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La blessure de Habib Diarra, opéré de l’aine après un entraînement avec Sunderland, est bien plus qu’un simple accident de parcours. Elle révèle une réalité cruelle : les clubs européens, en sursollicitant leurs joueurs africains, compromettent systématiquement la compétitivité des équipes nationales lors des grandes compétitions continentales.
Alors que le jeune milieu sénégalais, recruté pour 36 millions d’euros cet été, devait être l’un des atouts majeurs de la CAN 2025, son absence prolongée pose une question lancinante : jusqu’à quand les ambitions des clubs primeront-elles sur les rêves d’un continent ?
Chaque édition de la Coupe d’Afrique des Nations est marquée par le même scénario : des joueurs clés, épuisés ou blessés, peinent à briller, voire manquent totalement la compétition. Les clubs européens, qui emploient la majorité des stars africaines, imposent des calendriers infernaux, des entraînements intensifs et une pression constante, sans égard pour les enjeux continentaux. La CAN 2025, prévue au Maroc, ne fera probablement pas exception. Pourtant, cette compétition représente bien plus qu’un simple tournoi : elle est un symbole de fierté, d’unité et d’espoir pour des millions de supporters africains.
La blessure de Diarra n’est pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans une tendance inquiétante où les joueurs africains, souvent recrutés pour leur explosivité et leur résistance, sont poussés à bout par des clubs qui les considèrent comme des pions interchangeables. Le communiqué de Sunderland, annonçant une indisponibilité de plus de deux mois, sonne comme un avertissement : la CAN 2025 pourrait se jouer sans certains de ses talents les plus prometteurs.
Comment expliquer qu’un joueur de 21 ans, en pleine forme en début de saison, se blesse gravement à l’entraînement ? La réponse réside dans une gestion défaillante des charges de travail et un mépris affiché pour les échéances africaines.
Les clubs, obsédés par leurs objectifs sportifs et financiers, refusent souvent de libérer leurs joueurs à temps pour les préparations, ou les renvoient épuisés après des matchs éreintants. Pire, ils minimisent les risques de blessures, comme si la santé des athlètes n’était qu’une variable ajustable. Pourtant, les conséquences sont lourdes : des équipes nationales privées de leurs leaders, des compétitions appauvries, et des supporters africains une fois de plus lésés.
Premièrement, la blessure de Diarra illustre un problème structurel. Les joueurs africains évoluant en Europe arrivent régulièrement en CAN avec un retard de préparation, voire des blessures mal soignées. En 2021, Sadio Mané avait joué la CAN avec une blessure au talon, aggravée par son club, Liverpool. En 2023, c’est au tour de Mohamed Salah d’être limité physiquement, après une saison éprouvante avec les Reds. Ces exemples montrent que les clubs, malgré leurs ressources colossales, échouent à protéger leurs joueurs quand il s’agit de servir les intérêts du continent africain.
Deuxièmement, Sunderland aurait pu et dû mieux gérer la charge d’entraînement de Diarra. Un joueur aussi précieux, surtout pour une sélection comme le Sénégal, mérite un suivi personnalisé. Pourtant, les protocoles de prévention semblent souvent bafoués, comme si les clubs estimaient que leur calendrier prime sur tout le reste. Cette négligence n’est pas seulement irresponsable ; elle est aussi profondément injuste.
La CAN 2025 s’annonce déjà comme une compétition à risques. Combien de joueurs, comme Diarra, seront absents ou diminués en décembre ? Combien de talents verront leur rêve brisé par l’imprévoyance de leurs employeurs ? Les fédérations africaines, malgré leurs efforts, restent impuissantes face à la toute-puissance des clubs européens. Sans une coopération renforcée, la CAN continuera d’être une compétition de seconde zone, où les meilleures équipes joueront avec des effectifs amputés.
Cette situation rappelle celle vécue par d’autres nations. En 2019, l’Algérie avait dû composer sans Riyad Mahrez, blessé en club à quelques semaines de la CAN. En 2022, le Cameroun a vu plusieurs de ses cadres, comme André Onana, arriver en compétition dans un état physique préoccupant. À chaque fois, ce sont les mêmes causes qui produisent les mêmes effets : des clubs qui refusent de lâcher prise, des joueurs sacrifiés sur l’autel de la performance immédiate, et des sélections africaines condamnées à improviser.
Les instances africaines doivent exiger des garanties : limitation des charges de travail avant les compétitions, libération obligatoire des joueurs deux semaines avant le début du tournoi, et sanctions financières pour les clubs qui ne respectent pas ces règles. Les fédérations européennes, de leur côté, doivent cesser de traiter la CAN comme une parenthèse ennuyeuse dans leur saison. Le football africain mérite mieux que des miettes.
La blessure de Habib Diarra doit servir de déclic. Si rien ne change, la CAN 2025 ne sera qu’une nouvelle occasion manquée, une compétition où l’Afrique brillera malgré ses clubs, et non grâce à eux. Il faut rappeler une évidence : les joueurs africains ne sont pas des machines. Ils sont le cœur battant d’un football qui, trop souvent, oublie de les protéger.
La CAN 2025 ne doit pas devenir la victime collatérale de l’égoïsme des clubs européens. La blessure de Diarra est un symbole, celui d’un système qui exploite les talents africains sans rien leur offrir en retour. Pour que la compétition retrouve tout son éclat, il faut qu’il se passe quelques choses maintenant. Sinon, l’Afrique continuera de payer le prix fort, tandis que l’Europe comptera ses profits.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Samba Diouf.
Mis en ligne : 28/09/2025
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