Une journaliste punie pour un tweet : ABC cède aux pressions israéliennes - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - International | Par Eva | Publié le 03/10/2025 01:10:00

Une journaliste punie pour un tweet : ABC cède aux pressions israéliennes

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Fin 2023, la chaîne publique australienne ABC licenciait la journaliste Antoinette Lattouf pour avoir partagé sur Twitter un rapport de Human Rights Watch accusant Israël d’utiliser la famine comme arme de guerre à Gaza. Pourtant, ce même rapport était publié sur le site de ABC. Officiellement, la direction invoquait une violation des consignes de « neutralité » sur les réseaux sociaux. Mais les révélations ultérieures sur les pressions exercées par des groupes pro-israéliens, ainsi que la condamnation d’ABC pour licenciement abusif, révèlent une tout autre réalité : la « neutralité » brandie comme un outil de censure, sous la menace des lobbies.

Cette affaire n’est pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans une tendance lourde : l’autocensure croissante des médias occidentaux sur le conflit israélo-palestinien, où la peur des poursuites et des accusations d’antisémitisme étouffe le débat public.

Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 et la riposte israélienne à Gaza, les médias et les universités du monde entier subissent des pressions sans précédent pour taire les critiques envers Israël. En Europe, des journalistes ont été licenciés pour avoir exprimé leur solidarité avec la Palestine, tandis qu’aux États-Unis, des universités ont réprimé dans la violence des manifestations pro-palestiniennes sous prétexte de lutter contre l’antisémitisme.

En Australie même, des groupes coordonnés ont menacé ABC de poursuites judiciaires, poussant la chaîne à sacrifier une journaliste expérimentée plutôt qu’à affronter le scandale. Ces pressions ne sont pas anodines : elles s’appuient sur un arsenal juridique et médiatique qui criminalise toute remise en cause de la politique israélienne. Les accusations d’antisémitisme, souvent instrumentalisées, servent à discréditer les voix dissonantes, même lorsque celles-ci ne font que relayer des rapports d’ONG ou des analyses juridiques internationalement reconnues.

Le résultat est une couverture médiatique biaisée, où les victimes palestiniennes sont souvent réduites à des chiffres, tandis que les exactions israéliennes bénéficient d’une présomption de légitimité.

Le cas d’Antoinette Lattouf est emblématique. ABC a cédé à une campagne orchestrée par des organisations pro-israéliennes, qui ont explicitement menacé de saisir la ministre des Communications et d’engager des poursuites. Pourtant, le rapport de Human Rights Watch qu’elle avait partagé était déjà diffusé par sa propre rédaction. Pourquoi un tweet devient-il soudain une faute grave ? La réponse est politique : ABC a préféré se soumettre aux pressions plutôt que de défendre l’indépendance de ses journalistes.

Cette capitulation n’est pas sans conséquence. En Australie, comme en Europe ou aux États-Unis, les médias publics sont censés incarner un contre-pouvoir, un espace de débat protégé des influences partisanes. Or, en licenciant Lattouf, ABC a envoyé un message clair : certains sujets sont tabous, et la ligne éditoriale se plie aux diktats des lobbies. Pire, la chaîne a validé l’idée que la « neutralité » justifie de museler les journalistes d’origine arabe ou musulmane, tandis que leurs collègues anglo-saxons bénéficient d’une marge de manœuvre bien plus large. Le tribunal australien a reconnu le licenciement abusif, mais a refusé de qualifier ce traitement de raciste, une omission qui en dit long sur les biais systémiques de l’institution.

Les médias occidentaux couvrent le conflit israélo-palestinien avec une partialité flagrante. La peur des représailles est omniprésente. Les exemples abondent : des universités menacées pour avoir commémoré la Nakba, des manifestations pro-palestiniennes interdites, des conférences annulées, et des intellectuels harcelés pour avoir critiqué Israël. Même l’ONU n’est pas épargnée : des États membres suspendent des accords commerciaux avec Israël sous la pression de l’opinion publique, mais ces gestes restent symboliques face à l’impunité dont bénéficie Tel-Aviv.

Depuis octobre 2023, plus de 145 journalistes ont été tués par l’armée israélienne à Gaza, un record absolu. Pourtant, aucune sanction internationale n’a été prise. Les médias, eux, préfèrent souvent se taire : Israël interdit l’accès de Gaza aux journalistes étrangers, et ceux qui osent couvrir la guerre risquent leur vie ou leur carrière.

L’affaire Antoinette Lattouf doit servir d’électrochoc. Les médias publics ne peuvent plus se cacher derrière la « neutralité » pour justifier leur soumission. Leur mission est de dire les faits, même lorsqu’ils dérangent. Face à la montée des pressions, deux voies s’offrent à eux : continuer à se taire et devenir les complices d’un système qui étouffe la vérité, ou résister et redevenir les garants d’un débat démocratique digne de ce nom.

La balle est dans le camp des rédactions. À ABC comme ailleurs, il faut choisir : servir l’information ou servir les lobbies. La crédibilité des médias en dépend. Et avec elle, la santé de nos démocraties. Les citoyens, les journalistes et les institutions doivent exiger la fin de cette censure déguisée, soutenir les lanceurs d’alerte, boycotter les médias complaisants et réclamer des comptes aux dirigeants qui sacrifient l’éthique sur l’autel du politiquement correct. Une presse muselée est une démocratie en danger.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Demba Sall.
Mis en ligne : 03/10/2025

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