Popularité sans projet : Les limites du leadership de Sonko - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Politique | Par Eva | Publié le 16/11/2025 12:11:00

Popularité sans projet : Les limites du leadership de Sonko

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Dans une publication faite avant le « Tera Meeting » du 8 novembre 2025, le journaliste Adama Gaye s’était dit « impressionné » par la ferveur persistante autour d’Ousmane Sonko, malgré les critiques et suspicions qui pesaient sur sa personne. « Malgré toutes les critiques sur sa personne, la ferveur que suscitait Ousmane Sonko était phénoménale. N’en connaissant pas la raison, je constatais. Yemenah ! (incroyable !) », avait-il écrit.

Aujourd’hui, après l’événement, il faut dresser un bilan : cette popularité reposait moins sur des réalisations concrètes que sur une stratégie délibérée d’instrumentalisation des frustrations sociales et judiciaires, au détriment d’un débat apaisé et d’un projet politique viable.

Ousmane Sonko s’était imposé comme une figure majeure de la scène politique sénégalaise en surfant sur les crises et les tensions. Son parcours était marqué par des promesses mirobolantes, des positions contradictoires, et une habileté à se présenter tantôt en victime, tantôt en sauveur. Pourtant, derrière le discours mobilisateur, les faits étaient têtus : les promesses non tenues s’accumulaient, et les solutions proposées peinaient à convaincre.

Sonko avait su transformer chaque crise en opportunité. Les affaires judiciaires qui l’avaient visé avaient été systématiquement présentées comme des complots, renforçant son image de martyr auprès de ses partisans. Pourtant, comme le soulignaient plusieurs observateurs, ces crises avaient souvent été exacerbées par ses propres prises de position radicales et ses appels à la mobilisation, plutôt que par une recherche de dialogue ou de solutions institutionnelles. Par exemple, ses déclarations sur la justice, qualifiées de « sorties musclées », avaient alimenté la polémique et polarisé le débat, sans apporter de réponse aux dysfonctionnements qu’il dénonçait.

Les promesses non tenues étaient légion : de l’abondance de poisson promise aux pêcheurs à la suppression de la caisse de résilience, en passant par l’abrogation de lois controversées, les engagements concrets s’étaient souvent heurtés à la réalité ou à l’inaction. Pire, certaines de ses propositions, comme son protectionnisme économique, avaient été jugées contradictoires et peu réalistes, risquant d’isoler le Sénégal sur la scène internationale.

Les médias et les réseaux sociaux avaient joué un rôle clé dans l’amplification de ce phénomène. Sonko avait su exploiter ces plateformes pour contourner les circuits traditionnels de l’information, créant un lien direct avec une jeunesse en quête de changement. Son million d’abonnés sur Facebook et ses audiences records en direct témoignaient de cette maîtrise des outils numériques, mais aussi d’une forme de populisme digital où l’émotion primait sur l’analyse. Pourtant, cette popularité virtuelle ne pouvait masquer l’absence de résultats tangibles. Les médias, souvent divisés entre fascination et rejet, avaient parfois contribué à normaliser un discours clivant, au détriment d’un débat public apaisé et constructif.

Cette stratégie n’était pas sans rappeler d’autres contextes, en Afrique ou ailleurs, où des leaders avaient su capitaliser sur les frustrations populaires pour asseoir leur pouvoir, sans toujours offrir de solutions durables. En Guinée, par exemple, la junte au pouvoir avait utilisé des méthodes similaires pour maintenir son emprise, au mépris des institutions et des promesses démocratiques. Comme en Guinée, l’instrumentalisation des crises et la polarisation du débat politique risquaient, à terme, d’affaiblir les fondements mêmes de la démocratie sénégalaise.

La ferveur autour d’Ousmane Sonko était indéniable, mais elle reposait sur des bases fragiles. Son talent pour mobiliser les foules et exploiter les crises ne devait pas faire oublier l’absence de projet politique cohérent et réalisable. Le « Tera Meeting » du 8 novembre avait bien été une démonstration de force, mais sans lendemains concrets. Il faut questionner non seulement la popularité de Sonko, mais aussi les risques d’un leadership fondé sur l’opportunisme plutôt que sur la responsabilité.

Dans un contexte où la défiance envers les institutions grandit, comment éviter que le populisme ne devienne la norme ? La réponse dépendra de la capacité des Sénégalais à exiger des comptes et des solutions, au-delà des discours.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Papis Badji.
Mis en ligne : 16/11/2025

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