Le 24 juillet, le Premier ministre Ousmane Sonko a réceptionné à Dakar une série d’engins de déminage destinés à accélérer les opérations de dépollution en Casamance. Cet événement, marqué par la présence de hautes autorités sénégalaises et de l’ambassadeur du Japon, entre dans le cadre d’un financement japonais de 2 milliards de francs CFA. Si cette initiative peut sembler louable à première vue, nous défendons ici un point de vue critique : cette réponse technique, bien que nécessaire, est largement insuffisante et reste une solution de surface à un problème profondément enraciné.
Depuis plus de quarante ans, la région de la Casamance est marquée par une rébellion indépendantiste armée. Ce conflit a laissé derrière lui des milliers de morts, de déplacés et un territoire morcelé par les mines antipersonnel. Si l’acquisition de nouveaux équipements de déminage paraît être une avancée opérationnelle, elle ne change rien à la réalité : tant que les causes profondes du conflit ne sont pas sérieusement traitées, ces mines continueront de pousser comme des mauvaises herbes.
La réception de ces machines de dernière génération met en avant la technologie de pointe mobilisée pour le déminage. Pourtant, une donnée essentielle est omise : on ne soigne pas une plaie ouverte avec du maquillage. Les engins de déminage enlèveront les mines visibles d’aujourd’hui, mais que fait-on des mines de demain ? Sans stratégie claire de démilitarisation des groupes rebelles, sans programme de réintégration des anciens combattants et sans négociations politiques sérieuses, cette campagne de déminage en Casamance est condamnée à l’échec à moyen terme. Pire encore, elle pourrait créer un faux sentiment de sécurité dans des zones où les risques demeurent.
Certes, plus de deux millions de mètres carrés ont été déminés et 477 engins explosifs détruits. Mais ces chiffres, aussi impressionnants soient-ils, ne reflètent pas une victoire. Ils traduisent plutôt l’ampleur du désastre. D’autres pays confrontés à des situations similaires, comme l’Afghanistan ou la Colombie, ont compris que le déminage devait s’accompagner d’un processus global de paix, de dialogue inclusif et de développement économique ciblé. Ce n’est pas une technologie japonaise, aussi avancée soit-elle, qui pacifiera la Casamance.
Cette annonce gouvernementale semble aussi répondre à un besoin de communication politique, plutôt qu’à une véritable vision stratégique. Le gouvernement semble vouloir montrer qu’il « agit », sans pour autant s’attaquer aux causes structurelles du conflit : marginalisation régionale, sous-développement chronique, absence d’un dialogue politique sincère. Tant que ces facteurs ne seront pas au centre de la réponse de l’État, toute avancée technique restera éphémère.
Le déminage est certes indispensable pour sauver des vies à court terme, mais il ne saurait remplacer une politique de résolution du conflit. L’État du Sénégal doit aller au-delà des cérémonies protocolaires et des dons internationaux pour engager un processus politique courageux en Casamance. Tant que la racine du mal persiste, les engins de déminage ne seront que des pansements sur une blessure infectée.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 02/08/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.





