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L’audition de Mansour Faye devant la Haute cour de justice, le 15 septembre 2025, pour une prétendue surfacturation de riz destiné aux ménages vulnérables pendant la pandémie de Covid-19, a de quoi laisser perplexe. L’ancien ministre du Développement communautaire, de l’Équité sociale et territoriale, aujourd’hui maire de Saint-Louis, est accusé de tous les maux : association de malfaiteurs, concussion, corruption, détournement de deniers publics, blanchiment de capitaux, et bien d’autres chefs d’accusation aussi lourds qu’infondés.
Pourtant, à y regarder de plus près, ce dossier sent davantage le règlement de comptes politique que la quête de justice. Même les plus fervents défenseurs de la lutte contre la corruption ne peuvent que constater l’absence de preuves tangibles et la fragilité des arguments avancés contre lui.
L’affaire porte sur une commande de 30 000 tonnes de riz, dont la surfacturation présumée s’élèverait à 2,749 milliards de francs CFA. Mansour Faye, placé sous mandat de dépôt depuis le 26 mai 2025, clame son innocence et brandit des justificatifs solides : la procédure d’achat était conforme aux règles exceptionnelles instaurées durant la crise sanitaire, validée par l’ARMP (Autorité de Régulation des Marchés Publics) et le ministère du Commerce. Il rappelle que le prix du riz en 2020 était de 275 000 FCFA la tonne, et non 250 000 FCFA comme le prétend l’accusation, s’appuyant sur un arrêté de 2013 devenu caduc selon un décret de 1995. Aucun enrichissement personnel n’a été prouvé, et le rapport de la Cour des comptes lui-même ne le vise pas directement, mais plutôt son ancien directeur général, Aliou Sow.
Mansour Faye a été le seul ministre à lancer un appel d’offres pour cette commande, alors que l’urgence ne l’y obligeait pas. Les entreprises attributaires ont toutes proposé le même prix, sans favoritisme. Pourtant, il est aujourd’hui en prison, tandis que d’autres responsables, impliqués dans des affaires bien plus graves, circulent librement. La comparaison avec d’autres contextes africains est édifiante : en 2024, le prix du riz était fixé à 375 FCFA/kg par décret, soit une hausse bien plus brutale que celle qui lui est reprochée. Comment expliquer une telle sévérité, si ce n’est par une volonté de discréditer un proche de l’ancien régime ?
Les arguments de la défense sont accablants pour l’accusation : les contrats ont été approuvés par les institutions compétentes, et la Cour des comptes n’a jamais recommandé de poursuites à son encontre. Pourtant, la machine judiciaire s’est emballée, ignorant délibérément l’évolution économique globale et les dérogations exceptionnelles accordées pendant la pandémie.
L’acharnement contre Mansour Faye sert avant tout à masquer les faiblesses du nouveau pouvoir. En ciblant un ancien ministre emblématique, on détourne l’attention des vrais enjeux : la gestion des fonds publics, la transparence, et la lutte contre la corruption réelle, pas celle de façade. Le double standard est flagrant : aujourd’hui, le riz est vendu 350 FCFA/kg après une baisse récente, sans que personne ne parle de « surfacturation ». Pourquoi un tel deux poids, deux mesures ?
La réponse est politique. Mansour Faye, beau-frère de l’ex-président Macky Sall, incarne une cible idéale pour le nouveau régime, qui cherche à se légitimer en frappant fort, même sur des dossiers vides. Les réactions de la classe politique et de la société civile confirment cette lecture : beaucoup y voient un règlement de comptes, une justice aux ordres, plutôt qu’une véritable volonté de rendre des comptes.
En Afrique, les affaires de détournement de deniers publics sont légion. Pourtant, rares sont les cas où un responsable est incarcéré sans preuve d’enrichissement personnel ou de faute grave. Au Congo, au Niger, ou ailleurs, les détournements massifs de fonds publics restent souvent impunis, faute de volonté politique ou de moyens judiciaires. Au Sénégal, on assiste à une exception : un homme est jeté en prison pour des accusations contestables, tandis que d’autres, impliqués dans des scandales bien plus graves, bénéficient d’une clémence inexplicable.
L’affaire Mansour Faye révèle une justice sélective, une instrumentalisation de la lutte contre la corruption à des fins partisanes. Même ses détracteurs les plus acharnés peinent à trouver des éléments concrets à lui reprocher. En envoyant un homme en prison sur la base d’un dossier aussi fragile, on ne rend pas justice, on la discrédite.
La vraie question n’est pas de savoir si Mansour Faye est coupable ou innocent. Elle est de savoir pourquoi, dans un pays où la corruption est endémique, on s’acharne sur un homme dont le seul tort semble être d’avoir servi un régime aujourd’hui honni. La réponse est simple : parce que c’est plus facile que de s’attaquer aux vrais problèmes. Et ça, c’est une injustice que personne ne peut accepter.
La justice doit être indépendante, impartiale, et fondée sur des preuves. Dans le cas de Mansour Faye, elle est tout sauf cela. Il faut rendre à César ce qui est à César : ce dossier est vide, et l’homme est innocent. La vraie corruption, elle, court toujours.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Djily Gueye.
Mis en ligne : 20/09/2025
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