L’actrice sénégalaise Oumy Mbaye a récemment bouleversé l’opinion publique avec un témoignage poignant sur son ex-mari. Violences psychologiques, humiliations, maraboutage : autant d’accusations graves portées à travers un récit personnel, largement relayé et salué sur les réseaux sociaux. Si l’on ne remet pas en question la souffrance exprimée, ce genre de témoignage médiatique illustre un phénomène inquiétant : la tendance à désigner automatiquement les femmes comme victimes dans les divorces, et les hommes comme bourreaux.
Au Sénégal, les divorces sont de plus en plus médiatisés, surtout lorsqu’ils concernent des figures publiques. Les médias et les réseaux sociaux jouent un rôle central dans la construction du récit dominant : celui de la femme victime d’un homme violent, manipulateur ou absent. Ce schéma, bien que réel dans certains cas, devient trop souvent une grille de lecture unique, occultant des réalités plus complexes.
Dans le cas d’Oumy Mbaye, la parole de l’actrice est accueillie comme vérité absolue. Or, son ex-mari n’a ni été interrogé publiquement, ni donné sa version des faits. L’espace médiatique ne lui accorde aucun droit de réponse. Ce déséquilibre alimente une justice émotionnelle, où la compassion du public remplace l’enquête et le discernement. Le danger ici est double : d’une part, la stigmatisation immédiate d’un homme sans procédure équitable, et d’autre part, la généralisation de comportements masculins toxiques à l’ensemble des hommes divorcés.
De nombreux hommes, dans notre société, vivent des violences conjugales. Elles sont souvent psychologiques : insultes, menaces de retirer les enfants, diffamation sur les réseaux sociaux… Parfois physiques. Mais ces hommes se heurtent à un mur de silence, car admettre être victime reste socialement inacceptable pour eux. Leur souffrance est banalisée, moquée ou ignorée. Le discours dominant leur refuse le statut de victime légitime.
De plus, dans des procédures de divorce, certains hommes sont privés injustement de la garde de leurs enfants ou sont décrits comme violents sans preuve formelle, simplement parce que la société est déjà prédisposée à croire la version féminine. Cette asymétrie est préjudiciable pour la vérité et pour l’équilibre des droits.
Dans d’autres pays, comme la France ou le Canada, des études récentes montrent que les hommes victimes de violences conjugales représentent entre 25 % et 33 % des cas. Pourtant, leur parole est rarement prise au sérieux. Au Sénégal, où le patriarcat est certes puissant, ce déni de victimisation masculine est encore plus marqué.
Le témoignage d’Oumy Mbaye doit être écouté, certes. Mais il doit aussi être analysé avec lucidité, sans céder à l’émotion pure. Nous devons refuser les jugements hâtifs et les récits unilatéraux. La souffrance n’a pas de genre. Pour une société plus juste, il faut équilibrer les voix, offrir à chaque partie un droit à la parole, à la défense, à la reconnaissance.
Écoutons les femmes. Mais écoutons aussi les hommes.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Eve Sagna.
Mis en ligne : 08/07/2025
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