Une restriction de trop : Polémique au Grand Théâtre national - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Société | Par Eva | Publié le 20/07/2025 09:07:08

Une restriction de trop : Polémique au Grand Théâtre national

Récemment, une décision prise par la direction du Grand Théâtre national Doudou Ndiaye Coumba Rose a suscité un vif débat. Le directeur, Serigne Fall Guèye, a interdit au personnel de l’établissement le port de greffage, de perruques ainsi que la pratique de la dépigmentation. Cette mesure, justifiée par un souci de cohérence avec la mission culturelle panafricaniste de l’institution, a pourtant fait l’objet de nombreuses critiques.

Cette décision, bien que présentée sous un angle valorisant l’identité africaine, constitue une atteinte injustifiée aux libertés individuelles des employés et soulève un problème fondamental : le droit de chacun à choisir son apparence.

Le Grand Théâtre national se présente comme un véritable temple du panafricanisme, engagé dans la promotion des valeurs culturelles endogènes africaines. Sa volonté affichée est de valoriser l’héritage identitaire du continent, en faisant de son personnel un exemple vivant de cette noble mission. Dans ce cadre, le directeur a rappelé que plusieurs pays africains interdisent déjà la dépigmentation, et que l’institution s’inscrit ainsi dans une logique de revalorisation de l’« africanité ».

Pourtant, cette polémique au Grand Théâtre national soulève une interrogation majeure : limiter la liberté des employés par des prescriptions esthétiques strictes, même dans un contexte professionnel, mérite une réflexion plus approfondie. Car au-delà des symboles et des intentions, c’est bien la question fondamentale du respect des libertés individuelles qui est en jeu.

L’apparence personnelle est une expression intime de l’identité de chacun. Imposer au personnel du Grand Théâtre national des contraintes sur leurs choix corporels, greffages, perruques, dépigmentation, revient à restreindre leur autonomie corporelle et leur liberté d’expression. La culture, dans sa richesse et sa diversité, n’est pas figée dans un modèle unique d’« authenticité » esthétique. En prétendant uniformiser l’apparence pour « représenter » une africanité idéalisée, l’institution gomme la pluralité des identités africaines contemporaines, qui évoluent au gré des influences sociales et individuelles.

Par ailleurs, cette décision risque d’instaurer un précédent dangereux : celui d’institutions culturelles ou professionnelles qui se permettent de dicter à leurs employés ce qui est acceptable ou non en matière d’apparence physique. On peut penser à plusieurs cas dans le monde, où des règles vestimentaires ou capillaires ont suscité la controverse, comme les interdictions des cheveux naturels ou des turbans dans certains milieux professionnels ou scolaires, soulevant des accusations de discrimination et d’atteintes aux droits fondamentaux.

La liberté personnelle et l’autonomie corporelle sont des droits essentiels dans toute société démocratique. Refuser à un individu le droit de disposer de son corps ou de choisir son style capillaire sous prétexte d’une « mission culturelle » impose un carcan rigide qui peut engendrer du malaise, voire du rejet de l’institution. De plus, il faut rappeler que la diversité des expressions identitaires est un enrichissement, non une menace. Le combat pour valoriser les cultures africaines ne doit pas s’effectuer au prix de la négation des choix individuels.

Des expériences ailleurs ont montré les limites et les dangers d’une régulation trop stricte de l’apparence dans les institutions. Par exemple, aux États-Unis ou en Europe, plusieurs entreprises et écoles ont dû revoir leurs politiques discriminantes sur les coiffures, sous la pression de mouvements pour les droits civiques. Ces cas illustrent qu’une politique d’inclusion passe par l’acceptation des différences, et non par leur répression.

Si le Grand Théâtre national a le devoir de promouvoir une culture africaine riche et authentique, il ne doit pas, dans le même temps, réduire la liberté de ses employés en imposant des règles contraignantes sur leur apparence. La véritable valorisation de l’africanité ne peut passer par l’uniformisation ni par la restriction des libertés individuelles. Nous appelons donc la direction à reconsidérer cette mesure, à engager un dialogue ouvert avec le personnel, et à adopter une politique respectueuse de la diversité des expressions identitaires. Liberté d’apparence et respect des choix personnels doivent être la norme dans toutes les institutions, y compris celles chargées de promouvoir la culture. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra construire une africanité inclusive, vivante et fière de sa pluralité.

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Coumba Sidibé.
Mis en ligne : 15/07/2025

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Salla
sénégal dafa nekh nio khamni amouniou bénéu savoir vivre nioy diokhé ay règlement
Le 2025-07-20 17:35:39

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