La récente relance du dossier sur la mort de François Mancabou, survenue en 2022 dans le cadre de l’affaire dite des « Forces spéciales », marque une étape cruciale dans cette sombre affaire qui n’a cessé de hanter la conscience nationale. Après trois années d’inaction et de silence judiciaire, le magistrat instructeur du tribunal de Dakar a repris les auditions, notamment celle de Pape Mamadou Seck, compagnon de cellule de Mancabou, qui a livré des confidences précieuses.
Ce regain d’activité ne doit pas seulement être vu comme un effet d’annonce mais comme une première lueur d’espoir pour une justice longtemps défaillante.
La mort de François Mancabou a suscité de nombreuses interrogations dès le départ, nourries par l’opacité entourant les circonstances de son interpellation et le déroulement de sa détention. Pendant longtemps, les familles et défenseurs ont dénoncé le silence des autorités et une justice paralysée, incapable de répondre aux nombreuses zones d’ombre. Ce retard judiciaire a été vécu comme une forme d’injustice en soi, alimentant le sentiment d’impunité et la défiance vis-à-vis des institutions. Dans un pays où la confiance envers la justice est parfois vacillante, chaque retard dans l’établissement de la vérité contribue à fragiliser davantage la cohésion sociale.
La reprise des investigations judiciaires, bien que tardive, témoigne d’une prise de conscience nécessaire. Il faut saluer cette nouvelle dynamique, qui traduit une volonté même naissante de faire avancer l’affaire malgré les difficultés accumulées. L’audition de témoins-clés, le recueil de nouvelles preuves, et surtout la transparence accrue dans le traitement du dossier, constituent des signes encourageants qui doivent être amplifiés. Cette relance pourrait constituer un précédent fort, envoyant un message clair : la vérité doit triompher, quelles que soient les résistances.
Cependant, cette avancée ne doit pas occulter les critiques formulées par les avocats de la famille Mancabou, qui pointent du doigt des dysfonctionnements majeurs : non-transmission des vidéos cruciales, absence de traitement effectif des plaintes, et un montage suspect des éléments de preuve. Ces manquements sont inacceptables et inadmissibles. Il ne s’agit pas uniquement de lenteur de la justice, mais d’un ministère public qui doit assumer pleinement son rôle dans la recherche de la vérité et la protection des droits fondamentaux.
D’abord, le respect des droits humains exige une justice diligente et transparente. Chaque jour d’inaction est une victoire pour les oppresseurs et une défaite pour la société. Ensuite, la relance de ce dossier sensible peut redonner espoir aux victimes et à leurs familles, en témoignant que la justice peut encore fonctionner dans notre pays. Enfin, cette affaire est un test décisif pour la crédibilité de notre système judiciaire : un traitement équitable et rigoureux peut restaurer la confiance populaire.
Comparons cette situation à d’autres contextes où la persévérance judiciaire a permis de faire éclater la vérité, comme dans certains pays d’Afrique du Sud post-apartheid où des commissions spéciales ont su réconcilier vérité et justice, ou encore en Europe, où la reprise d’enquêtes longtemps enterrées a fini par permettre des réparations symboliques et morales. Le Sénégal peut et doit s’inspirer de ces modèles pour ne pas laisser ce dossier sombrer dans l’oubli.
La relance du dossier François Mancabou est une victoire en devenir, un signe positif dans un paysage judiciaire souvent critiqué pour sa lenteur et ses manquements. Mais cette avancée fragile doit être soutenue par une vigilance collective, une exigence constante d’impartialité et de transparence. Il est inadmissible que des dysfonctionnements persistants continuent à entraver la justice. Le ministère public et les autorités judiciaires doivent jouer leur rôle sans faiblesse. La vérité doit triompher, non seulement pour François Mancabou, mais pour tous ceux qui croient encore en un Sénégal juste et équitable.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Brahima Gaye.
Mis en ligne : 31/07/2025
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