Les opinions exprimées dans cet article sont celles d’un contributeur externe. NotreContinent.com est une plateforme qui encourage la libre expression, la diversité des opinions et les débats respectueux, conformément à notre charte éditoriale « Sur NotreContinent.com chacun est invité à publier ses idées »
La Banque Islamique de Développement (BID) a récemment réaffirmé son engagement à soutenir le Sénégal dans la mise en œuvre de son Agenda National de Transformation 2050, promettant un appui technique et financier « significatif ». Lors d’une audience avec le Premier ministre Ousmane Sonko, la délégation de la BID, menée par son vice-président Dr Rami S. Ahmad, a salué la « transparence et la rigueur » du gouvernement sénégalais, assurant que ses interventions seraient alignées sur les axes stratégiques du pays. Si cette annonce est présentée comme une opportunité de développement, une analyse critique révèle un risque majeur : celui d’un partenariat qui profiterait davantage à une minorité d’élites politiques et économiques qu’à la majorité des Sénégalais, creusant ainsi les inégalités sociales et territoriales.
Le Sénégal, comme de nombreux pays africains, fait face à un défi de taille : concilier croissance économique et réduction des inégalités. L’Agenda 2050, présenté comme une feuille de route ambitieuse, s’articule autour de quatre axes, dont le « capital humain et l’équité sociale » et l’« aménagement et développement durable ». Pourtant, l’expérience montre que les grands projets infrastructurels, souvent financés par des institutions internationales, bénéficient rarement aux populations les plus vulnérables. La BID, dont les financements ciblent traditionnellement les infrastructures (énergie, transports, télécommunications), a déjà été critiquée pour son approche peu inclusive. Par exemple, au Mali, au Burkina Faso et en Égypte, la BID a financé des centrales électriques et solaires pour des centaines de millions de dollars, mais l’impact social direct de ces projets sur les populations locales reste limité, voire contesté.
Les annonces de la BID s’inscrivent dans une logique bien connue : privilégier les grands projets infrastructurels, peu créateurs d’emplois locaux et souvent déconnectés des besoins sociaux immédiats (santé, éducation, agriculture). Or, selon les priorités affichées par le gouvernement sénégalais lui-même, le volet « capital humain et équité sociale » devrait bénéficier de 35,1 % des financements de l’Agenda 2050. Pourtant, les projets financés par la BID en Afrique ont rarement intégré des mécanismes de redistribution ou des bénéfices directs pour les populations les plus pauvres. Au Cameroun, par exemple, les 17 projets en cours financés par la BID (pour près d’un milliard de dollars) se concentrent sur les infrastructures routières et énergétiques, sans garantie d’amélioration des services sociaux de base.
Les projets financés par la BID en Afrique (centrales électriques, routes, ports) sont souvent présentés comme des leviers de développement, mais leur impact sur la réduction de la pauvreté est rarement démontré. Au Kenya et au Ghana, les grands projets d’infrastructures ont même été accusés d’aggraver les inégalités, en favorisant les élites urbaines et les investisseurs privés au détriment des zones rurales et des populations marginalisées.
Les financements de la BID, comme ceux d’autres institutions, sont rarement assortis de conditions sociales strictes. Les retombées économiques (emplois, accès aux services) restent concentrées entre les mains d’une minorité, tandis que les populations locales subissent les coûts environnementaux et sociaux (déplacements, perte de terres, endettement).
Le Sénégal, déjà confronté à un endettement croissant, pourrait voir sa marge de manœuvre réduite par des prêts dont les bénéfices ne profitent qu’à une élite. Les exemples du Mali et du Burkina Faso, où la BID a financé des centrales thermiques sans garantie de tarifs abordables pour les ménages, illustrent ce risque.
Malgré les louanges de la BID pour la « transparence » du gouvernement sénégalais, la société civile et les populations locales sont rarement consultées dans l’élaboration et le suivi de ces projets. Or, sans participation citoyenne, les risques de détournement, de corruption ou de mauvaise allocation des fonds sont réels.
Le partenariat entre le Sénégal et la BID, tel qu’annoncé, risque de reproduire les erreurs du passé : des investissements massifs dans des infrastructures peu inclusives, au détriment des besoins sociaux urgents. Pour que l’Agenda 2050 profite réellement à tous les Sénégalais, il est impératif que les financements de la BID soient conditionnés à des critères sociaux stricts, à une transparence totale et à une participation active des populations concernées. Sans cela, ce partenariat ne fera qu’alimenter les inégalités et renforcer la dépendance du pays envers des acteurs extérieurs, au profit d’une minorité déjà privilégiée.
Comment garantir que les financements internationaux, comme ceux de la BID, servent d’abord les intérêts du peuple sénégalais et non ceux d’une élite politique et économique ?
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Alex Ndiaye.
Mis en ligne : 10/09/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.





