Ce n’est pas une surprise, mais un cauchemar qui revient à ciel ouvert. Depuis des semaines, les criquets pèlerins refont surface en Afrique du Nord, portés par les vents sahéliens et nourris par des conditions climatiques parfaitement prévisibles. Pourtant, encore une fois, les États du Maghreb semblent pris de court, en mode réaction plutôt que prévention.
La Libye, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc pulvérisent en urgence des pesticides à grande échelle, comme si cela pouvait compenser des mois de silence et de veille insuffisante.
À quoi bon disposer de bulletins d’alerte de la FAO si c’est pour attendre que les essaims soient déjà aux portes des cultures avant de s’agiter ? Les premiers signes étaient visibles dès décembre dans le Sahel, et la progression vers le nord était inévitable. Il fallait agir plus tôt, mieux coordonner les efforts régionaux, renforcer les capacités locales de détection, et surtout écouter les scientifiques au lieu de subir, saison après saison, le même fléau.
Ce drame écologique et agricole est d’autant plus révoltant qu’il met à mal des millions de personnes dans des zones déjà fragilisées par la sécheresse, les conflits et l’insécurité alimentaire. Un seul kilomètre carré d’essaim peut consommer la nourriture de 35 000 personnes en une journée. Alors combien de vies faudra-t-il sacrifier encore avant que nos gouvernements prennent au sérieux ce danger cyclique ? Le silence politique qui entoure cette menace est assourdissant.
Pire encore, la solution dominante l’usage massif de pesticides nous entraîne dans un autre cercle vicieux : pollution des sols, destruction de la biodiversité, exposition des populations aux produits toxiques. Aucune stratégie alternative sérieuse n’est mise sur la table. Où sont les investissements dans des méthodes durables de lutte biologique ? Où est la coopération transfrontalière systématique, au-delà des discours creux des sommets internationaux ?
Il est temps de cesser d’agir comme si les criquets pèlerins étaient une fatalité biblique. Ils sont le symptôme d’un système défaillant, d’une gouvernance climatique inadaptée, d’un mépris récurrent pour les populations rurales. Si nous n’apprenons pas à anticiper, nous continuerons de payer, non seulement avec des récoltes perdues, mais avec notre souveraineté alimentaire et la dignité de nos peuples. L’heure n’est plus à l’alerte, mais à la mobilisation.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Doudou Thiam.
Mis en ligne : 04/05/2025
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