« Dois-je trahir ma copine ? » : Pièges de l’amitié féminine - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Confidence | Par Eva | Publié le 11/09/2025 10:09:30

« Dois-je trahir ma copine ? » : Pièges de l’amitié féminine

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L’auteur raconte que sa meilleure amie est enceinte, mais pas de son futur mari. Pendant que celui-ci était en mission en Europe, elle a eu un contact avec son ex, qui est le père de l’enfant. Le futur mari est content et veut se marier rapidement pour que l’enfant naisse « dans le mariage ». L’auteur, lui, est en colère face à cette situation et pense à la tromper en retour. Il demande aux lecteurs ce qu’ils feraient à sa place. La narratrice, rongée par une colère qu’elle qualifie d’indignation morale, envisage de tout révéler, au risque de briser un couple et une amitié. Pourtant, derrière ce dilemme apparemment éthique se cache une vérité bien moins noble : et si cette envie de « trahir » n’était que le masque d’une jalousie dévorante ?

Dans un monde où les réseaux sociaux et les attentes sociales transforment les relations en compétitions, l’amitié elle-même n’échappe pas à la logique de la comparaison. La « besty » en question s’apprête à vivre ce que beaucoup considèrent comme un accomplissement un mariage avec un homme qui, selon les dires, la comble de bonheur. Pourtant, cette réussite apparente insupporte sa prétendue amie, au point qu’elle envisage de saboter son bonheur. Le prétexte ? Une grossesse cachée, fruit d’une infidélité. Mais le vrai mobile est ailleurs : l’incapacité à supporter que l’autre accède à un bonheur qu’elle-même n’a peut-être pas.

La grossesse, souvent perçue comme un moment de vulnérabilité, devient ici un levier de pouvoir. La narratrice ne s’indigne pas tant du mensonge que de la réussite sociale de son amie : un mariage précipité, une dot versée, une vie qui semble se construire sans elle. Dans une société où le mariage reste un symbole de validation, voir une proche y accéder peut réveiller des sentiments de frustration, surtout si l’on se sent exclue de ce bonheur.

Ce qui frappe dans ce récit, ce n’est pas tant la situation en elle-même les secrets et les mensonges existent dans tous les couples que la réaction de la narratrice. Son envie de « tout dire » ne relève pas d’un souci de transparence, mais d’un désir de contrôle. Elle se positionne en juge, en gardienne de la vérité, alors qu’elle n’est qu’une spectatrice aigrie. Son indignation sélective est révélatrice : elle ne s’offusque pas du sort du futur mari, mais du fait que son amie ose être heureuse sans elle.

La jalousie, surtout entre femmes, est souvent minimisée ou niée, alors qu’elle est l’un des moteurs les plus puissants des conflits relationnels. Des études en psychologie sociale montrent que les femmes ont tendance à rivaliser avec leurs amies proches, surtout lorsque celles-ci atteignent des étapes de vie perçues comme désirables (mariage, maternité, réussite professionnelle). Ici, la trahison envisagée n’est pas un acte de courage, mais une tentative désespérée de reprendre le dessus, de prouver qu’elle détient un pouvoir sur la vie de son amie.

La narratrice se drape dans la morale pour justifier son envie de nuire. Pourtant, si elle se souciait vraiment du futur mari, elle aurait agi dès qu’elle a su la vérité, et non au moment où le mariage se concrétise. Son silence prolongé prouve qu’elle attendait le moment où la révélation ferait le plus de dégâts.

En trahissant, elle ne cherche pas à « sauver » son amie, mais à la ramener à un niveau où elle peut à nouveau exercer une influence. La jalousie naît souvent de la peur de perdre sa place dans la vie de l’autre. En détruisant ce mariage, elle s’assure que son amie aura besoin d’elle – ne serait-ce que pour gérer les conséquences du scandale.

Dans de nombreuses cultures, les femmes sont encouragées à se soutenir, mais cette solidarité est souvent conditionnelle. Dès qu’une amie dépasse certaines limites (réussite, bonheur apparent), la bienveillance se transforme en ressentiment. Ce phénomène est bien documenté : une étude de l’Université du Michigan a révélé que les femmes expriment plus de jalousie envers leurs amies proches qu’envers des inconnues, surtout en matière de relations amoureuses.

La narratrice se présente comme une victime de la situation, alors qu’elle est l’instigatrice potentielle d’un drame. Elle utilise le prétexte de la « vérité » pour masquer son désir de vengeance. Pourtant, révéler ce secret ne libérera personne si ce n’est elle-même, qui se débarrassera du poids de son propre mensonge par procuration.

Cette dynamique n’est pas nouvelle. Dans la littérature, les exemples abondent : de Médée, qui détruit tout par jalousie, aux héroïnes de séries télévisées modernes qui sabotent les relations de leurs amies par peur de rester seules. Dans la vie réelle, les forums de conseils regorgent de récits similaires, où des « amies » justifient leur trahison par un prétendu souci de justice. Pourtant, ces actes laissent rarement des traces positives. Au contraire, ils révèlent une immaturité affective et une incapacité à gérer ses propres insatisfactions.

En Afrique de l’Ouest, où les mariages sont souvent des événements communautaires, la pression sociale peut exacerber ces tensions. Une femme qui se marie est célébrée, tandis que celles qui restent célibataires ou sans enfant peuvent se sentir mises à l’écart. Dans ce contexte, la jalousie devient un mécanisme de défense contre l’exclusion.

Trahir son amie ne rendra pas la narratrice plus heureuse. Au contraire, elle perdra à la fois une relation et sa propre intégrité. La jalousie, quand elle n’est pas reconnue et traitée, ronge de l’intérieur. Plutôt que de chercher à détruire le bonheur des autres, il serait plus sain de s’interroger : pourquoi ce bonheur me dérange-t-il autant ? Que dit-il de mes propres insatisfactions ?

La vraie amitié ne se mesure pas à sa capacité à contrôler la vie de l’autre, mais à accepter ses choix, même imparfaits. Si la narratrice était vraiment une amie, elle affronterait son amie en privé, sans chercher à humilier ou à punir. Mais visiblement, ce n’est pas l’amitié qui la guide seulement l’amertume.

En fin de compte, la question n’est pas « Devrais-je trahir ma copine ? », mais « Pourquoi son bonheur me fait-il si peur ? ». Tant que cette question restera sans réponse, aucune trahison ne comblera le vide qu’elle ressent. Et c’est bien là le plus triste dans cette histoire : la trahison ne changera rien à sa propre vie, si ce n’est qu’elle y ajoutera une tache indélébile.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 11/09/2025

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