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L’interpellation de Ndèye Ndakata Dione par la police de Guédiawaye a été largement relayée par les médias. Cette étudiante de 28 ans est accusée d’avoir tenu des propos jugés offensants envers des figures religieuses sur les réseaux sociaux. Malgré ses excuses publiques, elle a été arrêtée sur plainte de disciples et héritiers de guides religieux. Ce fait divers relance un vieux débat : non, la prison ne peut pas être la réponse systématique à des propos, même inappropriés.
Le Sénégal est une République laïque, mais où la religion notamment les confréries musulmanes joue un rôle central dans l’espace public. Les guides religieux sont des figures hautement respectées, parfois plus influentes que les élus eux-mêmes. Toutefois, ce poids social ne doit pas être utilisé comme un levier de répression pour faire taire des voix dissidentes, maladroites ou simplement critiques.
Les propos de Ndèye Ndakata Dione sont peut-être critiquables, mais fallait-il vraiment déclencher une procédure judiciaire et une arrestation pour cela ? Elle s’était déjà excusée publiquement et avait reconnu la gravité de ses propos. Pourtant, l’appareil judiciaire s’est montré implacable. L’affaire révèle une fois de plus une tendance dangereuse : on criminalise des opinions, même maladroites, pendant que des voleurs de deniers publics, des auteurs de violences domestiques et des délinquants économiques continuent à vaquer librement à leurs occupations.
Combien de dossiers de corruption, de détournements ou d’agressions restent sans suite au Sénégal ? Pourtant, quand il s’agit d’une jeune femme sans pouvoir ni réseau, la justice va vite. Trop vite.
Si les propos de l’étudiante sont effectivement injurieux, ils relèvent de l’incivilité, pas du crime. À ce titre, la prison est une réponse excessive.
Derrière ces sorties virulentes, il y a souvent de la frustration, une colère née d’un sentiment d’injustice sociale. Plutôt que d’écouter, on sanctionne. Plutôt que d’éduquer, on emprisonne.
Prenons l’exemple de pays comme le Ghana ou l’Afrique du Sud, où les leaders religieux sont critiqués sans que cela entraîne une traque policière. Même en France, pays pourtant attaché à la liberté d’expression, des propos controversés n’aboutissent pas systématiquement à des peines de prison, surtout quand il y a des excuses publiques. Le Sénégal doit cesser d’agir comme si toute critique des figures religieuses était un crime de lèse-majesté.
Le cas de Ndèye Ndakata Dione n’est pas un incident isolé : il témoigne d’un malaise profond. Celui d’une société qui préfère bâillonner plutôt que de débattre. D’une justice qui frappe plus facilement les faibles que les puissants. D’un État qui, par souci de préserver des équilibres religieux, sacrifie les principes démocratiques. Le Sénégal doit dépasser cela. Ce n’est pas dans les prisons que se réglera le débat d’idées, ni dans la peur qu’on préservera la paix sociale.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mansour N. Faye.
Mis en ligne : 08/08/2025
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