Fille et fils du président promus : Le mérite piétiné au Soudan du Sud - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Afrique | Par Eva | Publié le 03/09/2025 07:09:15

Fille et fils du président promus : Le mérite piétiné au Soudan du Sud

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Récemment, le président sud-soudanais Salva Kiir a nommé sa fille, Adut Salva Kiir, comme envoyée présidentielle principale pour les programmes spéciaux, après avoir déjà placé son fils à un poste clé au sein du cabinet présidentiel. Ces nominations, loin d’être anodines, soulèvent des questions fondamentales sur la nature du régime en place.

Elles révèlent une tendance inquiétante : la transformation progressive de la présidence en une affaire de famille, au mépris des principes républicains les plus élémentaires. Ce glissement vers une gouvernance dynastique, déjà observé dans d’autres pays, menace la stabilité et la crédibilité des institutions du Soudan du Sud.

Depuis son indépendance en 2011, le Soudan du Sud peine à se construire comme un État stable et démocratique. Après des décennies de guerre civile et des centaines de milliers de morts, le pays reste marqué par des divisions profondes et une gouvernance souvent opaque. Dans ce contexte, la concentration du pouvoir entre les mains d’une seule famille n’est pas seulement un symbole de népotisme, mais un risque majeur pour la cohésion nationale et la légitimité des institutions. Les nominations de proches parents à des postes stratégiques, sans parcours politique transparent ni légitimité populaire, interrogent sur la volonté réelle de construire une démocratie inclusive et méritocratique.

La nomination d’Adut Salva Kiir, après celle de son frère Thiik Salva Kiir en 2024, s’inscrit dans une logique de consolidation du pouvoir familial. Ce phénomène n’est pas isolé : en Afrique comme ailleurs, des dynasties politiques se sont installées, souvent au détriment de la stabilité et du développement. Au Gabon, la famille Bongo a régné sans discontinuité depuis 1967, tout comme les Eyadéma au Togo ou les Assad en Syrie. Ces exemples montrent que la transmission héréditaire du pouvoir affaiblit les mécanismes démocratiques, favorise la corruption et marginalise les compétences au profit des loyautés familiales. Le Soudan du Sud semble emprunter cette voie périlleuse, où le mérite cède la place à l’héritage, et où l’État devient le patrimoine d’une minorité.

Ni Adut ni Thiik Salva Kiir n’ont fait leurs preuves dans des fonctions publiques exigeantes. Leur ascension rapide, fondée sur leur nom plutôt que sur leurs compétences, sape la confiance des citoyens dans les institutions. Comment croire en un système où les postes clés sont réservés à une élite familiale, tandis que des millions de Sud-Soudanais luttent pour accéder à l’éducation, à la santé ou à un emploi ?

Malgré les alertes répétées de l’Union africaine et de l’ONU sur la dégradation de la situation au Soudan du Sud, les réactions aux nominations familiales restent timides. Pourtant, l’UA a elle-même souligné la « régression alarmante » du pays, appelant à une « fin immédiate des hostilités » et à un retour à une gouvernance démocratique. Le manque de fermeté des partenaires internationaux envoie un signal dangereux : le népotisme serait toléré, tant qu’il ne menace pas directement leurs intérêts.

L’histoire montre que les régimes dynastiques, en fermant l’accès au pouvoir à une majorité de la population, alimentent les frustrations et les conflits. En Syrie, la transmission du pouvoir au sein de la famille Assad a plongé le pays dans une guerre civile dévastatrice. En Guinée équatoriale ou au Tchad, les dynasties au pouvoir ont systématiquement étouffé l’opposition et favorisé l’instabilité. Le Soudan du Sud, déjà fragilisé par des années de violence, ne peut se permettre une telle dérive.

Le Soudan du Sud se trouve à un carrefour. Soit il poursuit sur la voie d’une gouvernance clanique, risquant de reproduire les erreurs d’autres régimes autoritaires. Soit il choisit de renforcer ses institutions, en garantissant l’égalité des chances et la transparence dans l’accès aux responsabilités publiques. La communauté internationale, les organisations de la société civile et les citoyens doivent exiger des comptes : les postes de pouvoir ne sont pas des héritages, mais des responsabilités qui doivent revenir aux plus compétents.

Il faut dire stop à la confiscation du pouvoir par une minorité. Le Soudan du Sud mérite mieux qu’une monarchie déguisée. Il mérite un État au service de tous, où chaque citoyen, quels que soient son nom ou ses origines, puisse aspirer à contribuer à la construction de la nation. La légitimité ne se transmet pas, elle se gagne.

La lutte contre le népotisme passe par des réformes institutionnelles fortes, une pression accrue des donateurs internationaux et une mobilisation citoyenne. Sans cela, le rêve d’un Soudan du Sud démocratique et prospère restera hors de portée.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Didier B.
Mis en ligne : 03/09/2025

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