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Depuis plusieurs soirs, les rues du Maroc s’embrasent. Des centaines de jeunes, rassemblés sous la bannière du collectif GenZ 212, manifestent pour réclamer des réformes urgentes dans la santé et l’éducation. Face à eux, un État qui répond par la répression : arrestations massives, violences policières, et un dialogue annoncé mais jamais concrétisé. Si les images de barricades enflammées et de heurts avec les forces de l’ordre choquent, elles ne sont que le reflet d’un malaise bien plus profond.
La radicalisation de cette jeunesse n’est pas un hasard, mais la conséquence directe de l’échec de l’État marocain à assurer ses missions sociales les plus élémentaires. En refusant d’écouter, en criminalisant une génération entière, les autorités transforment une colère légitime en crise nationale.
Les revendications de GenZ 212, santé, éducation, justice sociale, ne datent pas d’hier. Depuis des décennies, les Marocains subissent la dégradation des services publics. En 2025, le drame de l’hôpital d’Agadir, où huit femmes enceintes ont perdu la vie, a révélé au grand jour l’ampleur de la crise sanitaire. Dans l’éducation, malgré des réformes successives, les résultats restent désastreux : seulement 30 à 40 % des élèves maîtrisent les compétences de base, contre 80 à 90 % dans les pays comparables.
Pire, les budgets colossaux alloués à ces secteurs sont gaspillés en raison d’une gouvernance inefficace et corrompue. Les jeunes, diplômés mais sans emploi, n’ont plus confiance ni dans les partis politiques, ni dans les syndicats, ni dans les institutions. Leur choix de s’organiser sur Discord, en dehors de tout cadre traditionnel, en est la preuve éclatante.
Plutôt que de répondre aux revendications, le gouvernement a choisi la répression. Plus de 200 arrestations ont eu lieu en quelques jours, dont six mineurs poursuivis pour entrave à la circulation. À Oujda, un manifestant a été grièvement blessé par un véhicule des forces de l’ordre, alimentant une colère déjà à son comble. Les autorités parlent de dialogue, mais les actes contredisent les mots : les canaux de médiation sont fermés, les espaces de débat étouffés. Résultat ? Une jeunesse qui n’a plus rien à perdre et qui, faute d’être entendue, radicalise son discours et ses méthodes.
Cette stratégie n’est pas nouvelle. Au Maroc comme ailleurs en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la répression des mouvements sociaux a toujours eu le même effet : elle attise la révolte au lieu de l’éteindre. En 2011, les printemps arabes étaient portés par les mêmes revendications dignité, emploi, justice. Dix ans plus tard, ces espoirs restent lettre morte, et les jeunes, désillusionnés, se tournent vers des formes de contestation plus radicales. Au Sénégal, le mouvement « Y’en a marre » a montré comment une jeunesse abandonnée peut devenir une force incontrôlable. Au Burkina Faso, la « Lucha » a poussé à la chute d’un régime. Au Maroc, GenZ 212 s’inscrit dans cette lignée : une génération qui refuse le silence, même au prix de l’affrontement.
L’abandon des services publics : les hôpitaux marocains, sous-équipés et mal gérés, sont devenus des symboles de l’injustice sociale. Le drame d’Agadir n’est qu’un exemple parmi d’autres. Dans l’éducation, les réformes s’enchaînent sans jamais corriger les défaillances structurelles. Les jeunes ne manifestent pas par caprice, mais par nécessité.
La répression comme seule réponse : arrestations arbitraires, violences policières, poursuites judiciaires contre des mineurs… L’État marocain traite ses citoyens comme des ennemis, alors qu’il devrait les protéger. Cette politique ne fait qu’alimenter un cycle de violence et de méfiance.
L’échec des canaux traditionnels : les partis d’opposition, les syndicats, les médias officiels ont perdu toute crédibilité. Les jeunes se tournent vers les réseaux sociaux, non par choix, mais par défaut. GenZ 212 est né sur Discord parce que les espaces de dialogue institutionnels sont verrouillés.
La radicalisation de la jeunesse marocaine n’est pas une fatalité, mais le résultat d’années de négligence et de répression. Tant que l’État refusera d’écouter, tant qu’il préférera les matraques aux réformes, la crise s’aggravera. Le Maroc est à la croisée des chemins : soit il choisit enfin d’investir dans la santé, l’éducation et l’emploi, soit il court droit vers une explosion sociale aux conséquences imprévisibles.
Il faut cesser de criminaliser une génération et de lui offrir un avenir. Les jeunes de GenZ 212 ne demandent pas la lune : ils réclament simplement ce qui devrait être garanti à tout citoyen, des hôpitaux dignes, des écoles qui forment, un emploi qui permet de vivre. Refuser ces droits fondamentaux, c’est condamner le pays à l’instabilité. L’État marocain doit comprendre une chose : la répression ne résout rien. Seul un vrai dialogue, accompagné d’actions concrètes, peut rétablir la confiance et éviter le pire.
Aux autorités marocaines : arrêtez la répression, ouvrez le dialogue, et agissez. Aux citoyens : ne laissez pas étouffer cette voix. La dignité d’un pays se mesure à la façon dont il traite sa jeunesse. Aujourd’hui, le Maroc est en train d’échouer ce test.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Sofiane Z.
Mis en ligne : 05/10/2025
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