Paul Biya, le dictateur éternel : Censure numérique au Cameroun - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Afrique | Par Maimouna | Publié le 02/11/2025 01:11:00

Paul Biya, le dictateur éternel : Censure numérique au Cameroun

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L’élection présidentielle camerounaise du 12 octobre 2025 a une fois de plus révélé les méthodes d’un régime déterminé à se perpétuer, coûte que coûte. Depuis jeudi, l’accès à Internet est fortement perturbé, une tactique désormais familière pour étouffer la contestation et masquer les irrégularités d’un scrutin dont les résultats, reportés au 27 octobre, sont déjà vivement disputés. Paul Biya, 92 ans, au pouvoir depuis 1982, incarne cette longévité politique africaine où la démocratie se réduit souvent à une façade.

Face à un opposant, Issa Tchiroma, qui revendique la victoire et appelle à des marches pacifiques, le pouvoir répond par la censure, le report des échéances et le rejet systématique des recours. Comment, élection après élection, le régime camerounais s’accroche au pouvoir par tous les moyens, en s’appuyant sur un historique de fraudes, de répression et de manipulation institutionnelle.

Paul Biya n’est pas un cas isolé en Afrique. Il s’inscrit dans la lignée des dirigeants « éternels », Sassou-Nguesso au Congo, Obiang Nguema en Guinée équatoriale, ou feu Idriss Déby au Tchad, qui ont transformé leurs pays en fief personnel, modifiant les constitutions, écrasant l’opposition et instrumentalisant les institutions pour prolonger leur règne. Au Cameroun, chaque élection depuis 1992 a été marquée par des accusations de fraude, des violences post-électorales et des résultats contestés. En 2011, Biya avait été réélu avec 78 % des voix, malgré des irrégularités massives et des manifestations réprimées dans le sang.

En 2018, la réélection pour un septième mandat s’était déroulée dans un climat de crise anglophone et de répression des opposants, dont Maurice Kamto, emprisonné pour avoir revendiqué sa victoire. Aujourd’hui, le scénario se répète : le Conseil constitutionnel rejette tous les recours, les résultats sont reportés, et Internet est coupé pour empêcher la diffusion d’informations critiques.

Les explications officielles, coupure d’un câble sous-marin, ne convainquent personne. Le Cameroun dispose de trois câbles opérationnels, et les perturbations touchent même les pays voisins. Ces coupures ne sont pas une première : en 2017, les régions anglophones avaient subi 97 jours sans Internet pour étouffer leur révolte. En 2025, c’est tout le pays qui est plongé dans le noir numérique, alors que des manifestations éclatent dans plusieurs villes.

Le régime de Biya a perfectionné l’art de la survie politique. D’abord, en divisant l’opposition : en 2018, plusieurs candidats s’étaient retirés pour soutenir Maurice Kamto, sans succès. Aujourd’hui, Issa Tchiroma, ancien ministre et figure du système, se présente comme l’alternative, mais son appel à la mobilisation pacifique se heurte à l’immobilisme d’un parti au pouvoir, le RDPC, qui exhorte simplement la population à « patienter ». Ensuite, en usant les citoyens : reports de résultats, procédures judiciaires interminables, et répression des voix dissidentes. Enfin, en contrôlant l’information : les coupures d’Internet en période électorale sont devenues une arme contre la transparence.

La comparaison avec d’autres régimes africains est édifiante. Denis Sassou-Nguesso, au Congo, a modifié la Constitution pour briguer un septième mandat en 2021, après avoir écrasé toute opposition. Idriss Déby, au Tchad, avait fait de même avant sa mort en 2021, laissant un pays exsangue et une dynastie familiale aux commandes. Ces dirigeants partagent une même recette : affaiblir les contre-pouvoirs, verrouiller les institutions, et utiliser la force pour mater toute contestation.

Depuis 1992, chaque élection a été entachée d’irrégularités, avec des bulletins pré-remplis, des bourrages d’urnes et des résultats contestés par l’opposition et la communauté internationale. Les coupures d’Internet, les arrestations d’opposants et la militarisation des régions contestataires (comme le Nord-Ouest et le Sud-Ouest) sont des outils récurrents pour museler la dissidence. Le Conseil constitutionnel, chargé de valider les résultats, a toujours rejeté les recours de l’opposition, confirmant son rôle de chambre d’enregistrement du pouvoir. Les conséquences sont lourdes : paralysie économique, exode des jeunes, et une jeunesse désabusée, privée de perspectives et de liberté d’expression.

Le Cameroun de Paul Biya est le symbole d’une Afrique où le pouvoir se maintient par la force, la ruse et la peur. Les élections ne sont plus qu’un théâtre, où le verdict est connu d’avance. Pourtant, la mobilisation citoyenne, malgré la répression, montre que le peuple camerounais refuse la résignation. Face à cette mascarade électorale, la communauté internationale ne peut plus se contenter de silences complices. Il est temps d’exiger des comptes : un audit indépendant des résultats, la fin des coupures d’Internet, et le respect des droits fondamentaux.

Le Cameroun mérite mieux qu’un dirigeant accroc au pouvoir. Il mérite une vraie alternance, une justice indépendante, et des institutions au service du peuple, et non d’un seul homme. La balle est désormais dans le camp des Camerounais et de ceux qui, en Afrique et dans le monde, refusent de cautionner cette dérive autoritaire. La démocratie ne se mendie pas, elle se conquiert. Le moment est venu d’agir.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Samuel F.
Mis en ligne : 02/11/2025

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