Le Sénégal accueillera en 2027 les Championnats du monde de para-athlétisme. L’annonce a été faite avec fierté par Cheikh Ndiaye, président du Comité national paralympique, lors de l’installation de nouvelles fédérations sportives. Un événement présenté comme « historique » et célébré comme une avancée majeure pour l’inclusion par le sport.
Mais derrière cet enthousiasme affiché se cache une réalité inquiétante : ce choix est plus politique que pragmatique. Et surtout, il révèle une fuite en avant du gouvernement sénégalais, prêt à s’engager dans une entreprise dont il ne maîtrise ni les enjeux ni les exigences.
Il faut rappeler qu’aucun pays africain n’a jamais organisé un événement de cette ampleur. Ce n’est pas anodin : les championnats du monde de para-athlétisme 2027 mobilisent des milliers d’athlètes, accompagnateurs, officiels et journalistes venus des quatre coins du monde. Ils requièrent une logistique millimétrée, des infrastructures accessibles et un dispositif de sécurité irréprochable. Peut-on sérieusement croire que le Sénégal, où les transports publics sont déjà un casse-tête quotidien pour les citoyens valides, saura garantir des conditions dignes et sûres pour des athlètes en situation de handicap ?
Le handisport sénégalais manque cruellement de moyens. Les athlètes paralympiques s’entraînent souvent dans des conditions indignes, sans équipements adaptés, sans encadrement suffisant, et dans l’indifférence quasi générale des autorités. Comment justifier alors une telle ambition à l’international, alors même que le pays n’est pas capable d’offrir à ses propres champions un minimum de dignité dans leur quotidien ? Avant de vouloir rayonner à l’international, le Sénégal devrait s’assurer que son système sportif local tienne debout.
Organiser un championnat mondial implique des investissements colossaux. Or, le Sénégal traverse une crise économique marquée par un taux de chômage élevé, une dette publique galopante et une inflation persistante. Investir des milliards de francs CFA dans un événement ponctuel, alors que les hôpitaux manquent de lits, les écoles tombent en ruine, et les universités sont en grève, est un choix irresponsable.
Comparons cette situation avec celle de l’Algérie, qui a récemment signé une convention pour organiser la 4e édition de la Foire commerciale intra-africaine (IATF) en septembre 2025. L’Algérie dispose de toutes les infrastructures et des moyens logistiques et organisationnels nécessaires pour abriter avec succès cet important événement économique continental. En revanche, le Sénégal, avec ses ressources limitées et son manque d’expérience, pourrait bien se retrouver submergé par les défis logistiques et organisationnels des Championnats du monde de para-athlétisme 2027
D’autres pays en développement, comme le Brésil ou l’Afrique du Sud, ont tenté ce genre de coup d’éclat sportif. Le résultat ? Des stades inutilisés, des dettes abyssales, et des populations déçues.
On ne construit pas une politique d’inclusion sur des effets d’annonce. La vraie inclusion, c’est l’accessibilité des bâtiments publics, la formation des encadrants, le soutien durable aux athlètes handicapés. Ce n’est pas un événement de quelques jours qui changera le sort du handisport sénégalais, encore moins celui des personnes handicapées au quotidien. Pire, cet événement risque de n’être qu’un vernis international sur une réalité nationale bien plus terne.
Nous appelons à une vigilance citoyenne. Ce n’est pas aux élites politiques de décider, dans l’euphorie, d’engagements aussi lourds sans consultation du peuple. Le Sénégal doit d’abord renforcer ses bases avant de prétendre à des sommets. Accueillir le monde, c’est bien. Mais être prêt à le faire avec dignité, sécurité et responsabilité, c’est mieux.
L’organisation des Championnats du monde de para-athlétisme 2027 est une décision précipitée et dangereuse. Loin d’être un symbole de progrès, elle risque de devenir un naufrage logistique et financier. Le Sénégal mérite mieux que des coups de communication mal préparés. La véritable inclusion commence par la vérité.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Malick Faty.
Mis en ligne : 28/06/2025
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