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L’alerte médicale autour de Farba Ngom soulève des questions graves sur l’inadéquation des soins en prison au Sénégal. Malgré des diagnostics alarmants et des évacuations d’urgence répétées, le maire des Agnam reste maintenu dans un environnement carcéral incompatible avec son état de santé, comme le confirment plusieurs expertises médicales et les déclarations de son avocat, Me Baboucar Cissé. Cette situation, loin d’être isolée, révèle un scandale sanitaire et humanitaire inacceptable, où le droit à la santé des détenus est systématiquement bafoué.
Farba Ngom, incarcéré depuis février 2025 dans le cadre d’une affaire judiciaire complexe, souffre d’un syndrome d’apnée obstructive du sommeil sévère, d’une cardiopathie débutante, de diabète et d’obésité, selon les conclusions de trois professeurs en médecine mandatés par le Pool judiciaire financier. Ces experts ont clairement indiqué que son maintien en détention, notamment au pavillon spécial de Dakar, représente un risque vital immédiat. Pourtant, malgré ces alertes, les demandes de liberté provisoire pour raisons médicales ont été rejetées à plusieurs reprises, et son transfert vers un centre hospitalier adéquat a été retardé, voire entravé.
Le pavillon spécial, censé offrir une prise en charge médicale adaptée, est en réalité un « désert sanitaire » depuis la fermeture de l’hôpital Aristide Le Dantec, comme l’a dénoncé Me Cissé. Les conditions y sont si précaires que des détenus comme Mabintou Diaby ont également dû être évacués en urgence dans des états critiques, illustrant un problème structurel qui dépasse le cas individuel de Farba Ngom.
Les arguments avancés par la justice pour maintenir Farba Ngom en détention, malgré les risques mortels, interrogent. La Chambre d’accusation financière a ordonné son transfert dans un centre hospitalier, mais sans garantir une libération ou des soins durables. Cette décision, bien que partielle, souligne l’absurdité d’un système qui reconnaît l’urgence médicale tout en refusant d’agir en conséquence.
Plus largement, cette affaire met en lumière plusieurs dysfonctionnements :
L’absence de protocoles clairs pour la prise en charge des détenus malades, malgré les recommandations internationales et les engagements du Sénégal en matière de droits humains. La surpopulation carcérale et l’insalubrité des prisons sénégalaises, dénoncées par l’ONU et les ONG, qui aggravent les risques sanitaires pour tous les détenus. L’arbitraire judiciaire des expertises médicales alarmantes sont ignorées au profit de considérations procédurales, comme le montre le refus répété de liberté provisoire, y compris après des contre-expertises confirmant l’incompatibilité de son état avec la détention.
Le Sénégal, signataire de conventions internationales, a l’obligation de garantir des soins dignes à tous ses citoyens, y compris en prison. Le maintien de Farba Ngom dans un environnement dépourvu de soins adaptés constitue une violation flagrante de ce droit.
En normalisant le déni de soins aux détenus, les autorités sénégalaises créent un précédent qui menace tous les prisonniers malades. Des cas similaires, comme celui de Mame Bintou Diagne, montrent que cette pratique n’est pas exceptionnelle, mais systémique.
Le bracelet électronique, validé comme alternative à la prison, n’est que rarement utilisé, préférant la détention à tout prix, même au mépris de la vie humaine.
Dans des pays comme la Côte d’Ivoire, des protocoles stricts encadrent désormais l’évacuation et la prise en charge des détenus malades, avec une formation renforcée des agents pénitentiaires et sanitaires. Au Sénégal, ces mesures brillent par leur absence.
Les rapports de l’OMS et des ONG soulignent depuis des années la nécessité de désengorger les prisons et d’améliorer les conditions sanitaires. Pourtant, les promesses restent lettres mortes, et les détenus continuent de payer le prix de cette inertie.
L’affaire Farba Ngom n’est pas seulement une question judiciaire, mais un test pour la démocratie sénégalaise. Peut-on accepter qu’un homme risque de mourir en prison, alors que des solutions existent ? La réponse à cette question engage la responsabilité de l’État, de la justice, mais aussi de la société civile.
Il est temps de cesser de considérer les détenus comme des citoyens de seconde zone. Le respect des droits fondamentaux, y compris le droit à la santé, ne saurait être conditionné par une procédure judiciaire. La libération de Farba Ngom pour raisons médicales serait un premier pas vers la reconnaissance de cette évidence : la dignité humaine ne s’arrête pas aux portes des prisons.
La balle est désormais dans le camp des autorités. Agiront-elles avant qu’il ne soit trop tard ?.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : François Sarr.
Mis en ligne : 21/12/2025
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