Les opinions exprimées dans cet article sont celles d’un contributeur externe. NotreContinent.com est une plateforme qui encourage la libre expression, la diversité des opinions et les débats respectueux, conformément à notre charte éditoriale « Sur NotreContinent.com chacun est invité à publier ses idées »
La démission annoncée de François Bayrou, après son échec cuisant à obtenir la confiance de l’Assemblée nationale, n’est qu’un épisode de plus dans le feuilleton d’une Ve République en crise. Nommé en décembre 2023 pour incarner une voie centriste dans un Parlement fracturé, le Premier ministre sortant paie aujourd’hui les erreurs stratégiques d’Emmanuel Macron et l’incurie des partis politiques. Pourtant, son départ ne résoudra rien.
Il ne fera que révéler, une fois encore, l’impuissance d’un système où les calculs partisans priment sur l’intérêt général, où les technocrates se succèdent sans convaincre, et où les solutions de fond sont sans cesse reportées. Bayrou n’était pas le problème. Il en était le symptôme.
François Bayrou était condamné avant même d’entrer à Matignon. Dans un hémicycle aussi polarisé, un centriste modéré n’avait aucune chance de rassembler une majorité stable, surtout après la dissolution ratée de juin 2024. Emmanuel Macron le savait. En le nommant, il a préféré gagner du temps plutôt que d’affronter la réalité : la France est devenue ingouvernable sous son mandat. Cinq Premiers ministres en trois ans, un record sous la Ve République, ne sont pas le fruit du hasard. Ils témoignent d’un échec persistant à construire des alliances durables, à écouter les attentes des citoyens, et à assumer des choix clairs. Bayrou n’a été qu’un fusible de plus, sacrifié sur l’autel d’une stratégie politique à court terme.
Les noms évoqués pour lui succéder, Sébastien Lecornu, Catherine Vautrin, Éric Lombard, confirment cette logique de l’expédient. Aucun d’eux n’incarne un projet capable de transcender les clivages. Ce sont des technocrates ou des fidèles du système, pas des rassembleurs. Leur mission, si elle leur est confiée, sera la même : gérer l’urgence, éviter la censure, et survivre jusqu’à la prochaine crise. Le problème n’est pas personnel. Il est structurel. La Ve République, conçue pour la stabilité, se meurt sous les coups de l’obstruction partisane et de l’improvisation présidentielle.
Les partis politiques, loin de chercher des compromis, instrumentalisent la situation pour affaiblir Macron. Les socialistes, avec seulement 66 députés, revendiquent Matignon comme un dû, sans avoir les moyens de gouverner. Leur chef, Olivier Faure, promet des « majorités texte par texte », une méthode qui a déjà montré ses limites. À droite, Les Républicains refusent toute ouverture, campant sur des positions idéologiques rigides, tout en feignant de vouloir dialoguer. Leur chef, Bruno Retailleau, parle de « concessions », mais seulement sur des sujets qui arrangent son électorat. Quant aux écologistes et à la gauche radicale, ils brandissent la menace du 49.3 ou des mobilisations sociales pour faire plier le gouvernement, sans jamais proposer de véritable alternative.
Le Parlement, lui, est devenu une arène de veto. Les motions de censure et les recours au 49.3 ont remplacé le débat démocratique. Les lois se négocient dans l’urgence, sous la pression des rues ou des agences de notation, jamais dans la sérénité. Fitch pourrait dégrader la note de la France vendredi, et déjà, les partis se renvoient la responsabilité de cette éventualité. Personne n’assume. Tout le monde spécule.
Ce cynisme a un coût : la défiance des citoyens. Comment croire en une démocratie où les élus passent leur temps à se bloquer mutuellement, où les réformes sont sans cesse reportées, et où les dirigeants semblent plus préoccupés par leur survie politique que par l’avenir du pays ? La démission de Bayrou ne changera pas cette dynamique. Elle la confirmera.
La crise actuelle n’est pas seulement celle d’un gouvernement. C’est celle d’un système. La Ve République, autrefois synonyme de stabilité, est aujourd’hui paralysée par ses propres contradictions. Un président affaibli, un Parlement ingouvernable, des partis incapables de dépasser leurs divisions : voici le paysage politique français en 2025. Les comparaisons avec d’autres démocraties européennes sont accablantes. En Allemagne, malgré des coalitions parfois fragiles, les partis parviennent à gouverner. En Espagne, les accords entre sociaux-démocrates et indépendantistes catalans ont permis de dégager des majorités. En France, on préfère les postures aux compromis, les calculs aux projets.
Pire, cette paralysie se paie en termes concrets : services publics dégradés, transition écologique à la traîne, pouvoir d’achat en berne. Pendant que les élites politiques tergiversent, les Français subissent les conséquences de leur inaction. Les manifestations annoncées pour le 10 et le 18 septembre en sont le symbole. Elles ne naissent pas d’un hasard, mais d’un sentiment d’abandon. Les citoyens ont le sentiment que leurs représentants ne les écoutent plus, qu’ils ne font que gérer les crises sans jamais les résoudre.
La démission de François Bayrou doit servir de déclic. Continuer à nommer des Premiers ministres de transition, à négocier des accords de non-censure, à gouverner par décrets et 49.3, c’est se condamner à répéter les mêmes erreurs. Il faut oser une refonte en profondeur : une réforme des institutions pour rendre le Parlement plus représentatif et plus efficace, une clarification des responsabilités entre l’exécutif et le législatif, et surtout, un retour au débat d’idées plutôt qu’aux jeux de pouvoir.
Emmanuel Macron porte une lourde responsabilité dans cette situation. C’est lui qui a dissous l’Assemblée en 2024 sans vision claire. C’est lui qui a multiplié les expédients plutôt que de chercher des solutions durables. Mais les partis d’opposition ne sont pas en reste. Leur incapacité à proposer une alternative crédible aggrave la crise. Il faut cesser de sacrifier des boucs émissaires. Il est temps de reconstruire une démocratie où les compromis ne sont plus honnis, où les projets l’emportent sur les postures, et où les dirigeants assument enfin leurs responsabilités. Sinon, la France risque de s’enliser dans une instabilité permanente, au détriment de tous.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : François V.
Mis en ligne : 13/09/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.





