Le marché s’empoisonne : Insécurité alimentaire au Sénégal - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Santé | Par Eva | Publié le 18/07/2025 08:07:00

Le marché s’empoisonne : Insécurité alimentaire au Sénégal

Ce lundi 14 juillet 2025, l’État du Sénégal a procédé à l’incinération de 377 tonnes de produits impropres à la consommation à la décharge de Gandigal, dans le département de Mbour. Supervisée par le préfet Amadou Diop, cette destruction, d’une valeur estimée à 550 millions de francs CFA, s’inscrit, selon les autorités, dans le cadre de la lutte contre l’insécurité alimentaire.

Si cette opération peut sembler rassurante à première vue, elle révèle en réalité des failles inquiétantes dans notre système de contrôle, de gouvernance économique et de régulation du commerce.

La mise au rebut de centaines de tonnes de produits, dont du lait, de la tomate et autres denrées couramment consommées, montre à quel point le marché sénégalais reste vulnérable face à l’infiltration de marchandises dangereuses. Le fait que 327 tonnes proviennent de la région de Dakar, épicentre de l’activité économique, pose une question alarmante : comment ces produits ont-ils pu échapper si longtemps aux filets du contrôle pour se retrouver dans les étals, menaçant la santé de millions de citoyens ?

Plutôt que de se féliciter d’une telle opération, il faut s’interroger sur les causes de cette contamination du marché. La prolifération des produits périmés ou contrefaits n’est pas le fruit du hasard : elle s’explique par des mécanismes bien connus dans notre pays, la corruption endémique, le manque de moyens des services de contrôle, la porosité des frontières, et l’impunité persistante de certains commerçants bien introduits dans les circuits politiques.

Le préfet appelle à la sensibilisation des commerçants et à la vigilance des citoyens. Soit. Mais à quoi bon exhorter les consommateurs à vérifier les dates de péremption quand la majorité achète au jour le jour dans des marchés informels où les règles d’étiquetage ne sont ni respectées ni contrôlées ? Peut-on sérieusement imputer la responsabilité au petit détaillant ou au consommateur moyen quand l’État échoue à bâtir une infrastructure de contrôle alimentaire robuste et intègre ?

À titre de comparaison, des pays comme le Rwanda ou le Ghana ont réussi à assainir en grande partie leur marché intérieur grâce à des systèmes de traçabilité numérique, des contrôles inopinés efficaces et une justice rapide contre les contrevenants. Pourquoi le Sénégal reste-t-il en retard sur ces questions vitales ? Parce que les réformes structurelles, pourtant nécessaires, sont trop souvent sacrifiées sur l’autel de la politique à court terme.

Incinérer ce n’est pas réformer, c’est réagir après coup. On ne soigne pas une maladie en brûlant ses symptômes. Pour faire face durablement à cette insécurité alimentaire au Sénégal, il faut refondre en profondeur les services du ministère du Commerce, renforcer l’indépendance des organes de contrôle, introduire des technologies de surveillance sur toute la chaîne logistique et assainir les circuits d’importation. Il faut aussi en finir avec l’impunité : derrière chaque cargaison de produits périmés se cachent des complicités, des omissions volontaires et des intérêts financiers bien protégés. Tant que ces mécanismes ne sont pas démantelés, l’insécurité alimentaire restera une menace persistante au Sénégal.

Face à l’insécurité alimentaire au Sénégal, l’État ne peut plus se contenter d’opérations médiatiques ponctuelles. Il faut s’attaquer en profondeur aux causes structurelles du problème. La population ne mérite pas un commerce toxique, où prolifèrent impunément produits périmés et denrées contrefaites. Elle mérite une véritable politique de santé publique, digne, durable et résolument orientée vers la prévention. Assez d’incinérations mises en scène. Ce qu’il faut, ce sont des institutions fortes, intègres et capables de garantir la sécurité alimentaire de tous.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Fodé Ndiaye
Mis en ligne : 14/07/2025

La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.


Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

1 commentaires
Farmata
sénégalais khamoul qualité mais quantité
Le 2025-07-18 16:39:40

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

1 commentaires
Farmata
sénégalais khamoul qualité mais quantité
Le 2025-07-18 16:39:40

Copyright © 2023 www.notrecontinent.com

To Top