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Lors d’un récent passage dans l’émission, Alioune Tine, fondateur d’Afrikajom Center, a tiré la sonnette d’alarme : le silence entre Macky Sall et son successeur, Bassirou Diomaye Faye, nourrit un climat de méfiance et d’incompréhension, inutile et dangereux pour le Sénégal. « Il y a un problème de communication entre Macky Sall et l’actuel président. C’est ce silence entre les deux qui engendre des détails et des tensions. Ils doivent pouvoir se parler, ne serait-ce qu’au téléphone », a-t-il insisté.
Pour ce militant des droits humains, le pays traverse une double crise, économique et démocratique, qui exige responsabilité et concertation. Il appelle aussi Diomaye Faye à ouvrir un cadre d’échanges avec les leaders de l’opposition, estimant que « leur apport peut être précieux dans la conduite de l’État ».
Le dialogue, s’il est sincère et structuré, est la seule voie pour sortir le Sénégal de l’impasse. Mais attention à ne pas tomber dans le piège des annonces creuses ou des rencontres médiatisées sans lendemains.
Le Sénégal a déjà connu des tensions similaires entre Abdoulaye Wade et Macky Sall, avant qu’une médiation religieuse ne rétablisse la confiance et ne les conduise même à s’allier pour une élection. Aujourd’hui, le pays fait face à une crise économique persistante et à des fractures politiques profondes, aggravées par des années de polarisation. La transition entre Macky Sall et Diomaye Faye, bien que pacifique, s’est faite dans un contexte de défiance, marqué par des arrestations politiques et des suspicions de manipulation institutionnelle.
Diomaye Faye, élu sur la promesse d’une rupture et d’une refondation démocratique, a lancé en mai 2025 un « dialogue national » pour réformer le système politique et apaiser les tensions. « Ces concertations nous offrent une opportunité unique de réfléchir avec sérénité et lucidité sur l’avenir de notre système politique », a-t-il déclaré, insistant sur la nécessité de poser « les fondements d’un apaisement définitif ». Mais pour que ce dialogue porte ses fruits, il doit être plus qu’un exercice de communication : il doit être un engagement concret envers la réconciliation et la réforme.
Alioune Tine a raison de souligner que le silence entre anciens et nouveaux dirigeants est source de tensions. L’histoire récente du Sénégal montre que les médiations, notamment celles menées par les khalifes des confréries, ont souvent permis de désamorcer des crises majeures. Le khalife général des mourides, par exemple, a joué un rôle clé dans la réconciliation entre Wade et Sall, et continue d’être un acteur incontournable de la stabilité politique. Son influence morale et spirituelle en fait un médiateur crédible, capable de rassembler au-delà des clivages partisans.
Cependant, le dialogue ne peut se limiter à des rencontres symboliques. Pour être efficace, il doit :
Impliquer non seulement les anciens présidents et l’opposition, mais aussi la société civile, les jeunes et les femmes, souvent exclus des grands débats nationaux. Définir des objectifs précis (réforme électorale, statut de l’opposition, gestion des ressources naturelles, etc.) et un calendrier réaliste. Les conclusions doivent être rendues publiques et suivies d’actions concrètes, sous peine de nourrir le scepticisme des citoyens.
Diomaye Faye a montré une volonté de rupture avec les pratiques du passé en organisant ce dialogue national, mais son succès dépendra de sa capacité à transformer les paroles en actes. « Dans cette dynamique, le gouvernement appliquera la plénitude de sa mission, l’opposition en sera respectée », a-t-il promis. Reste à voir si cette promesse sera tenue, surtout face à une opposition encore méfiante et à un ancien président dont l’ombre plane toujours sur la scène politique.
Sans communication entre Macky Sall et Diomaye Faye, chaque décision du nouveau gouvernement risque d’être interprétée comme une provocation ou une vengeance. Un dialogue régulier permettrait d’éviter les malentendus et de clarifier les attentes de part et d’autre.
La stabilité politique est un gage de confiance pour les investisseurs et les bailleurs de fonds. Un Sénégal uni et apaisé est un Sénégal plus attractif sur la scène africaine et mondiale.
Macky Sall, comme avant lui Wade, dispose d’une expertise précieuse en matière de gouvernance et de relations internationales. Son concours pourrait aider Diomaye Faye à naviguer dans un contexte régional et international complexe, marqué par des défis sécuritaires et économiques sans précédent.
Le Sénégal a toujours été cité comme un modèle de démocratie en Afrique de l’Ouest. En réussissant une transition apaisée et un dialogue constructif entre anciens et nouveaux dirigeants, il pourrait inspirer d’autres pays du continent, où les alternances sont souvent synonymes de crises.
Les Sénégalais aspirent à la paix et au développement. Ils ont massivement soutenu Diomaye Faye pour son projet de rupture, mais aussi pour sa promesse de réconciliation. Un dialogue sincère est le meilleur moyen de concrétiser cette attente et de restaurer la confiance dans les institutions.
En Afrique du Sud, la Commission vérité et réconciliation a permis de tourner la page de l’apartheid en offrant un espace de parole aux victimes et aux bourreaux. Au Ghana, les transitions politiques se font depuis des décennies dans le calme, grâce à une culture du dialogue et du respect des règles démocratiques. Ces exemples montrent que le dialogue n’est pas un signe de faiblesse, mais une preuve de maturité politique.
À l’inverse, dans des pays comme la RDC ou le Tchad, les dialogues politiques ont souvent servi de paravent à des manœuvres de maintien au pouvoir, sans résoudre les crises de fond. Le Sénégal doit éviter ce piège en veillant à ce que son dialogue national ne soit pas détourné à des fins partisanes.
Le Sénégal est à un carrefour. Il peut choisir la voie de la division et des tensions stériles, ou celle du dialogue et de la construction collective. Diomaye Faye a fait le premier pas en lançant le dialogue national. À lui maintenant de prouver que cette initiative n’est pas qu’un coup de communication, mais bien le début d’une nouvelle ère de gouvernance participative et transparente.
Comme le rappelle Alioune Tine, « le gouvernement a besoin de paix ». Cette paix ne viendra pas des discours, mais d’actions concrètes : réformes audacieuses, inclusion réelle de l’opposition, et collaboration avec les figures d’expérience comme Macky Sall ou les guides religieux. Le Sénégal a les atouts pour réussir. À ses dirigeants de les mobiliser, avec sincérité et détermination.
Le dialogue n’est pas une option, c’est une nécessité. Mais pour qu’il porte ses fruits, il doit être sincère, structuré et tourné vers l’avenir. Le Sénégal le mérite. Ses citoyens le méritent.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Gora Diallo.
Mis en ligne : 10/10/2025
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