Le mouvement contestataire Y’en a marre, qui avait fait trembler le pouvoir en 2012, se refait entendre. Thiate, Aliou Sané, Fou Malade et leurs camarades ont enfilé le bleu de chauffe et ont organisé une conférence de presse ce mardi 18 mars pour dénoncer la proposition de loi interprétative de la loi d’amnistie, introduite par le Pastef.
Une initiative qu’ils jugent bien loin de la promesse d’une abrogation pure et simple de la loi, et qui suscite une grande colère parmi les membres du mouvement.
Leurs reproches sont clairs : le changement de cap de la mouvance présidentielle, qui semble vouloir maintenir cette loi dans le but de protéger ses militants d’une justice qu’ils jugent trop sévère. Si le Pastef persiste, Y’en a marre annonce un 23 juin bis, un nouveau soulèvement populaire.
« Il faut arrêter cette farce, qui ne relève ni du Jub, ni du Jubbal encore moins du Jubbanti », a lancé Thiate, en soulignant que « cette proposition de Pastef est pire que le quart bloquant de Wade à l’origine du 23 juin ». Pour le rappeur, il n’y a pas de compromis possible : « Nous nous lèverons contre cette loi et appelons les forces vives à en faire de même. Nous mettons les députés, pouvoir comme opposition, face à leurs responsabilités ».
La confusion est totale parmi les alliés de Pastef, notamment sur la position d’Ousmane Sonko et de son parti. Abdou Khafor Kandji, porte-parole du jour, rappelle les déclarations passées du Premier ministre, qui avait rejeté cette loi d’amnistie à sa sortie de prison. « Lors de sa conférence de presse, Ousmane Sonko avait déclaré qu’il n’était pas demandeur de cette loi. Les députés de Pastef avaient même voté contre, car la loi prenait en compte des crimes de sang », rappelle-t-il.
Pour Y’en a marre, « interpréter une loi pour laquelle on a voté contre relève de l’incohérence ». Le mouvement considère que cette loi ne nécessite pas d’interprétation, et qu’elle doit être abrogée immédiatement.
Une des questions principales soulevées par Y’en a marre est celle de l’immunité, et notamment celle de certains acteurs politiques qui pourraient être protégés par cette loi, bien que leurs actes restent pour l’heure flous. « Pourquoi couvrir d’immunité des acteurs qui sont pour le moment inconnus, simplement parce qu’ils auraient posé des actes politiques selon le Pastef ? », interroge Kandji.
Le mouvement insiste sur trois raisons pour lesquelles la loi d’amnistie doit être abrogée. D’abord, il souligne que les victimes de répression, qu’elles soient membres du Pastef ou non, sont des citoyens sénégalais, tués, torturés ou incarcérés dans le cadre d’un contexte politique. « Ces manifestations dépassent de loin le Pastef et tout autre parti politique », martèle Y’en a marre.
Ensuite, le mouvement rappelle que la justice doit pouvoir exercer son action sans entrave. Pastef, selon eux, cherche à circonscrire l’enquête judiciaire en imposant des limites à son champ d’action. Enfin, la question de la promesse présidentielle est cruciale : « Le président Diomaye nous avait promis qu’une fois au pouvoir, cette loi allait être abrogée. Il nous avait promis qu’il serait au-dessus de la mêlée », conclut Kandji.
Il est prévu que la proposition de loi interprétative, portée par le député du Pastef Amadou Ba, soit examinée en plénière le 2 avril prochain. Y’en a marre, quant à lui, poursuit sa mobilisation pour que la loi d’amnistie soit bel et bien abrogée, sans compromis.
Article écrit par : Sophie Diop
Mis en ligne : 18/03/2025
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