Le dossier qui « hante » Macky Sall : L'affaire ArcelorMittal relancée - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Politique | Par Eva | Publié le 12/10/2025 03:10:30

Le dossier qui « hante » Macky Sall : L'affaire ArcelorMittal relancée

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Les déclarations récentes de Fadilou Keïta, directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et figure du parti Pastef, ont relancé le débat sur la responsabilité de l’ancien président Macky Sall. Selon lui, l’affaire ArcelorMittal et la « dette cachée » pourraient valoir à Macky Sall des poursuites pour haute trahison, avec une issue claire : « On le poursuivra pour haute trahison et on l’arrêtera ». Si ces propos peuvent sembler radicaux, ils soulèvent une question essentielle : et si, cette fois, la justice sénégalaise allait jusqu’au bout ?

Une condamnation de l’ancien chef de l’État aurait des répercussions politiques et symboliques majeures, bien au-delà des frontières du Sénégal. Analyse d’un dossier qui « traumatise » Macky Sall, parce qu’il sait ce qu’il risque.

L’affaire ArcelorMittal remonte à 2014, lorsque l’État sénégalais, sous la présidence de Macky Sall, a conclu un accord transactionnel avec le géant sidérurgique. Initialement, le Sénégal réclamait entre 1 600 et 3 300 milliards de francs CFA devant la Chambre de commerce internationale. Finalement, l’État a accepté un versement de seulement 150 millions de dollars (environ 90 milliards de francs CFA), dans des conditions aujourd’hui contestées.

Plusieurs proches de Macky Sall, dont d’anciens ministres, sont déjà convoqués par la justice, et l’enquête vise désormais des faits présumés d’association de malfaiteurs, corruption, blanchiment de capitaux et escroqueries. Parallèlement, les nouvelles autorités accusent l’ex-président d’avoir dissimulé une « dette cachée » de 7 milliards de dollars entre 2019 et 2024, un montant colossal qui a plongé le pays dans une crise économique sans précédent.

Fadilou Keïta, en tant que responsable de la CDC, institution clé dans la gestion des finances publiques, a un accès privilégié aux dossiers sensibles. Ses déclarations ne sont donc pas anodines : elles s’appuient sur des preuves tangibles, notamment la signature de Macky Sall sur l’accord de 2014. La justice sénégalaise, sous l’impulsion du président Bassirou Diomaye Faye, semble déterminée à faire la lumière sur ces affaires, marquant une rupture avec l’impunité souvent observée pour les anciens dirigeants africains. Un procès pour haute trahison contre Macky Sall enverrait un signal fort : au Sénégal, comme ailleurs en Afrique, aucun dirigeant n’est au-dessus des lois.

Les exemples récents ne manquent pas : aux Comores, l’ex-président Ahmed Abdallah Sambi a été condamné à la prison à vie pour haute trahison ; en Mauritanie, d’anciens ministres ont vu leur immunité levée pour malversations. Au Sénégal, la condamnation d’un ancien président serait une première, et pourrait inspirer d’autres pays à engager des poursuites contre leurs dirigeants corrompus.

Pour le pouvoir actuel, c’est aussi une question de légitimité. Le président Faye et son Premier ministre, Ousmane Sonko, ont bâti leur campagne sur la promesse de transparence et de lutte contre la corruption. Ne pas agir contre Macky Sall affaiblirait leur crédibilité et risquerait de décevoir une population lasse des abus de pouvoir. À l’inverse, un procès équitable renforcerait la confiance dans les institutions et marquerait un tournant dans l’histoire politique du pays.

Selon Fadilou Keïta, Macky Sall aurait confié à son entourage que l’affaire ArcelorMittal est le seul dossier capable de le faire condamner. Cette crainte s’explique par la gravité des faits : détourner des milliards de francs CFA, dissimuler une dette abyssale, et compromettre l’avenir économique du pays relèvent bien de la haute trahison, définie comme un « manquement grave à ses devoirs, incompatible avec l’exercice de sa haute fonction ». Macky Sall le sait : si la justice établit sa responsabilité, il risque non seulement l’emprisonnement, mais aussi la confiscation de ses biens et une exclusion définitive de la vie politique.

Son refus de revenir au Sénégal, malgré ses déclarations d’assumption, est révélateur. « S’il l’assume, il vient au Sénégal. Il a des biens ici, des amis, des parents, mais il n’ose pas venir », souligne Keïta. Cette fuite en avant discrédite ses tentatives de communication et renforce l’idée d’une culpabilité avérée.

Un procès exemplaire servirait d’avertissement à tous ceux qui seraient tentés d’utiliser le pouvoir pour s’enrichir ou favoriser des intérêts privés. En Afrique, où l’impunité des élites est souvent la norme, une condamnation montrerait que les temps changent. La frontière entre justice et vengeance politique est ténue, mais dans ce cas, les preuves et l’ampleur des préjudices subis par le Sénégal justifient pleinement une action judiciaire.

L’accord ArcelorMittal, la « dette cachée », et les auditions en cours fournissent une base solide pour des poursuites. Les 7 milliards de dollars de dette dissimulée ont aggravé la crise économique, avec un déficit budgétaire de 14 % et une dette publique à 119 % du PIB. Les Sénégalais paient aujourd’hui le prix de ces décisions. Macky Sall a signé les accords et supervisé la gestion opaque des finances publiques. Sa responsabilité pénale est engagée. Les condamnations récentes d’anciens dirigeants (Comores, Mauritanie, RDC) prouvent que la justice peut, et doit, s’appliquer aux plus hauts niveaux.

Le procès de Macky Sall ne serait pas une vengeance, mais un acte de justice nécessaire pour restaurer la confiance dans l’État de droit. Comme l’a rappelé Fadilou Keïta, « on l’arrêtera », une promesse qui résonne comme un engagement envers la transparence et la responsabilité. Pour le Sénégal, c’est l’occasion de tourner une page sombre et de montrer que personne n’est intouchable.

Si la justice va jusqu’au bout, ce sera une victoire pour la démocratie, un exemple pour le continent, et surtout, une leçon pour les dirigeants futurs : le pouvoir s’accompagne de devoirs, et la trahison a un prix. Le Sénégal a tout à gagner à écrire cette page d’histoire. La balle est désormais dans le camp des juges.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Salif M.
Mis en ligne : 12/10/2025

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