Le piège doré du « Made in Sénégal » : Dépendance économique bien réelle - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Economie | Par Eva | Publié le 12/07/2025 08:07:00

Le piège doré du « Made in Sénégal » : Dépendance économique bien réelle

Le président de la République a reçu, ce lundi, une délégation du groupe sud-coréen Donewon, spécialisé dans la pêche au thon et la conserverie. Cette rencontre a porté sur un projet d’investissement dans la transformation locale des produits halieutiques au Sénégal. Présentée comme un partenariat gagnant-gagnant, cette initiative est censée renforcer les exportations sénégalaises vers les marchés occidentaux. Mais derrière l’enthousiasme affiché, se cache un danger latent : une dépendance économique accrue aux intérêts étrangers, au détriment de l’autonomie du pays.

Depuis plusieurs années, le Sénégal s’inscrit dans une dynamique de croissance accélérée portée par le Plan Sénégal Émergent (PSE).

Dans ce cadre, les investissements directs étrangers (IDE) sont vivement encouragés, notamment dans des secteurs stratégiques comme la pêche, l’agriculture ou les énergies. L’objectif affiché est de créer des emplois, de développer les chaînes de valeur locales et de faire rayonner le « Made in Sénégal ». En théorie, rien à redire. Mais dans la pratique, cette stratégie repose trop souvent sur une logique de dépendance à des groupes étrangers dont les intérêts économiques priment sur les impératifs de souveraineté nationale.

L’arrivée du groupe Donewon pourrait sembler bénéfique : transformation locale des ressources, création d’emplois, hausse des exportations. Cependant, il faut interroger la nature du pouvoir réel accordé à ces entreprises. Qui contrôle la chaîne de production ? Qui détient les profits ? Quels mécanismes garantissent un transfert de compétences et une réelle montée en gamme des entreprises locales ? Trop souvent, les multinationales opèrent sur nos territoires comme des enclaves, extrayant la richesse sans intégrer les populations locales dans la gouvernance ou la valeur ajoutée.

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Le cas de la pêche artisanale illustre parfaitement les dangers liés à la dépendance économique du Sénégal. Ces dernières années, les accords conclus avec des pays comme la Chine ou la Turquie ont conduit à une surexploitation inquiétante des ressources maritimes, marginalisant les pêcheurs locaux. Les promesses d’emplois durables et de développement économique se sont, dans bien des cas, révélées illusoires. Le projet du groupe Donewon risque fort de suivre cette même trajectoire : domination technologique étrangère, rapatriement massif des bénéfices et ancrage local limité. Cette logique perpétue une dépendance économique structurelle, où le Sénégal cède des segments stratégiques de son économie au profit d’intérêts extérieurs. D’autres pays africains comme Madagascar ou la Mauritanie ont déjà connu de telles dérives, où les investissements directs étrangers ont davantage servi les investisseurs que les populations locales.

Il est paradoxal de vouloir promouvoir le « Made in Sénégal » tout en s’appuyant presque exclusivement sur des capitaux, des technologies et des savoir-faire venus de l’étranger. Cette approche, loin de renforcer la souveraineté économique, ne fait qu’aggraver la dépendance économique du Sénégal vis-à-vis des acteurs extérieurs. Elle perpétue la place périphérique du pays dans les chaînes de valeur mondiales. Or, une véritable industrialisation locale ne saurait émerger sans une consolidation du tissu entrepreneurial national, un renforcement des compétences locales, et un contrôle public rigoureux sur les secteurs stratégiques.

Le Sénégal ne doit pas devenir un simple maillon d’une chaîne de valeur dominée par des acteurs étrangers. Ce n’est pas en déléguant notre souveraineté économique que nous bâtirons une croissance durable. Les autorités doivent revoir leur copie et privilégier des partenariats équilibrés, où l’État impose des conditions strictes : transfert de technologie, quotas de main-d’œuvre locale, fiscalité équitable, et surtout contrôle sénégalais sur les ressources naturelles.

Il faut finir avec les illusions du développement importé. Pour que le « Made in Sénégal » soit plus qu’un slogan, il doit être porté, avant tout, par les Sénégalais eux-mêmes.

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Maimouna Faye.
Mis en ligne : 12/07/2025

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