Trump transforme une tragédie en arme politique : Censure aux États-Unis - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - International | Par Eva | Publié le 22/09/2025 01:09:00

Trump transforme une tragédie en arme politique : Censure aux États-Unis

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Le 17 septembre 2025, la chaîne ABC a annoncé la suspension indéfinie de l’émission « Jimmy Kimmel Live! » suite à des propos controversés de l’animateur concernant l’assassinat de l’influenceur pro-Trump Charlie Kirk. Cette décision a été saluée par des figures politiques de droite, dont l’ex-président Donald Trump, mais elle a également suscité une vague d’indignation parmi les défenseurs de la liberté d’expression et de la presse.

L’assassinat de Charlie Kirk, figure montante du mouvement pro-Trump, a immédiatement été récupéré par la droite américaine. Le suspect, Tyler Robinson, issu d’un milieu républicain, a été présenté comme un « extrémiste de gauche » par les partisans de Donald Trump, malgré des éléments troublants : son éducation conservatrice, ses motivations personnelles, et l’absence de liens avérés avec des groupes organisés.

Pourtant, dès le lendemain du drame, Trump et ses alliés ont pointé du doigt « la gauche radicale », sans preuve, mais avec une certitude déconcertante. Jimmy Kimmel, en dénonçant cette récupération politique, a touché une corde sensible. Sa suspension par ABC, saluée par le président lui-même, n’est pas un hasard. Elle s’inscrit dans une logique bien rodée : utiliser les émotions suscitées par un crime pour justifier la répression des critiques.

Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a fait de la guerre aux médias une priorité. Restrictions d’accès, poursuites judiciaires abusives (comme les 15 milliards de dollars réclamés au New York Times), pressions sur les régulateurs, chaque outil est bon pour imposer un récit unique. Dans ce climat, l’humour et la satire deviennent des cibles privilégiées. Kimmel, comme avant lui Stephen Colbert, paie le prix de son refus de se soumettre.

La réaction à l’émission de Kimmel révèle une Amérique où les faits importent moins que l’appartenance politique. La droite, plutôt que de reconnaître la complexité du profil du tueur, a choisi de le caricaturer pour servir son narrative. Pire : elle a transformé une tragédie en prétexte pour exiger le silence. Brendan Carr, patron de la FCC, a ouvertement menacé les chaînes diffusant Kimmel, tandis que des groupes comme Nexstar ont cédé sans résistance. Le message est clair : ceux qui contestent la version officielle risquent des représailles.

Cette polarisation extrême n’est pas nouvelle, mais elle atteint aujourd’hui un niveau dangereux. Aux États-Unis, comme dans d’autres démocraties fragilisées, la tentation est forte de diaboliser l’adversaire plutôt que de débattre. Le résultat ? Un appauvrissement du discours public, où la nuance disparaît au profit des slogans et des anathèmes. Kimmel n’a pas été suspendu pour avoir manqué de respect à une victime, mais pour avoir osé remettre en question une narration politique. Pendant ce temps, les attaques de Trump contre la presse, traitements en « ennemis du peuple », poursuites intimidantes, restent impunies. Le double standard est flagrant : la liberté d’expression semble réservée à ceux qui soutiennent le pouvoir.

La banalisation de cette violence rhétorique est tout aussi préoccupante. En exploitant systématiquement les tragédies (comme l’assassinat de Kirk) pour discréditer l’opposition, la droite américaine normalise un climat où le désaccord devient une trahison. Or, l’histoire montre où mène cette logique : en Hongrie, en Turquie, ou en Russie, les régimes autoritaires ont toujours commencé par museler les humoristes et les journalistes avant de s’attaquer aux institutions.

Désigner Tyler Robinson comme « extrémiste de gauche » relève de la désinformation pure. Son parcours, ses motivations, tout contredit cette étiquette commode. Pourtant, cette version arrangée permet à Trump de justifier sa croisade contre les médias critiques. Kimmel, en soulignant cette manipulation, a commis l’erreur de déranger. Sa suspension n’est pas une coïncidence, mais une punition exemplaire.

Quand une chaîne comme ABC cède à la pression politique, elle envoie un signal désastreux : le pouvoir décide de ce qui peut être dit ou non. Les spectateurs de Kimmel, choqués par cette décision, ont raison de s’inquiéter. Comme l’a souligné un docker interviewé par l’AFP, « ce genre de chose arrive en Russie ou en Chine ». La comparaison n’est pas exagérée. Quand un régulateur comme la FCC menace de retirer des licences pour des raisons idéologiques, la frontière entre démocratie et autoritarisme s’amincit.

Trump peut insulter les journalistes, les menacer, et exiger des milliards en dommages et intérêts sans conséquence. Mais un humoriste qui critique cette dérive est immédiatement sanctionné. Où est la cohérence ? Où est la fameuse « liberté d’expression » brandie par la droite quand elle est dans l’opposition ? La réponse est simple : elle n’existe plus. Seuls les alliés du pouvoir en bénéficient.

La suspension de Kimmel s’ajoute à une longue liste : licenciement de Colbert, pressions sur les rédactions, auto-censure généralisée. Chaque recul des médias face à Trump affaiblit un peu plus les contre-pouvoirs. Demain, ce ne seront plus seulement les humoristes qui seront visés, mais tous ceux qui osent contester le récit dominant.

La suspension de Jimmy Kimmel n’est pas une affaire isolée. C’est un avertissement. Si nous laissons un président utiliser les tragédies pour imposer le silence, si nous acceptons que les régulateurs deviennent des censeurs, si nous tolérons que les médias renoncent à leur indépendance par peur des représailles, alors nous aurons perdu bien plus qu’une émission. Nous aurons perdu ce qui fait le cœur d’une démocratie : le droit de rire, de critiquer, et de dire non.

Les citoyens doivent exiger que les chaînes résistent aux pressions politiques. Les journalistes doivent continuer à enquêter, malgré les menaces. Et les humoristes, ces miroirs souvent dérangeants de nos sociétés, doivent pouvoir travailler sans crainte. Car une démocratie qui n’a plus le droit de se moquer de ses dirigeants n’est plus une démocratie, c’est un régime en sursis.

La question n’est pas de savoir si Kimmel a eu raison ou tort. Elle est de savoir si nous acceptons de vivre dans un pays où le pouvoir décide à notre place ce que nous avons le droit d’entendre.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : William S.
Mis en ligne : 22/09/2025

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