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Le ministre de l’Énergie, du Pétrole et des Mines, Birame Soulèye Diop, a récemment annoncé une « évolution qualitative » du secteur minier sénégalais, avec une hausse spectaculaire de 325 % de la production entre le premier trimestre 2024 et la même période en 2025. Cette performance, saluée comme une réussite économique, mérite pourtant d’être interrogée. Derrière les chiffres flatteurs se cachent une exploitation anarchique, des dégâts environnementaux irréversibles et une gouvernance défaillante. Si la croissance est bien réelle, ses bénéfices pour les communautés locales et l’environnement restent, eux, largement illusoires.
Le Sénégal, riche en ressources minières (or, phosphates, sables minéralisés), a vu son secteur minier devenir un pilier de son économie. Thiès, première région minière du pays, concentre une grande partie de cette activité, générant des revenus significatifs pour l’État. Pourtant, selon le dernier rapport de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), 94 % des dossiers miniers sont non conformes, 228 sites sont clandestins et 275 titres miniers sont inactifs. Malgré une amélioration du taux de conformité (passé de 6 % à 66 %), les irrégularités persistent, du non-respect des études d’impact environnemental à l’absence de plans de réhabilitation des zones exploitées.
La hausse de 325 % de la production minière est présentée comme un succès, mais à quel prix ? Les bénéfices économiques, bien que réels, profitent surtout à l’État et aux multinationales. Les communautés locales, elles, subissent les conséquences directes de cette exploitation : dégradation des sols, pollution, perte de moyens de subsistance. Plus de 60 % des personnes enquêtées estiment que l’exploitation minière a contribué à la dégradation de la qualité des sols, avec un coût économique estimé à 550 milliards de FCFA par an pour le pays. Les promesses d’acceptabilité sociale et de développement durable, brandies par le ministre, peinent à se concrétiser sur le terrain.
Les revenus miniers, en hausse, représentent 93 % des recettes du secteur extractif, mais leur impact sur le développement local reste marginal. Les infrastructures créées servent avant tout les besoins des entreprises, et les emplois générés sont souvent précaires et peu qualifiés.
Comment qualifier de « qualitative » une croissance qui s’appuie sur 94 % de dossiers non conformes et des centaines de sites clandestins ? La régularisation progressive des titres miniers ne suffit pas à masquer l’ampleur des dysfonctionnements.
L’exploitation minière entraîne des déversements de produits chimiques, la dégradation des sols et la modification des paysages, avec des conséquences graves sur les écosystèmes locaux. Les études d’impact environnemental, bien qu’obligatoires, sont souvent bafouées, et les plans de réhabilitation des sites miniers brillent par leur absence.
En République démocratique du Congo ou au Lualaba, l’exploitation minière a souvent profité aux investisseurs étrangers et à l’État, au détriment des populations locales et de l’environnement. Ces exemples montrent que sans cadre strict et transparent, l’extraction minière peut devenir une malédiction plutôt qu’un levier de développement.
La croissance minière sénégalaise est une réalité, mais son caractère « qualitatif » est loin d’être évident. Les bénéfices économiques, concentrés entre les mains de quelques-uns, ne compensent pas les coûts sociaux et environnementaux supportés par les communautés locales. Pour que cette richesse profite à tous, il est urgent de renforcer la transparence, de sanctionner les irrégularités et d’assurer une répartition équitable des retombées. Sans cela, l’exploitation minière restera une illusion de développement, au prix d’un héritage environnemental et social lourd à porter pour les générations futures.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Édouard Diouf.
Mis en ligne : 25/09/2025
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