Abou Diallo, chroniqueur à la Sen TV, récemment condamné à trois mois de prison avec sursis pour diffusion de fausses nouvelles, a accepté de revenir sur son expérience carcérale après un bref séjour à la prison de Rebeuss. Dans un entretien rapporté par L’Observateur, il livre un témoignage poignant des conditions de détention, tout en dénonçant ce qu’il considère comme une tentative de museler sa liberté d’expression.
Le journaliste n’a pas manqué de souligner sa première satisfaction : avoir eu raison sur le régime. Dès le début de son emprisonnement, Abou Diallo affirme que son incarcération était déjà dans les tuyaux, et que de multiples tentatives ont été faites pour le faire taire, mais sans succès.
Il va même plus loin, estimant que l’objectif de la commande politique de Pastef était de le réduire au silence. « Aller en prison sous le règne de Ousmane Sonko, c’est comme recevoir un ordre national du mérite », a-t-il déclaré avec ironie.
Sur son passage à Rebeuss, Abou Diallo parle de « mission d’humanité », affirmant avoir cherché à comprendre les conditions de vie des détenus, leur situation difficile, ainsi que leurs doléances. Selon lui, cette expérience a été l’occasion d’une prise de conscience des injustices, mais aussi de l’isolement des prisonniers non liés à des causes politiques. Il a rapporté que de nombreux détenus se sentent abandonnés par ceux qui, selon eux, sont uniquement préoccupés par le sort des prisonniers politiques proches de Pastef, laissant les autres dans un état de totale indifférence.
Un des aspects les plus frappants de son récit est la dénonciation du surpeuplement dans les prisons sénégalaises. Abou Diallo évoque des conditions de détention de plus en plus difficiles, où l’augmentation des prix a également eu un impact direct sur la vie des détenus. « Il faut aller à Rebeuss pour mesurer l’ampleur de la haine qu’il y a entre Sénégalais », a-t-il ajouté, soulignant que le climat carcéral reflète une politique plus large de fracture sociale.
Il décrit des conditions inhumaines, telles que le partage d’une chambre avec plus de 175 personnes et l’accès limité à trois toilettes pour tous. Il dénonce également le manque de soins médicaux adaptés, citant des détenus souffrant de maladies graves, dont certains sont atteints de cécité ou ont perdu leurs facultés mentales. Abou Diallo appelle à une réforme urgente du système carcéral, insistant sur le manque d’humanité dans le traitement réservé aux détenus.
Sur la question de la justice, il n’hésite pas à critiquer la politisation du système judiciaire, qu’il considère comme un obstacle majeur à l’équité. Selon lui, les prisonniers ne jouissent d’aucun droit et il se sent particulièrement visé par cette dynamique, notamment à cause d’Ousmane Sonko. Abou Diallo révèle que des membres de la police de Pastef l’avaient averti de son arrestation avant même qu’elle ne survienne, ce qui, selon lui, prouve le caractère politique de sa détention.
Il conclut son témoignage en insistant sur la nécessité de séparer la politique de la justice. Abou Diallo, qui a choisi de contester publiquement le régime de Sonko depuis 2021, affirme avoir toujours su qu’il faisait partie des cibles du leader de Pastef, un choix qui, dit-il, n’a fait que confirmer sa détermination à défendre sa liberté d’expression.
Ainsi, pour Abou Diallo, l’incarcération à Rebeuss est plus qu’une épreuve personnelle, c’est une illustration de l’état de la justice et des prisons au Sénégal, et un appel à un changement profond des conditions de vie des détenus dans le pays.
Article écrit par : Amadou Diop
Mis en ligne : 30/01/2025
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