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La récente visite du président Bassirou Diomaye Faye au Japon, dans le cadre de la TICAD 9, a été présentée comme un succès diplomatique majeur. Les médias officiels ont salué la signature de mémorandums, l’extension du Centre de formation professionnelle Sénégal-Japon à Diamniadio, et l’annonce d’un fonds d’investissement de 100 millions de dollars avec la Banque africaine de développement.
Pourtant, derrière ces annonces triomphales, se dessine une stratégie de communication habile, destinée à détourner l’attention des défis internes du Sénégal et à renforcer la légitimité d’un président récemment élu dans un contexte de défiance croissante envers les élites politiques.
Depuis son élection en 2024, Bassirou Diomaye Faye a hérité d’un pays confronté à une crise économique persistante, marquée par un chômage endémique, une inflation galopante et des services publics défaillants. Le Sénégal, sous pression du FMI et en pleine renégociation de ses contrats pétroliers et gaziers, a un besoin urgent de liquidités et d’investissements étrangers. Dans ce contexte, la TICAD 9 offrait une tribune idéale pour afficher une image de dynamisme et d’ouverture, tout en cherchant à attirer des capitaux japonais. Pourtant, les retombées concrètes de ces accords restent incertaines, et leur transparence, limitée.
Les accords signés avec le Japon s’inscrivent dans une logique de partenariat public-privé, où les entreprises nippones (Toyota, Kubota, NEC, etc.) sont mises en avant comme des acteurs clés de la modernisation du Sénégal. Cependant, l’histoire montre que de tels partenariats, bien que présentés comme gagnant-gagnant, profitent souvent davantage aux investisseurs étrangers qu’aux populations locales. Par exemple, les projets agricoles ou de formation professionnelle, bien que louables, peinent à créer des emplois durables ou à transférer des technologies de manière significative. De plus, les termes exacts des mémorandums et des fonds d’investissement ne sont pas toujours rendus publics, ce qui empêche un débat démocratique sur leur pertinence et leur impact réel.
Diomaye Faye, élu dans un contexte de crise politique et sociale, a besoin de succès diplomatiques pour asseoir son autorité. Les annonces spectaculaires (comme le fonds de 100 millions de dollars) servent à rassurer les partenaires internationaux et à mobiliser l’opinion publique, mais elles ne résolvent pas les problèmes structurels du pays.
Les détails des accords ne sont pas systématiquement communiqués, ce qui soulève des questions sur leur contenu réel et leurs contreparties. Cette opacité est d’autant plus problématique que le Sénégal a récemment adopté des lois pour renforcer la transparence et lutter contre la corruptionlanouvelle.
Alors que le pays fait face à des tensions politiques, des inondations récurrentes, et une crise de confiance envers les institutions, la multiplication des rencontres internationales permet de focaliser l’attention sur des promesses lointaines plutôt que sur les urgences locales.
Le Japon n’est pas le seul partenaire du Sénégal à promettre monts et merveilles. La Chine, l’Europe et les États-Unis ont également signé des accords ambitieux avec des pays africains, dont les retombées ont souvent été décevantes. Par exemple, les investissements chinois dans les infrastructures ou les énergies renouvelables ont parfois été critiqués pour leur manque de retombées locales ou leur impact environnemental. Le Japon, en se positionnant comme une alternative, reproduit un schéma similaire : des annonces médiatisées, mais des réalisations souvent lentes et peu transformatrices.
Si la stratégie de Diomaye Faye au Japon peut sembler payante à court terme, elle ne doit pas masquer l’urgence de réformes structurelles au Sénégal. Les partenariats internationaux, aussi prestigieux soient-ils, ne remplaceront pas une politique économique et sociale ambitieuse, transparente et centrée sur les besoins réels des Sénégalais. La vraie question n’est pas le nombre d’accords signés, mais leur capacité à améliorer concrètement le quotidien des citoyens. En l’absence de transparence et de suivi rigoureux, ces annonces risquent de rester des coquilles vides, au service d’une communication politique plutôt que d’un développement durable.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Aliou Sow.
Mis en ligne : 28/08/2025
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