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La récente décision de justice sénégalaise confirmant Aminata Mbengue Ndiaye dans ses fonctions de secrétaire générale par intérim du Parti socialiste (PS) a relancé le débat sur la longévité des dirigeants politiques. Alors que des militants contestaient la légitimité d’une direction en place depuis 2019 et réclamaient un congrès, la justice a validé le statu quo, repoussant toute remise en cause à décembre 2025. Ce cas n’est qu’un exemple parmi d’autres d’un phénomène universel : l’incapacité des politiciens à quitter le pouvoir, même à un âge avancé ou en dépit d’une incapacité physique évidente.
Pourquoi cette obstination ? Qu’est-ce qui pousse ces figures à s’accrocher, parfois jusqu’à l’absurde, à des responsabilités qu’ils ne peuvent plus pleinement assumer ?
Le Sénégal n’est pas une exception. En Malaisie, Mahathir Mohamad, né en 1925, a repris les rênes du gouvernement en 2018 après une première carrière de 22 ans comme Premier ministre. Aux États-Unis, Joe Biden (81 ans) et Donald Trump (77 ans) se disputent la présidence, suscitant des interrogations sur leur capacité à gouverner. En Algérie, en Tunisie, en France, en Italie, la liste est longue des dirigeants octogénaires ou septuagénaires refusant de passer la main. Ces exemples illustrent une tendance lourde : la politique semble devenue le dernier bastion où l’âge n’est pas une limite, mais un atout, voire une arme.
Plusieurs facteurs expliquent cette longévité politique. D’abord, le pouvoir est une drogue. Comme le souligne une analyse sur Quora, dans l’arène politique, « l’expérience et la sagesse semblent triompher du temps ». Les cheveux grisonnants ne symbolisent pas un déclin, mais une force indomptable, une connaissance que les jeunes ne peuvent égaler du moins en apparence. Ensuite, les mécanismes de la démocratie représentative favorisent souvent les insiders, ceux qui maîtrisent les rouages des partis et des institutions, au détriment des outsiders. La « loi d’airain de l’oligarchie », théorisée par Robert Michels, montre comment les élites politiques se perpétuent, créant une séparation croissante entre gouvernants et gouvernés.
Les privilèges matériels jouent aussi un rôle : pensions avantageuses, immunités, réseaux d’influence. En France, les parlementaires peuvent liquider leur retraite après 65 ans, avec des pensions souvent supérieures à la moyenne nationale. Pourquoi renoncer à de tels avantages ?
Cette longévité pose plusieurs problèmes. D’abord, elle fausse la représentativité. Comment des dirigeants âgés peuvent-ils comprendre les aspirations des jeunes générations ? Ensuite, elle étouffe le renouvellement des idées. Les partis sclérosés, comme le PS sénégalais, voient leurs militants se décourager, leurs bases se réduire. Enfin, elle affaiblit la démocratie. Comme le note Pierre Rosanvallon, le « désenchantement démocratique » grandit lorsque les citoyens ont l’impression que le pouvoir est confisqué par une élite vieillissante, déconnectée des réalités sociales.
Dans le sport, les champions savent généralement partir au sommet. Cristiano Ronaldo, LeBron James, ou Lewis Hamilton, bien que quadragénaires, restent des exceptions. La plupart acceptent de passer la main, laissant la place à de nouveaux talents. En politique, c’est l’inverse : plus on vieillit, plus on s’accroche. Pourquoi ? Parce que, contrairement au sport, il n’y a pas de score, pas de performance mesurable qui imposerait une retraite forcée. Le pouvoir se négocie, se conserve, se protège.
La crise du PS sénégalais est un symptôme d’un mal plus profond : la peur du vide, le refus de l’alternance, la conviction que personne ne peut mieux faire. Pourtant, la démocratie a besoin de sang neuf, de débats renouvelés, de leaders qui osent partir avant d’être poussés vers la sortie. Les citoyens, eux, aspirent à autre chose qu’à des figures usées par le temps. Il est temps que les politiciens comprennent que leur plus grand service à la démocratie serait parfois… de savoir disparaître.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Talla Ndiaye.
Mis en ligne : 01/10/2025
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