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La municipalité de Tivaouane a annoncé la fermeture temporaire du marché de Keur Matar du 9 au 19 octobre 2025, invoquant la nécessité de travaux de nettoyage et de remise en état. Cette décision, prise après un ultimatum des commerçants excédés par l’insalubrité et l’insécurité, se veut une réponse forte. Pourtant, en privant les commerçants de leur unique source de revenus pendant dix jours, sans leur proposer la moindre alternative, la mairie aggrave leur précarité et révèle une gestion publique défaillante.
Plutôt qu’une solution, cette fermeture s’apparente à une sanction collective, où les premières victimes de l’abandon des pouvoirs publics paient une nouvelle fois le prix de leur propre détresse.
Depuis des années, les commerçants de Keur Matar dénoncent l’état déplorable de leur lieu de travail : insalubrité, manque d’hygiène, insécurité. Leur délégué, Lamine Diémé, a menacé de suspendre le paiement des taxes municipales, faute de réponse. La mairie, plutôt que d’agir en amont, a attendu la crise pour réagir. Pourtant, des exemples existent ailleurs, où les marchés ont su concilier rénovation et maintien de l’activité commerciale grâce à des travaux progressifs et une planification rigoureuse. À Keur Matar, aucune concertation, aucune solution de repli : juste une fermeture brutale, synonyme de pertes sèches pour des centaines de familles.
La fermeture d’un marché, surtout dans un contexte économique déjà fragile, n’est jamais anodine. Les petits commerçants, souvent sans épargne, dépendent de leur revenu quotidien pour survivre. La fermeture, même temporaire, menace directement la sécurité alimentaire et économique des populations. Pourtant, la mairie de Tivaouane n’a prévu ni espaces temporaires, ni aides d’urgence pour atténuer l’impact. Pire, elle semble considérer les commerçants comme responsables de la situation, alors qu’ils en sont les premières victimes.
Dix jours sans activité signifient dix jours sans salaire pour des familles qui vivent souvent au jour le jour. Où est la solidarité ? D’autres villes confrontées à des rénovations de marchés ont su organiser des relocalisations temporaires ou des horaires décalés pour limiter les dégâts. À Tivaouane, rien de tout cela n’a été envisagé. Le dialogue est absent : aucune consultation des commerçants, aucune explication sur les travaux prévus, aucun calendrier précis. La décision a été imposée, comme si les commerçants n’avaient pas leur mot à dire. Par ailleurs, il est paradoxal d’exiger des commerçants qu’ils paient des taxes pour des services qu’ils ne reçoivent pas, puis de les priver de leur moyen de subsistance lorsqu’ils protestent.
Dans d’autres contextes, des solutions plus humaines ont été adoptées. À Dakar, la rénovation du marché Kermel a été menée sans fermeture totale, grâce à une organisation minutieuse et un dialogue constant avec les acteurs locaux. Aux Comores, après des fermetures brutales de commerces, le gouvernement a dû présenter des excuses et revoir sa copie, reconnaissant l’injustice de mesures prises sans accompagnement. À Tivaouane, la mairie persiste dans l’amateurisme, comme si la précarité des commerçants était un détail.
Fermer un marché sans alternative, c’est punir deux fois ceux qui subissent déjà l’insalubrité et l’insécurité. La mairie de Tivaouane avait l’opportunité de montrer qu’elle peut gérer une crise avec intelligence et humanité. Elle a choisi la facilité, au mépris des plus fragiles. Plutôt que de fermer les yeux jusqu’à l’explosion, puis de fermer les portes sans solution, les pouvoirs publics devraient enfin écouter, anticiper, et protéger ceux qui font vivre l’économie locale. Les commerçants de Keur Matar méritent mieux qu’un ultimatum en retour : ils méritent du respect, des réponses, et un vrai plan pour l’avenir.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Cheikh Tidiane.
Mis en ligne : 12/10/2025
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