Le 8 juillet dernier, Moctar Dème, père de famille, est décédé dans les locaux de la brigade de gendarmerie du Ranch de Dolly, à Linguère, deux jours après y avoir été placé en garde à vue. Officiellement, il se serait suicidé à l’aide de son propre foulard. Sa famille, dévastée, refuse de croire à cette version et exige une autopsie ainsi que des éclaircissements. Cette affaire témoigne d’une gestion profondément défaillante des autorités locales et des forces de sécurité, notamment en matière de surveillance des détenus et de respect de leurs droits fondamentaux.
Moctar Dème a été arrêté dans le cadre d’une plainte pour vol de bétail, un crime certes sérieux, mais qui ne justifie en aucun cas une négligence aussi flagrante dans la gestion de sa détention. Retrouvé mort, pendu avec son foulard dans sa cellule, la gendarmerie évoque un suicide. Pourtant, plusieurs zones d’ombre entachent cette version. Comment un détenu peut-il garder un accessoire potentiellement dangereux dans un espace censé être sécurisé ? Où étaient les agents en charge de la surveillance ? Aucune de ces questions ne reçoit pour l’instant de réponse satisfaisante.
Ce drame met en lumière de graves lacunes dans la surveillance et la protection des personnes en garde à vue. Un suicide, s’il est avéré, n’est pas un simple acte personnel dans un tel contexte : c’est un signal d’alarme sur l’état du système pénitentiaire et sur l’irresponsabilité des forces de sécurité. Laisser un détenu se donner la mort dans sa cellule relève au mieux d’une négligence grave, au pire d’une dissimulation de faits plus sombres. Dans les deux cas, la responsabilité de la gendarmerie locale est engagée.
Cette affaire rappelle tristement d’autres cas de morts suspectes en détention, au Sénégal comme ailleurs. En 2021, à Tambacounda, un autre détenu est décédé dans des conditions similaires, sans que des explications claires n’aient jamais été fournies. Ce type de répétition n’est pas anodin ; il traduit une culture d’impunité et de laxisme que les autorités peinent à enrayer.
À l’international, des pays comme la France ou les États-Unis sont également confrontés à des morts en détention. Mais dans ces contextes, des enquêtes indépendantes sont souvent ouvertes immédiatement, et les institutions judiciaires sont mises sous pression par l’opinion publique. Le Sénégal ne peut rester à la traîne en matière de droits humains et de transparence institutionnelle.
La famille de Moctar Dème a raison d’exiger une autopsie indépendante et des explications. Au-delà du deuil, elle réclame justice. Et elle n’est pas seule. Chaque citoyen sénégalais devrait être préoccupé par cette affaire, car elle interroge la sécurité juridique de chacun.
L’État sénégalais doit repenser en profondeur la gestion de la garde à vue, renforcer les mécanismes de contrôle des forces de l’ordre, et installer des caméras de surveillance dans les cellules de détention. Ces mesures, pourtant simples, peuvent sauver des vies.
Le décès de Moctar Dème n’est pas une fatalité, mais une conséquence directe des dysfonctionnements du système. Il ne doit pas rester sans suite. Que justice soit rendue, et que les responsabilités soient enfin situées.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Youssouf Diop.
Mis en ligne : 12/07/2025
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