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L’Unicef tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme : six millions d’enfants africains risquent d’être déscolarisés en 2026 en raison d’une baisse de 3,2 milliards de dollars de l’aide publique au développement, soit une chute de 24 % par rapport à 2023. Si cette annonce est préoccupante, elle révèle surtout une vérité gênante : la dépendance chronique des gouvernements africains à l’aide internationale pour financer leur système éducatif, au lieu de mobiliser leurs propres ressources.
Plutôt que de s’attaquer aux causes profondes fraude fiscale, flux financiers illicites, et manque de volonté politique, de nombreux États africains préfèrent compter sur la générosité étrangère, puis crier à l’injustice quand celle-ci se réduit. Une posture intenable, qui hypothèque l’avenir de millions d’enfants.
Chaque année, l’Afrique perd entre 85 et 88 milliards de dollars à cause des flux financiers illicites et de l’évasion fiscale, selon les rapports récents de l’Union africaine et de la CNUCED. Ces sommes, équivalentes à plusieurs fois l’aide internationale, pourraient financer des écoles, former des enseignants et offrir un avenir à des générations entières. Pourtant, la plupart des pays peinent à mettre en place des mécanismes efficaces pour lutter contre ces hémorragies, malgré les alertes répétées. Pire, certains réduisent délibérément leurs budgets éducationnels en anticipant les aides étrangères, créant ainsi une dépendance malsaine.
Les promesses solennelles, comme celles de Maputo en 2003 où les États africains s’étaient engagés à consacrer 20 % de leur budget national à l’éducation, restent largement lettres mortes. Seuls cinq pays ont atteint cet objectif, et la majorité des gouvernements dépensent bien moins que ce seuil, parfois moins de 10 %. Résultat : en Afrique subsaharienne, quatre enfants sur cinq ne savent ni lire ni comprendre un texte simple à 10 ans, et les taux de scolarisation stagnent ou régressent.
L’Unicef appelle à « préserver les financements alloués à l’éducation » et à flécher 50 % des aides vers les pays les moins avancés. Mais cette approche, aussi louable soit-elle, ne résout pas le problème de fond : l’absence de priorité réelle accordée à l’éducation par les gouvernements locaux. En Côte d’Ivoire et au Mali, par exemple, la déscolarisation pourrait toucher respectivement 340 000 et 180 000 enfants en 2026, non pas faute de moyens absolus, mais faute de volonté politique de réformer la fiscalité et de lutter contre la corruption.
Les coupes dans l’aide internationale ne sont qu’un révélateur. La France, l’Europe et les États-Unis réduisent leurs budgets de coopération, parfois de manière drastique, mais cette baisse ne saurait justifier l’inaction des États africains. Ceux-ci ont les moyens de financer leur éducation : il suffirait de récupérer une fraction des 88 milliards perdus chaque année, ou d’appliquer enfin les engagements pris il y a plus de vingt ans.
Avec 88 milliards de dollars siphonnés annuellement, l’Afrique pourrait doubler, voire tripler, ses budgets éducationnels sans dépendre de l’extérieur. La lutte contre les flux illicites et l’évasion fiscale est une question de volonté, pas de capacité.
En 2003, les dirigeants africains s’étaient engagés à allouer 20 % de leur budget à l’éducation. Aujourd’hui, seuls un tiers des pays atteignent ce seuil, et la plupart dépensent moins de 15 %. Où est passée la crédibilité de ces engagements ?
Les pays qui réduisent leurs efforts en anticipant les aides étrangères se retrouvent pieds et poings liés quand celles-ci baissent. Une stratégie perdante, qui expose les enfants aux aléas géopolitiques et économiques.
Malgré les discours, les budgets éducationnels sont souvent sacrifiés au profit d’autres dépenses, ou détournés par la corruption. L’UNICEF et Human Rights Watch le soulignent : sans financement national suffisant, les progrès restent illusoires.
En Asie ou en Amérique latine, des pays comme le Vietnam ou le Costa Rica ont réussi à universaliser l’accès à l’école en mobilisant leurs ressources internes et en luttant contre la fraude fiscale. Pourquoi l’Afrique, riche en potentiel humain et en ressources naturelles, ne parviendrait-elle pas à en faire autant ? La réponse tient moins à un manque de moyens qu’à un manque de gouvernance et de transparence.
La déscolarisation massive annoncée par l’Unicef n’est pas une fatalité, mais le résultat d’un choix : celui de privilégier la facilité de l’aide étrangère à l’effort de réforme intérieure. Les gouvernements africains doivent cesser de jouer les victimes et assumer leurs responsabilités. L’éducation est un droit, mais aussi un investissement. Plutôt que de tendre la main, il est temps de serrer les poings contre la corruption, les flux illicites, et l’inertie politique.
L’Afrique n’a pas besoin de plus d’aides ; elle a besoin de dirigeants qui osent enfin mettre l’éducation au cœur de leurs priorités, en finançant leurs écoles avec l’argent de leurs propres citoyens, et non avec celui des autres.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Alexandre.
Mis en ligne : 07/09/2025
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