Sanctionner ne répare pas l’échec : L’AIBD, symbole d’un système défaillant - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Politique | Par Eva | Publié le 02/10/2025 11:10:45

Sanctionner ne répare pas l’échec : L’AIBD, symbole d’un système défaillant

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Le ministère de l’Intérieur a récemment annoncé la suspension des chefs de la Division des Investigations criminelles et du Commissariat spécial de l’aéroport international Blaise Diagne, après la fuite spectaculaire de Madiambal Diagne, pourtant sous mesure d’opposition à la sortie du territoire. Si cette décision est justifiée et nécessaire, elle ne doit pas masquer l’ampleur des dysfonctionnements systémiques qui ont permis un tel échec.

En saluant la fermeté du ministre, il est urgent de s’interroger : comment un individu sous surveillance a-t-il pu quitter le Sénégal sans être intercepté ? Et surtout, quelles sont les failles profondes qui minent la crédibilité des institutions sécuritaires ?

Madiambal Diagne, visé par une interdiction de quitter le territoire, a pourtant réussi à embarquer pour la France dans la nuit du 23 au 24 septembre 2025, déclenchant une crise de confiance dans les mécanismes de contrôle aux frontières. Le ministre de l’Intérieur, Me Bamba Cissé, a réagi en relevant de leurs fonctions les responsables concernés, tout en ouvrant une enquête interne. Un mandat d’arrêt international a depuis été émis, mais la question reste entière : pourquoi les instructions de « vigilance accrue » n’ont-elles pas été appliquées ?

La suspension des deux hauts responsables est une réaction logique et attendue. Elle envoie un signal fort : la négligence ou l’incompétence ne seront pas tolérées. Pourtant, cette mesure ne suffit pas. Elle révèle au grand jour les lacunes d’un système où les consignes ne sont pas suivies, où les contrôles aux frontières manquent de rigueur, et où la coordination entre services laisse à désirer.

En Afrique de l’Ouest, les failles de la sécurité aéroportuaire ne sont pas une exception. Plusieurs pays de la région, confrontés à des défis similaires, ont dû recourir à des opérateurs privés pour renforcer leurs dispositifs, tant les infrastructures et les protocoles publics sont défaillants. Au Sénégal, l’aéroport Blaise Diagne, vitrine du pays, devrait être un rempart infranchissable pour les personnes sous mandat. Or, des exemples récents montrent que les fuites de personnes recherchées ne sont pas rares, souvent en raison d’un manque de moyens, de formation, ou de technologies adaptées.

Dans les aéroports européens, les passagers sous interdiction de quitter le territoire sont systématiquement interceptés grâce à des systèmes informatisés et une coordination étroite entre police, douanes et justice. Au Sénégal, ces mécanismes semblent défaillants. Pourquoi M. Diagne n’a-t-il pas été identifié avant même d’approcher la porte d’embarquement ?

Le ministère évoque une « vigilance accrue », mais comment expliquer qu’un individu sous surveillance ait pu passer entre les mailles du filet ? Les procédures d’alerte et de vérification en temps réel sont-elles vraiment opérationnelles ?

La suspension de deux agents ne doit pas servir d’alibi. Il faut une enquête indépendante, pas seulement interne, pour identifier toutes les responsabilités et éviter que cet incident ne se reproduise.

En Europe, les aéroports sont équipés de bases de données interconnectées, de scanners biométriques et de protocoles stricts pour les personnes sous mandat. En Afrique de l’Ouest, malgré les recommandations de l’aviation civile internationale, beaucoup d’aéroports peinent à mettre en place ces standards, souvent par manque de moyens ou de volonté politique. Le Sénégal, qui ambitionne d’être une plaque tournante régionale, ne peut se permettre de tels manquements.

Le ministre a eu raison de sanctionner. Mais pour rétablir la crédibilité des institutions, il faut aller plus loin : moderniser les infrastructures, former les agents, et instaurer des audits réguliers. La fuite de Madiambal Diagne n’est pas qu’un échec individuel, c’est le symptôme d’un système qui doit être repensé de fond en comble. Sans cela, chaque communiqué de presse ne sera qu’un pansement sur une jambe de bois.

Le Sénégal mérite mieux qu’une sécurité à deux vitesses. Il est temps d’agir, avant qu’un nouveau scandale ne vienne rappeler l’urgence de la réforme.

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Diarra Bousso.
Mis en ligne : 02/10/2025

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