nommer. Il l’accuse d’avoir instrumentalisé les arrestations survenues lors de la campagne législative à Thiès, dénonçant un « caprice » de « petit mec » qui aurait conduit à une véritable « prise d’otage politique ». Dias revendique par ailleurs son statut d’opposant, contestant frontalement les déclarations de Sonko sur l’inexistence d’opposition au Sénégal.
Mais derrière cette querelle à peine voilée se cache une vérité plus dérangeante : les deux hommes, prétendument en rupture avec le système, participent en réalité à la confusion démocratique actuelle.
Barthélémy Dias se présente aujourd’hui comme le défenseur de l’opposition sénégalaise, face à un Sonko devenu Premier ministre. Pourtant, il n’est pas si lointain le temps où ces deux figures se soutenaient, partageant les mêmes tribunes, les mêmes luttes contre le régime de Macky Sall. Ce revirement brutal soulève une question essentielle : s’agit-il d’une réelle divergence politique ou d’un simple conflit d’egos ?
Sonko, en déclarant que l’opposition n’existe plus, ne fait que révéler l’ambiguïté de sa propre position. Comment se prétendre l’émanation du peuple tout en niant l’existence d’un contre-pouvoir dans un pays pourtant encore fracturé politiquement ? Et que dire de Barthélémy Dias qui, tout en fustigeant Sonko, feint d’oublier qu’il a lui-même été un acteur central de cette coalition aujourd’hui au pouvoir ?
Ces attaques croisées ne sont que l’arbre qui cache la forêt : une crise profonde de légitimité démocratique. Les accusations de Dias sur la gestion opaque des JOJ Dakar 2026 et les détournements de projets publics sont graves. Mais elles viennent d’un homme qui, durant ses années à la tête de la Ville de Dakar, n’a pas toujours su garantir la transparence ou éviter la politisation des projets municipaux.
De son côté, Sonko, désormais chef du gouvernement, peine à se détacher de son passé d’opposant radical. Il continue d’entretenir une posture contestataire tout en exerçant le pouvoir, instaurant une confusion dangereuse entre gouvernance et militantisme.
Ce duel verbal entre Dias et Sonko détourne l’attention des vrais enjeux : pauvreté persistante, chômage massif des jeunes, crise éducative et sanitaire. Le peuple sénégalais n’a que faire des règlements de comptes entre anciens alliés. Ce qu’il attend, c’est une vision claire, des politiques cohérentes et une classe politique adulte, capable de dépasser ses rancunes.
Des scènes similaires ont été observées dans d’autres pays africains, où les leaders de l’opposition, une fois au pouvoir, oublient les principes qu’ils défendaient. En RDC, par exemple, l’alternance n’a pas empêché les luttes d’influence au sommet de l’État, avec des alliances rompues dès que les intérêts personnels prennent le dessus. Le Sénégal n’est donc pas un cas isolé, mais cela ne justifie en rien cette régression démocratique.
Le peuple sénégalais ne doit plus se laisser distraire par ces affrontements stériles. Barthélémy Dias et Ousmane Sonko ne sont que les deux faces d’une même médaille politique : celle d’une opposition devenue pouvoir sans boussole, et d’un pouvoir incapable de se réinventer. Le pays mérite mieux que des leaders qui préfèrent les micros aux réformes.
Les citoyens doivent regarder au-delà des discours, scruter les actes, et refuser de laisser leur avenir être pris en otage par des ambitions personnelles déguisées en luttes idéologiques.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Aliou Sall.
Mis en ligne : 08/07/2025
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