Le pétrole, malédiction du Soudan du Sud : Rapport accablant de l'ONU - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Afrique | Par Eva | Publié le 19/09/2025 07:09:15

Le pétrole, malédiction du Soudan du Sud : Rapport accablant de l'ONU

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Un rapport accablant de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, publié récemment, lève le voile sur un scandale d’une ampleur inédite : au Soudan du Sud, les recettes pétrolières, estimées à plus de 25 milliards de dollars depuis l’indépendance en 2011, ont été détournées massivement par une élite politique, laissant la population dans une misère extrême. Ce constat s’appuie sur des faits indéniables : malnutrition généralisée, effondrement du système éducatif, et un pays classé dernier au classement du développement humain.

Face à cette réalité, il est temps de le dire clairement : le pétrole, loin d’être une bénédiction, est devenu une malédiction pour le Soudan du Sud. Une malédiction qui alimente la corruption, la violence et l’appauvrissement systématique de millions de personnes.

En 2011, le Soudan du Sud accédait à l’indépendance dans l’euphorie, porté par l’espoir d’une vie meilleure grâce à ses immenses réserves de pétrole. Douze ans plus tard, le bilan est catastrophique. Les promesses de développement se sont évaporées, remplacées par une corruption endémique et une gestion désastreuse des ressources. Alors que les dirigeants s’enrichissent, 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, et des milliers d’enfants meurent chaque année de faim ou de maladies évitables. Le pétrole, qui aurait dû financer des écoles, des hôpitaux et des infrastructures, a été transformé en instrument de prédation par une classe dirigeante sans scrupules.

Ce n’est pas une fatalité. D’autres pays, comme la Norvège ou le Botswana, ont su tirer parti de leurs ressources naturelles pour bâtir des sociétés prospères et équitables. Pourtant, au Soudan du Sud, l’or noir a surtout servi à financer des guerres, à enrichir une minorité, et à asphyxier toute velléité de progrès. Comment en est-on arrivé là ?

Le rapport de l’ONU ne laisse aucune place au doute : les revenus pétroliers ont été systématiquement détournés via des montages financiers opaques, souvent avec la complicité d’acteurs internationaux. Les entreprises étrangères, les banques et même certains États ferment les yeux sur ces pratiques, tant que leurs intérêts économiques sont préservés. Pendant ce temps, les Sud-Soudanais paient le prix fort. Les services publics sont inexistants, l’éducation et la santé s’effondrent, et la violence devient le seul langage des élites pour maintenir leur pouvoir.

La comparaison avec d’autres pays producteurs de pétrole est édifiante. En Norvège, les revenus pétroliers ont été investis dans un fonds souverain aujourd’hui estimé à plus de 1 400 milliards de dollars, garantissant éducation, santé et protection sociale pour tous. Au Botswana, les diamants ont permis de construire un État stable et en développement. Au Soudan du Sud, en revanche, le pétrole a été volé, purement et simplement. Les 25 milliards de dollars qui auraient pu transformer le pays ont disparu dans les poches de quelques-uns, ou ont servi à acheter des armes pour perpétuer les conflits internes.

Cette situation n’est pas seulement le résultat de l’incompétence ou de la malchance. Elle est le fruit d’un système délibéré de pillage, où la corruption est érigée en mode de gouvernance. Les dirigeants sud-soudanais, soutenus par des partenaires étrangers peu scrupuleux, ont fait le choix cynique de sacrifier leur peuple sur l’autel de leurs propres intérêts.

Il serait trop simple de rejeter toute la responsabilité sur les dirigeants locaux. Les complicités internationales sont tout aussi coupables. Les entreprises pétrolières, les banques qui blanchissent l’argent sale, et les gouvernements qui ferment les yeux par intérêt géopolitique ou économique, sont des coauteurs de cette tragédie. Sans leur soutien, le pillage des ressources sud-soudanaises ne pourrait pas atteindre une telle ampleur.

Pire encore, les mécanismes de contrôle internationaux, comme les sanctions de l’ONU ou les audits financiers, restent largement inefficaces. Les rapports s’accumulent, les condamnations morales pleuvent, mais les actes concrets manquent cruellement. Gel des avoirs, embargo sur les armes, poursuites judiciaires contre les responsables : où sont ces mesures ? Pourquoi la communauté internationale, si prompte à intervenir dans d’autres crises, reste-t-elle silencieuse face à ce scandale ? La réponse est cruelle : le Soudan du Sud n’est pas une priorité. Ses ressources intéressent, mais son peuple, lui, peut crever dans l’indifférence générale. Tant que le pétrole coule, peu importe qui en profite ou qui en souffre.

Le Soudan du Sud est un exemple frappant de la manière dont une ressource naturelle peut se transformer en arme de destruction massive entre les mains de dirigeants corrompus et de complices internationaux. Mais cette situation n’est pas une fatalité. Il est encore temps d’agir. Il faut que la communauté internationale cesse de fermer les yeux. Les entreprises étrangères doivent être tenues pour responsables de leur complicité. Les banques qui blanchissent l’argent du pétrole sud-soudanais doivent être sanctionnées.

Les dirigeants corrompus doivent être traduits en justice, et leurs avoirs gelés. Enfin, les revenus pétroliers doivent être placés sous contrôle international, le temps que des institutions transparentes et démocratiques soient mises en place. Le peuple sud-soudanais mérite mieux que la misère et l’abandon. Il mérite que sa richesse lui profite enfin. Mais pour que cela arrive, il faut briser le silence, exiger des comptes, et mettre fin à l’impunité. Le pétrole du Soudan du Sud doit cesser d’être une malédiction. Il est temps que la communauté internationale assume ses responsabilités et agisse, avant qu’il ne soit trop tard.

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Mariama S. Kane.
Mis en ligne : 19/09/2025

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