Face aux défis écologiques mondiaux, le bétail africain, bien géré, pourrait jouer un rôle essentiel. Mal considéré et peu soutenu, ce secteur mérite un repositionnement stratégique. Réduire les émissions de gaz tout en favorisant la biodiversité est possible ; encore faut-il lui accorder une réelle priorité.
Dans de nombreuses régions africaines, l’élevage représente bien plus qu’une activité économique : il est une question de survie.
Avec environ 400 millions de bovins, le secteur agricole africain repose sur ce pilier, qui contribue jusqu’à 40 % du produit intérieur brut agricole du continent. Cependant, les préjugés persistent, limitant les investissements nécessaires pour développer des pratiques durables. Cette stigmatisation freine des solutions environnementales efficaces.
En Occident, l’élevage est souvent perçu comme un facteur de dégradation écologique. Certes, le bétail émet des gaz à effet de serre et favorise parfois la déforestation. Mais réduire ce secteur complexe à ces aspects, c’est ignorer son potentiel pour la biodiversité et le climat en Afrique. En effet, des pratiques de pâturage bien planifiées transforment le bétail en acteur de la préservation des écosystèmes.
Au Kenya, les communautés pastorales démontrent comment le bétail, bien géré, soutient les écosystèmes locaux. Les Maasaï, par exemple, déplacent leurs troupeaux en rotation, permettant aux prairies de se régénérer. Cette pratique favorise la croissance de la végétation indigène et lutte contre le surpâturage, essentiel pour préserver les espèces locales. Ce modèle prouve que le bétail peut être intégré à la conservation, réduisant la pression sur les écosystèmes fragiles.
La question du méthane émis par les bovins suscite des critiques virulentes. Toutefois, en Afrique, des pratiques innovantes permettent de réduire ces émissions de manière significative. Intégrer des fourrages résistants à la sécheresse, par exemple, diminue les émissions tout en augmentant la productivité. En effet, ces végétaux améliorent la digestion des animaux, réduisant la production de méthane et augmentant la qualité nutritionnelle du bétail.
Les pâturages bien entretenus se révèlent être de puissants puits de carbone. Dans certaines régions, une bonne gestion des terres permettrait de séquestrer jusqu’à 20,92 gigatonnes de CO₂ d’ici 2050. Contrairement à la déforestation, le bétail bien géré stimule la fertilité des sols en y intégrant de la matière organique. Cette approche serait bénéfique non seulement pour le climat, mais aussi pour la production agricole locale.
Pour des milliers de familles africaines, le bétail n’est pas seulement une source de revenus : il représente la résilience face au changement climatique. En période de sécheresse, les éleveurs déplacent leurs troupeaux vers des zones plus fertiles, adaptant ainsi leur activité aux conditions climatiques. Cette mobilité permet d’éviter le surpâturage et garantit un accès aux ressources pour les familles.
L’utilisation de races locales adaptées aux conditions extrêmes, comme le zébu, renforce cette résilience. Par exemple, ces animaux survivent avec peu de ressources et s’acclimatent aux climats arides. Cela souligne l’importance de financer des solutions adaptées aux besoins locaux plutôt que d’importer des pratiques occidentales peu viables dans le contexte africain.
Aujourd’hui, le financement international de la lutte contre le changement climatique néglige souvent l’élevage africain. Pourtant, en investissant dans des pratiques durables, ce secteur pourrait devenir un levier pour répondre aux défis écologiques. En finançant la formation des éleveurs aux pratiques de pâturage durable, en promouvant des espèces locales et en facilitant l’accès à l’assurance pour le bétail, la communauté internationale pourrait soutenir un modèle d’élevage écologique et productif.
Le bétail africain peut être un acteur majeur de la lutte contre la dégradation des sols et la crise climatique, à condition qu’il soit géré de manière responsable et que le financement adéquat soit mobilisé. Abandonner les préjugés et promouvoir un modèle durable du secteur est essentiel.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Rahime Pipita
Mis en ligne : 02/11/2024
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