Le récent coup de filet mené par la brigade territoriale de Popenguine, avec l’interpellation de soixante migrants issus de plusieurs pays ouest-africains, est présenté officiellement comme une victoire dans la lutte contre l’émigration irrégulière.
Le gouvernement sénégalais et les forces de l’ordre mettent en avant la démantèlement d’un réseau organisé et la protection des frontières. Pourtant, derrière cette communication sécuritaire, il est essentiel de questionner l’impact réel de telles opérations, tant sur les individus concernés que sur la société.
L’émigration irrégulière est un phénomène complexe, aux racines économiques, sociales et politiques profondes. Les jeunes migrants arrêtés à Popenguine ne sont pas de simples délinquants, mais souvent des personnes désespérées, poussées par la pauvreté, le manque d’opportunités, ou l’instabilité dans leurs pays d’origine. Dans ce contexte, une répression brutale ne fait qu’aggraver leur vulnérabilité, en les présentant comme des criminels plutôt que comme des victimes d’un système inégalitaire.
En effet, les témoignages recueillis auprès de migrants et d’experts en migration convergent pour dénoncer la stigmatisation renforcée par ces opérations. Pour ces jeunes, l’arrestation est souvent synonyme d’humiliation, d’emprisonnement dans des conditions difficiles, voire de violences. Or, les politiques publiques devraient viser à protéger leurs droits fondamentaux et à offrir des alternatives viables, plutôt qu’à les punir sans tenir compte des causes profondes.
Par ailleurs, ces opérations, bien qu’annoncées en grandes pompes, peinent à enrayer le phénomène. La criminalisation des migrants tend à masquer l’existence des véritables réseaux criminels internationaux, souvent peu inquiétés, tandis que les candidats à l’exil continuent de prendre des risques mortels, faute d’autres perspectives. Le recours à une approche essentiellement sécuritaire montre ses limites et alimente un cercle vicieux de clandestinité et de danger.
Comme en Europe ou en Amérique latine, des stratégies plus humanistes et intégrées ont permis d’apporter des réponses plus équilibrées. Par exemple, des programmes de développement local, des campagnes d’information réalistes, et des voies légales d’immigration réduisent sensiblement le recours à la migration irrégulière. En revanche, la stigmatisation des migrants comme des menaces à la sécurité est souvent liée à une montée des discriminations, voire à des violences xénophobes.
À Popenguine comme ailleurs, Les autorités et les acteurs sociaux doivent dépasser la logique répressive. Une vraie politique migratoire devrait s’appuyer sur la protection des droits humains, l’accompagnement social des populations vulnérables, et la coopération régionale pour lutter efficacement contre les trafics humains, sans faire porter la culpabilité aux seuls migrants.
Si la lutte contre l’émigration irrégulière est une nécessité, elle ne doit pas se faire au prix de la dignité humaine ni renforcer des préjugés dangereux. Il doit cesser de traiter les migrants comme des coupables et de commencer à comprendre et adresser les véritables causes de leurs départs. Donc les autorités sénégalaises doivent adopter une approche plus respectueuse des droits et à investir dans des solutions durables, plutôt que dans des opérations sécuritaires qui nourrissent la stigmatisation et l’exclusion.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Ibrahima Ba.
Mis en ligne : 23/06/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.