L’arrestation de Kocc Barma de son vrai nom El Hadji Babacar Dioum a fait grand bruit. Ce cybercriminel présumé, longtemps recherché pour chantage numérique et revenge porn, a été finalement arrêté à Dakar après des années de traque. L’affaire, relatée dans les colonnes de Libération, met en lumière une réalité inquiétante : celle d’un système organisé autour de l’humiliation numérique.
Mais au-delà du scandale, il faut oser poser une question dérangeante : comment en est-on arrivé là ? Peut-on encore parler uniquement de victimes lorsque certaines personnes se livrent volontairement, sans pudeur, à une exposition intime sur internet ?
Depuis 2018, la Division spéciale de cybersécurité (DSC) était sur les traces d’un homme qui a su instrumentaliser la peur et la honte à des fins personnelles. À travers de faux profils, des captures d’écran compromettantes et des menaces ciblées, Kocc Barma a manipulé, extorqué et détruit des vies. Son arrestation est saluée à juste titre comme un pas en avant dans la lutte contre la cybercriminalité. Mais cette victoire ne doit pas occulter une part de responsabilité trop souvent ignorée : celle des internautes eux-mêmes.
À l’ère du numérique, la frontière entre sphère privée et espace public s’est dangereusement estompée. Il est devenu banal de partager des photos suggestives, voire des vidéos intimes, sans réfléchir aux conséquences possibles. Lorsque ces contenus tombent entre de mauvaises mains, l’émotion prend le dessus. On crie au scandale, à la violation de l’intimité, au traumatisme… Et pourtant, la réalité est plus complexe.
Le « système Kocc Barma » n’aurait pas prospéré sans la légèreté avec laquelle certains se livrent sur internet. Envoyer une vidéo nue à un inconnu, se filmer dans des positions explicites, croire à des promesses d’anonymat sur les réseaux sociaux… Voilà le terreau fertile qui permet à ces prédateurs d’opérer.
D’abord, il est important de rappeler que la prudence numérique est une responsabilité individuelle. Personne n’est forcé de se filmer nu ou de partager ses images à caractère sexuel. Il faut sortir de cette victimisation permanente qui nie toute capacité de discernement aux individus.
Ensuite, accuser uniquement les cybercriminels sans interroger les comportements qui les alimentent revient à traiter les symptômes sans jamais s’attaquer aux causes. La banalisation de la nudité sur internet, la quête effrénée de validation sur les réseaux sociaux, et l’illusion d’impunité dans les échanges virtuels sont autant de facteurs qui nourrissent le phénomène.
Enfin, dans un pays comme le Sénégal, aux valeurs culturelles et sociales profondes, cette exposition volontaire à la nudité choque, mais surtout interroge : à quoi riment ces dérives ? Où sont passés la décence et le respect de soi ?
Dans d’autres pays comme le Japon ou les Émirats arabes unis, des campagnes nationales de sensibilisation ont été mises en place pour responsabiliser les utilisateurs sur les dangers de l’exposition numérique. En France, la justice considère que l’envoi volontaire de contenus intimes à un inconnu peut constituer une négligence contributive. Pourquoi le Sénégal ne s’en inspirerait-il pas ?
Oui, Kocc Barma doit rendre des comptes. Oui, le chantage numérique est un crime odieux. Mais il faut dire les choses avec clarté : on ne peut pas exposer son intimité sans discernement et se dire ensuite totalement innocent quand cela tourne mal. La vraie lutte contre le cybercrime commence par une révolution des comportements, un retour à la pudeur et une responsabilisation de chacun face aux pièges du web. La liberté d’expression ne doit pas devenir la liberté de s’autodétruire.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 23/07/2025
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