La nouvelle en provenance du jury 1321 du lycée de Salikégné, dans le département de Kolda, est inquiétante pour l’école sénégalaise. Trois candidats ont été expulsés du centre d’examen pour avoir utilisé un téléphone portable pendant les épreuves du baccalauréat, notamment en philosophie et en langue vivante 1. Le président du jury, Dr Assane Seck, a confirmé les faits, précisant que les sanctions ont été appliquées conformément aux directives de l’office du bac. Si cette rigueur est à saluer, elle ne saurait masquer une réalité plus préoccupante : la multiplication de ces cas de fraudes est un signal d’alarme, révélateur d’une crise au sein de l’école sénégalaise.
La triche aux examens n’est malheureusement pas un cas isolé au Sénégal. Chaque année, les médias rapportent des cas similaires dans différentes régions du pays.
En 2023, plusieurs centres d’examen avaient également enregistré des cas de fraude, certains impliquant des réseaux organisés avec complicité interne. Ce climat de suspicion constante et d’effritement de l’éthique académique traduit une perte progressive des repères au sein de l’institution scolaire.
Ces incidents ne sont pas de simples dérapages individuels, mais reflètent un dysfonctionnement plus large au sein de l’école sénégalaise. Le recours à la tricherie traduit une perte de confiance des élèves en leurs propres capacités, souvent alimentée par un système éducatif qui les prépare mal aux examens. En milieu rural notamment, les disparités en termes d’infrastructures, d’accès à internet, de personnel qualifié et de matériel pédagogique au sein de l’école sénégalaise sont criantes. Dans ces conditions, comment s’étonner que certains candidats cherchent des raccourcis ?
Par ailleurs, le manque de surveillance rigoureuse et l’insuffisance des dispositifs de contrôle facilitent ces dérives. Comment peut-on expliquer qu’un candidat entre dans une salle d’examen avec un téléphone portable, alors que des contrôles sont censés être effectués à l’entrée ? Cela laisse planer des doutes sur la vigilance du personnel d’encadrement, voire sur l’existence de complicités silencieuses.
La banalisation de la tricherie révèle également un malaise culturel : dans certaines sphères, réussir coûte que coûte semble plus important que le mérite ou l’effort. Ce relativisme moral mine non seulement l’école, mais également les fondations éthiques de la société. Le baccalauréat, censé être le fruit d’un parcours exigeant, devient alors une formalité biaisée, vidée de sa valeur.
Dans d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, comme le Ghana ou le Rwanda, des réformes fermes ont été entreprises pour restaurer l’intégrité des examens : usage de brouilleurs de téléphones, caméras de surveillance, lourdes sanctions pénales. Ces États montrent qu’il est possible de restaurer la confiance dans l’évaluation scolaire.
Ce nouveau scandale à Salikégné doit être un tournant. Il ne suffit pas de sanctionner trois élèves : il faut remettre à plat tout le système. Une réforme courageuse et structurée est urgente, avec un meilleur encadrement des examens, une formation renforcée du personnel éducatif, et surtout, une revalorisation de l’école sénégalaise comme lieu de mérite et non de combine.
En tolérant ces dérives, c’est notre avenir que nous trichons. Le Sénégal ne peut prétendre au développement en sacrifiant l’intégrité de sa jeunesse sur l’autel de l’indifférence. Il faut redonner à l’éducation ses lettres de noblesse.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Fatma Thiam.
Mis en ligne : 15/07/2025
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