L’attaque tragique survenue fin août à Barsalogho, dans le nord du Burkina Faso, met en lumière les défis persistants auxquels fait face la junte militaire dirigée par le président Ibrahim Traoré. Cette offensive, qui a causé la mort de centaines de civils, illustre l’incapacité croissante du régime à contenir la montée des violences jihadistes.
Lors de sa prise de pouvoir en septembre 2022, Ibrahim Traoré, un capitaine alors relativement inconnu, avait promis de restaurer la sécurité du pays en « six mois ». À l’époque, il s’était engagé à faire de la lutte contre le terrorisme sa priorité absolue, tandis que le Burkina Faso tournait le dos à la France pour se rapprocher de la Russie et de la Turquie. Cependant, deux ans plus tard, les résultats semblent décevants.
Depuis 2015, plus de 20 000 personnes ont été tuées par des jihadistes au Burkina Faso, dont près de 4 000 depuis le début de 2024, selon l’ONG Acled. L’attaque du 24 août à Barsalogho, qui a fait au moins 400 morts, est la plus meurtrière de l’histoire du pays. En dépit de ce bilan tragique, les autorités sont restées silencieuses, et aucune déclaration officielle n’a été faite. Seule une délégation ministérielle et militaire a été envoyée sur place.
Un expert en sécurité, sous couvert d’anonymat, critique la gestion de la situation par le gouvernement, notant que « casser le thermomètre ne fait pas baisser la fièvre ». Selon lui, le gouvernement préfère occulter les pertes pour promouvoir les succès militaires. Les citoyens, soumis à des taxes et impôts accrus pour financer l’effort de guerre, se retrouvent sans protection face à des attaques incessantes.
Fahiraman Rodrigue Koné, spécialiste du Sahel à l’Institut des études de sécurité (ISS), reconnait que, malgré une amélioration des capacités militaires, la menace jihadiste est enracinée dans des problèmes structurels comme les conflits fonciers. Une réponse militaire seule ne saurait résoudre ces complexités.
Les deux derniers coups d’État au Burkina Faso, en janvier et septembre 2022, avaient été précipités par des attaques jihadistes. L’attaque de Barsalogho, en particulier, a été un choc majeur en raison de son ampleur et de l’incapacité des forces de sécurité à réagir efficacement. Cette attaque s’est produite dans la région militaire la plus protégée du pays, ce qui a alimenté la spéculation selon laquelle le régime redoute de nouvelles attaques et pourrait chercher à réduire les voix dissidentes.
Le collectif « Justice pour Barsalogho », composé de ressortissants de la zone touchée, rappelle que le président Traoré avait personnellement demandé aux forces de sécurité de mobiliser les populations pour creuser des tranchées afin de protéger leurs villages. Cette opération a conduit à l’attaque meurtrière par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al-Qaïda.
« Quelle considération a-t-il pour ces centaines de personnes envoyées à l’abattoir ? » s’interroge un ressortissant de Barsalogho, soulignant que Traoré avait justifié son coup d’État par le manque de considération pour la valeur humaine des régimes précédents.
À l’approche du deuxième anniversaire de sa prise de pouvoir, le président Traoré semble, selon les observateurs, se dérober face à la réalité des défis auxquels il est confronté. Il est probable que des boucs émissaires seront désignés pour détourner l’attention de l’échec apparent du régime.
Article écrit par : Modou Fall
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.
