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La victoire de Siteu face à Balla Gaye 2 aurait dû marquer un moment de gloire et de consécration pour un lutteur ayant consacré des années à son art. Pourtant, au lendemain de son sacre comme Empereur, son manager, Max Mbargane, s’est vu contraint de réclamer ce qui devrait être naturel : un face-à-face digne de ce nom et les primes inhérentes au titre. La réponse du promoteur Baye Ndiaye, rapportée par le journal Record, est sans équivoque : aucune prime, aucun privilège, faute de sponsor.
Quant au face-à-face, il est reporté à une date indéterminée, le temps que Balla Gaye 2 retrouve la santé. Cette situation révèle une amère vérité : les organisateurs de la lutte sénégalaise manquent à leur devoir, échouant à garantir des conditions équitables à tous les lutteurs. En privant Siteu des honneurs accordés à ses prédécesseurs, ils bafouent non seulement le lutteur mais également l’esprit même du sport.
Le titre d’Empereur représente le summum de la lutte sénégalaise, symbole d’excellence et de domination dans l’arène. Traditionnellement, il est accompagné de cérémonies solennelles et de récompenses financières, reconnaissant le parcours exceptionnel du champion. Cependant, ces dernières années, la gestion des combats et des titres a souvent été marquée par l’improvisation. Les promoteurs, censés organiser ces événements et préserver leur prestige, se retrouvent régulièrement démunis face à l’absence de sponsors.
Peut-on accepter que cette absence serve de justification pour priver un champion de ce qui lui revient de droit ? La réponse est clairement non. Un titre aussi prestigieux ne peut dépendre des aléas du financement. Il doit être protégé par des règles strictes, garantissant à chaque Empereur les mêmes égards, quelles que soient les circonstances.
Dans d’autres disciplines, comme le football ou la boxe, les récompenses sont définies contractuellement. Les vainqueurs savent ce qu’ils toucheront et les organisateurs s’engagent à honorer ces engagements, quitte à mobiliser leurs propres ressources. Pourquoi la lutte sénégalaise, discipline emblématique du pays, ne bénéficierait-elle pas de la même rigueur ?
Le cas de Siteu illustre un système où les organisateurs agissent en opportunistes plutôt qu’en garants de l’équité. En annonçant qu’aucune prime ne sera versée faute de sponsor, Baye Ndiaye admet implicitement une faille majeure : aucun plan B n’existe. Or, le rôle des promoteurs ne se limite pas à trouver des financements. Ils doivent également assurer la pérennité et la crédibilité des titres qu’ils décernent. Refuser à Siteu les avantages dont avait bénéficié Balla Gaye 2 crée une inégalité choquante entre les champions. Comment justifier qu’un Empereur soit célébré avec faste, tandis qu’un autre se voit simplement remettre un trophée ?
Cette incohérence impacte directement la motivation des lutteurs. Pourquoi risquer sa santé et consacrer des années d’efforts si les récompenses sont aléatoires ? Les athlètes ont besoin de certitudes : savoir que leur victoire sera honorée, que leur titre aura une valeur concrète. Sans cela, la lutte perd de son attrait, et des talents pourraient se détourner vers d’autres disciplines mieux structurées.
La transparence dans la gestion des fonds est un autre point faible. Où sont passés les bénéfices des précédents combats ? Pourquoi les promoteurs ne prévoient-ils pas une réserve pour pallier l’absence ponctuelle de sponsors ? Ces questions restent sans réponse et nourrissent des soupçons de mauvaise gestion. Dans un pays où la lutte dépasse le simple sport pour devenir patrimoine culturel, une telle opacité est inacceptable.
L’équité est la base de tout sport. Imagine-t-on un vainqueur du Tour de France privé de son maillot jaune parce qu’un sponsor s’est désisté ? Bien sûr que non. Les promoteurs ont la responsabilité de garantir un traitement égal à tous les champions. Ne pas le faire discrédite la compétition et décourage les futurs talents.
De plus, la lutte sénégalaise mérite un cadre professionnel. Les organisateurs doivent anticiper, négocier des contrats solides et, si nécessaire, autofinancer les primes pour préserver l’intégrité du titre. Sinon, le terme « Empereur » devient une moquerie, un titre vidé de sens.
Enfin, le public est également lésé. Les fans investissent émotionnellement et financièrement dans ces combats. Le report d’un face-à-face, moment clé de la célébration du vainqueur, trahit leur confiance et dévalorise l’engagement des supporters.
Ailleurs, la constance est respectée. En boxe, les champions du monde reçoivent des bourses minimales, même en l’absence de sponsors majeurs. En athlétisme, les médaillés olympiques perçoivent des primes financées par les fédérations. Même au Sénégal, le football garantit des récompenses aux vainqueurs de la Coupe nationale, indépendamment des partenariats. Pourquoi la lutte, sport le plus populaire du pays, serait-elle en reste ?
La victoire de Siteu aurait dû être un exemple de fair-play et de professionnalisme. Elle symbolise, hélas, un système défaillant. Les promoteurs doivent comprendre que leur rôle dépasse l’organisation des combats : ils sont les gardiens d’une tradition et les garants de l’équité. Ils doivent établir des règles claires sur les récompenses, créer un fonds de réserve pour honorer les champions et rendre des comptes sur la gestion des fonds.
Siteu a remporté son titre. Il mérite d’être traité comme un Empereur, et non comme un champion de seconde zone. Et ce sont les organisateurs qui doivent faire en sorte que cela devienne la norme, et non l’exception.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Malick Cissé.
Mis en ligne : 27/08/2025
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