Être « cash » ne justifie pas tout : Les limites d’un discours politique sans filtre - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Politique | Par Eva | Publié le 25/07/2025 12:07:00

Être « cash » ne justifie pas tout : Les limites d’un discours politique sans filtre

Dans une déclaration reprise par Seneweb, l’architecte Pierre Goudiaby Atépa a exprimé son soutien au Premier ministre Ousmane Sonko, en affirmant que ce dernier est un « homme vrai, cash ». Une manière pour lui de minimiser les récentes tensions apparentes entre Sonko et le président Diomaye Faye. Si la franchise peut être perçue comme une qualité, il serait hasardeux de l’ériger en vertu absolue en politique.

Depuis son accession à la primature, Ousmane Sonko continue d’adopter un ton direct et tranché, qui a souvent divisé l’opinion publique. Sa dernière prise de parole, perçue comme une critique implicite de la présidence, a relancé les spéculations sur une possible mésentente au sommet de l’État. Dans ce contexte, les propos d’Atépa s’inscrivent dans une tentative de dédramatisation, mais en valorisant l’attitude « cash » du Premier ministre, il en minimise aussi les effets potentiellement néfastes.

Le terme « cash », dans le langage politique actuel, est souvent assimilé à une forme d’authenticité. Pourtant, dans un environnement aussi sensible que celui de la gouvernance nationale, cette « vérité brute » peut devenir une arme à double tranchant. Il ne s’agit plus simplement d’oser dire ce que l’on pense, mais de mesurer l’impact de chaque mot, chaque formule, sur l’équilibre des institutions, sur la cohésion sociale et sur l’image du pays.

Lorsqu’un haut responsable s’autorise des sorties abruptes, même sous couvert de sincérité, cela alimente les clivages. Le rôle d’un Premier ministre n’est pas de jeter de l’huile sur le feu, mais de rassembler, d’unir autour d’un cap clair.

Un discours politique sans filtre fragilise la crédibilité des institutions. Le Sénégal, qui se veut un exemple démocratique en Afrique, ne peut se permettre d’exposer au monde des querelles internes et des propos non maîtrisés.

L’insistance sur le caractère « vrai » d’un homme politique tend à individualiser l’action publique. Or, gouverner n’est pas une affaire d’humeurs ou de tempérament, mais d’équilibre, de concertation et de responsabilité.

Des études en sciences politiques montrent que les dirigeants populistes qui cultivent le parler vrai (Donald Trump, Jair Bolsonaro, etc.) génèrent souvent des polarisations extrêmes dans leur société. Cette stratégie peut certes galvaniser une base électorale, mais elle affaiblit la démocratie dans son ensemble en réduisant le débat à des affrontements de personnalités et non à des idées.

En France, le franc-parler d’un Jean-Luc Mélenchon a souvent été critiqué pour ses effets déstabilisants sur la gauche. Au Brésil, les déclarations de Bolsonaro ont provoqué des divisions profondes sur la gestion du Covid. Le Sénégal ne doit pas tomber dans le piège d’un leadership basé sur le choc des mots plutôt que la force des idées.

Dire les choses « cash » peut parfois apporter de la clarté, mais cela ne doit jamais être une excuse pour légitimer des prises de position potentiellement nuisibles à l’harmonie nationale. En politique, la vérité ne vaut que si elle est porteuse de solutions, et non de tensions. Le Sénégal mérite des leaders responsables, capables d’équilibrer sincérité et sagesse.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 25/07/2025

La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.


Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Copyright © 2023 www.notrecontinent.com

To Top