Le sommet des BRICS, qui s’est tenu à Rio de Janeiro le 6 juillet, a été l’occasion pour les dirigeants des grandes puissances émergentes de vanter les mérites de leur bras financier, la New Development Bank (NDB). Présentée comme une alternative crédible au FMI et à la Banque mondiale, cette institution fondée en 2015 se donne pour mission de soutenir le développement durable dans les pays émergents. Pourtant, à l’heure d’un premier bilan, force est de constater que la promesse d’équité portée par la NDB semble largement profiter aux puissants du club.
La NDB a vu le jour dans un contexte de remise en question de la domination occidentale sur la finance mondiale. En s’unissant, le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ont voulu démontrer que le Sud global pouvait s’organiser pour créer ses propres instruments de développement. Avec un capital initial de 50 milliards de dollars et l’ambition de financer des infrastructures et projets durables, la banque devait être un levier pour tous les pays émergents. Or, dix ans après, la réalité est bien différente.
Sur les 120 projets approuvés par la NDB, pour un montant total de 40 milliards de dollars, ce sont principalement la Chine, l’Inde et le Brésil qui en ont tiré profit. À titre de comparaison, l’Afrique dans son ensemble ne compte que dix projets, pour des montants souvent modestes. Le dernier en date, une réhabilitation ferroviaire en Afrique du Sud, n’atteint même pas les 300 000 dollars. C’est bien peu pour un continent où les besoins en infrastructures sont pourtant immenses.
La Banque met en avant l’utilisation des monnaies locales et sa contribution à un ordre monétaire multipolaire. Mais derrière ces éléments de langage séduisants, se cache une politique de financement qui reste fortement centralisée au profit des économies les plus influentes du groupe. On est loin de la coopération Sud-Sud vantée par ses promoteurs.
Concentration des financements : Inde, Chine et Brésil absorbent l’essentiel des projets, renforçant un déséquilibre déjà existant entre membres des BRICS.
Marginalisation des petits pays : Des membres plus récents ou plus vulnérables, comme l’Égypte ou le Bangladesh, peinent à accéder à des financements significatifs.
Communication soignée, résultats limités : La rhétorique autour de l’inclusivité et de l’indépendance vis-à-vis du dollar masque un fonctionnement de plus en plus semblable aux institutions qu’elle critique.
La Banque africaine de développement (BAD), sans capital équivalent à celui de la NDB, a débloqué 11 milliards de dollars en 2024 uniquement pour l’Afrique. Une performance que la NDB peine à égaler en dix ans sur l’ensemble du Sud global. Cela interroge sur ses priorités.
La New Development Bank s’inscrit peut-être dans une logique géopolitique innovante, mais elle n’a pas encore su démontrer qu’elle est véritablement la banque du développement des pays émergents. Tant que ses financements resteront captifs des grandes puissances des BRICS, elle ne sera qu’un nouvel outil au service d’anciens schémas de domination.
La NDB doit repenser son modèle, qu’elle ouvre ses instances de décision, et qu’elle finance effectivement les économies les plus fragiles. Sinon, elle ne sera rien d’autre qu’un FMI version Sud, avec les mêmes travers, mais d’autres visages.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mamadou Diaby.
Mis en ligne : 09/07/2025
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