Le test de maturité d'une nation pétrolière : Sénégal-Woodside - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Business | Par Eva | Publié le 12/09/2025 03:09:30

Le test de maturité d'une nation pétrolière : Sénégal-Woodside

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La rencontre entre Meg O’Neil, PDG de Woodside, et le Président Bassirou Diomaye Faye, rapportée ce lundi, marque une étape importante dans la relation entre le Sénégal et l’un de ses principaux partenaires pétroliers. Alors que les médias soulignent les performances exceptionnelles du champ de Sangomar et les tensions fiscales persistantes, cet échange offre une opportunité de rappeler une évidence trop souvent oubliée : les grands projets, surtout ceux liés aux ressources naturelles, sont rarement exempts de différends.

Pourtant, c’est précisément dans la manière de les résoudre que se joue l’avenir d’une collaboration fructueuse. Le dialogue et la recherche de solutions mutuellement avantageuses sont non seulement possibles, mais essentiels pour transformer ces défis en leviers de développement pour le Sénégal.

Le Sénégal, nouveau venu dans le concert des pays producteurs de pétrole, mise sur le champ de Sangomar dont Woodside détient 82 % pour booster son économie et affirmer sa souveraineté énergétique. Depuis le début de l’exploitation, les résultats opérationnels sont salués, mais les relations entre l’État et l’opérateur australien ont connu des remous, notamment autour d’un redressement fiscal de plus de 41 milliards de francs CFA. Woodside, qui conteste cette réclamation devant les tribunaux sénégalais et le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), invoque des exonérations contractuelles. Si le litige est réel, il n’est ni insoluble ni exceptionnel : dans le monde, les projets pétroliers et gaziers sont souvent accompagnés de tensions similaires, résolues par la négociation et l’arbitrage.

L’attitude du Président Diomaye Faye, qui s’est engagé à aider Woodside à surmonter les obstacles, est un signal fort. En privilégiant la concertation à l’affrontement, il démontre une approche pragmatique, tournée vers la préservation d’un climat des affaires stable. Cette posture est d’autant plus cruciale que le Sénégal, en quête d’investissements étrangers, a tout à gagner à montrer sa capacité à gérer les conflits avec professionnalisme. Les mécanismes de règlement des différends, comme l’arbitrage international, ne sont pas des aveux de faiblesse, mais des outils de maturité institutionnelle. Ils rassurent les investisseurs sur la fiabilité du cadre juridique sénégalais et la volonté des autorités de trouver des solutions équitables.

Par ailleurs, l’exemple d’autres pays africains est éloquent. Le Ghana, confronté à des litiges avec des majors pétrolières, a su transformer ces tensions en opportunités de renforcement de sa gouvernance et de ses partenariats. De même, la Tanzanie a résolu un contentieux fiscal majeur avec des compagnies gazières en 2022, débouchant sur des investissements supplémentaires et une meilleure répartition des revenus. Ces cas prouvent qu’un différend bien géré peut devenir un catalyseur de confiance et de coopération durables.

Les entreprises comme Woodside recherchent des environnements prévisibles. En optant pour le dialogue, le Sénégal envoie un message clair : les désaccords ne remettent pas en cause la volonté de collaboration. Cela est crucial pour attirer d’autres acteurs dans le secteur énergétique, où la concurrence entre pays producteurs est féroce.

Le recours au CIRDI, une institution reconnue, montre que le Sénégal respecte les règles du jeu international. Cela renforce sa réputation et rassure les partenaires sur la sécurité de leurs investissements. Les arbitrages, même s’ils prennent du temps, permettent souvent de trouver des compromis qui préservent les intérêts de toutes les parties.

Woodside a déjà investi des milliards dans Sangomar et emploie des centaines de Sénégalais. Une résolution à l’amiable du litige pourrait déboucher sur des engagements renforcés en matière de formation, de transferts de technologies et de développement local – des bénéfices bien plus précieux qu’une victoire judiciaire à court terme.

À l’heure où de nombreux pays du continent peinent à attirer des investissements dans les hydrocarbures en raison de l’instabilité juridique ou politique, le Sénégal a l’opportunité de se distinguer. Une issue positive à ce différend pourrait servir de modèle, prouvant qu’il est possible de concilier fermeté et ouverture.

Les litiges entre États et compagnies pétrolières ne sont pas une fatalité, mais une étape presque inévitable dans la vie des grands projets. Ce qui compte, c’est la manière dont ils sont gérés. Avec sa volonté de dialogue et son recours à des mécanismes de règlement reconnus, le Sénégal montre la voie d’une coopération apaisée et productive. Le Président Diomaye Faye a raison de miser sur la concertation : c’est ainsi que se construisent les partenariats durables, ceux qui transforment les ressources naturelles en prospérité partagée. Woodside, de son côté, a tout intérêt à poursuivre ses efforts pour être un partenaire responsable, respectueux des attentes locales.

En définitive, le pétrole sénégalais n’est pas seulement une question de barils ou de francs CFA. C’est une histoire de confiance, de vision commune et de capacité à transformer les tensions en opportunités. Le Sénégal a tous les atouts pour écrire un nouveau chapitre de cette histoire – un chapitre où le dialogue l’emporte sur la confrontation, et où chaque partie y trouve son compte.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Laye Gaye.
Mis en ligne : 12/09/2025

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