Le Kilimandjaro, cette majestueuse silhouette coiffée de neiges éternelles au cœur de la Tanzanie, reste l’un des symboles les plus puissants de l’Afrique. Il attire des milliers de randonneurs chaque année, séduits par la promesse d’une ascension mythique, d’un défi personnel, et d’un contact intime avec une nature presque sacrée.
Pourtant, derrière cette image de carte postale, se dessine une autre réalité, moins reluisante, que l’on continue trop souvent d’ignorer.
Le tourisme de masse, d’abord, a transformé l’expérience en une industrie où l’authenticité cède la place à la rentabilité. Les chemins sont balisés à l’extrême, les camps de base saturés, et les guides locaux, bien que souvent passionnés, sont parfois contraints de sacrifier leur propre sécurité pour satisfaire des clients mal préparés ou trop pressés. Les porteurs, souvent invisibles aux yeux des randonneurs, sont sous-payés, surchargés, et soumis à des conditions de travail qui frôlent l’exploitation. Ce système alimente une économie inégalitaire où seuls quelques intermédiaires s’enrichissent réellement.
Sur le plan environnemental, l’impact est tout aussi préoccupant. Les déchets s’accumulent en altitude, les sentiers sont érodés, la faune est perturbée. Le Kilimandjaro, bien qu’aire protégée, paie le prix d’une fréquentation incontrôlée. Pire encore, le changement climatique grignote lentement ses neiges emblématiques : le glacier Furtwängler, vestige d’un autre temps, recule d’année en année. À ce rythme, l’image du Kilimandjaro enneigé pourrait bien n’appartenir qu’aux archives photographiques d’ici quelques décennies.
Mais le plus inquiétant reste peut-être la manière dont les gouvernements locaux exploitent ce patrimoine naturel sans toujours le protéger. Le Kilimandjaro est devenu un produit touristique, une vitrine économique qu’on vante sans cesse, mais dont on néglige la fragilité. Les discours officiels insistent sur les retombées financières, mais peu sur les initiatives concrètes de préservation durable. Les populations voisines, qui devraient être les premières bénéficiaires de cette richesse naturelle, sont souvent les dernières à être consultées ou à en tirer un avantage réel.
Il est temps de repenser notre rapport au Kilimandjaro, non pas comme un simple défi sportif à cocher sur une liste de voyages exotiques, mais comme un patrimoine commun à respecter. Sa beauté ne devrait pas être une marchandise. Sa grandeur ne devrait pas masquer les injustices sociales ni les dérives écologiques qu’elle subit.
Le Kilimandjaro n’est pas seulement un sommet : c’est un appel. Un appel à l’humilité, à la responsabilité, et à l’engagement. Si nous ne voulons pas qu’il se transforme en simple mythe figé dans les récits du passé, il est urgent d’agir. Non pas demain. Aujourd’hui.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Aboubacar Ba.
Mis en ligne : 26/04/2025
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