Israël en otage : Comment Benyamin Netanyahu a verrouillé le pouvoir - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - International | Par Eva | Publié le 26/10/2025 09:10:15

Israël en otage : Comment Benyamin Netanyahu a verrouillé le pouvoir

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Samedi 18 octobre 2025, Benyamin Netanyahu a confirmé ce que beaucoup craignaient : il briguera un nouveau mandat de Premier ministre, prolongeant ainsi un règne déjà record de plus de 18 ans à la tête d’Israël. Cette annonce, loin de surprendre, a relancé les débats sur l’état de la démocratie israélienne, la concentration du pouvoir entre les mains d’un seul homme, et les risques d’une dérive autoritaire. Alors que la rue israélienne se divise entre soutien inconditionnel et rejet viscéral, les témoignages recueillis dans les cafés de Jérusalem résument une réalité amère :

Pour une partie croissante de la population, Netanyahu incarne moins un dirigeant qu’un obstacle à l’avenir du pays. « C’est une tragédie israélo-israélienne, mais aussi internationale », confie Assaf, étudiant et réserviste, résumant le sentiment d’une jeunesse sacrifiée sur l’autel d’une ambition personnelle démesurée.

Benyamin Netanyahu détient le record absolu de longévité à la tête du gouvernement israélien, avec des mandats s’étalant de 1996 à aujourd’hui, ponctués de brèves périodes dans l’opposition. Son retour au pouvoir en 2022, à la tête de la coalition la plus à droite de l’histoire du pays, a marqué un tournant : une alliance avec l’extrême droite et les partis ultra-religieux, au prix d’une polarisation sans précédent de la société. Pourtant, ce « roi d’Israël », comme certains le surnomment, est aussi le premier Premier ministre en exercice à être inculpé pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires distinctes. Malgré ces poursuites, il a su manipuler les institutions, reporter ses procès, et instrumentaliser les crises sécuritaires pour se maintenir au pouvoir.

Son bilan est lourd : une guerre à Gaza qui a coûté la vie à plus de 68 000 personnes, un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, et une société israélienne fracturée comme jamais. Pourtant, Netanyahu reste convaincu de sa réélection, et les sondages lui donnent raison non par adhésion massive, mais par l’absence d’alternative crédible et un système politique qu’il a lui-même affaibli.

Netanyahu incarne une forme de « monarchisme » politique. Son refus de quitter le pouvoir, malgré les manifestations massives et les accusations de corruption, a normalisé l’idée qu’un dirigeant peut se placer au-dessus des lois. Les comparaisons avec d’autres dirigeants autoritaires – comme Viktor Orban en Hongrie ou Vladimir Poutine en Russie, tous deux visés par des mandats d’arrêt de la CPI – ne sont pas fortuites. Comme eux, Netanyahu a utilisé les crises (guerre, terrorisme, tensions internationales) pour justifier son maintien au pouvoir, tout en affaiblissant les contre-pouvoirs : réforme judiciaire controversée, limogeage de hauts responsables de la sécurité, surveillance des opposants.

Pour échapper à la justice, Netanyahu a noué des alliances avec des partis dont les valeurs sont aux antipodes des idéaux démocratiques israéliens. Son gouvernement actuel, le plus à droite de l’histoire du pays, compte des ministres condamnés ou inculpés, et a multiplié les attaques contre la Cour suprême, le procureur général, et même le Shin Bet, le service de sécurité intérieure. Ces manœuvres ont provoqué une vague de manifestations inédites : des centaines de milliers d’Israéliens descendent régulièrement dans la rue pour réclamer sa démission et la libération des otages encore détenus à Gaza, symbole d’un État qui a perdu le contrôle de son destin.

Le témoignage d’Assaf (« nous voulons vivre, pas être éternellement dans des situations extrêmes ») résonne comme un cri d’alarme. Les jeunes Israéliens, réservistes ou simples citoyens, paient le prix d’une politique de confrontation permanente, tandis que Netanyahu et ses alliés ultra-religieux bénéficient d’exemptions militaires et de privilèges. La colère est telle que des familles d’otages, autrefois symboles de l’unité nationale, boycottent désormais les cérémonies officielles et organisent leurs propres rassemblements.

À l’étranger, Netanyahu est de plus en plus isolé. La CPI a confirmé les mandats d’arrêt à son encontre, et même les États-Unis, alliés historiques d’Israël, expriment publiquement leurs réserves. Pourtant, il continue de jouer la carte de la fermeté, quitte à prolonger une guerre dont l’issue semble de plus en plus incertaine.

La situation israélienne rappelle celle d’autres démocraties où des dirigeants charismatiques ont progressivement vidé les institutions de leur substance : la Hongrie d’Orban, la Turquie d’Erdogan, ou encore les États-Unis de Trump. Dans chacun de ces cas, la concentration du pouvoir, la polarisation de la société et la remise en cause de l’État de droit ont conduit à une crise de légitimité durable. En Israël, le risque est d’autant plus grand que le conflit avec les Palestiniens et les tensions régionales offrent un terreau fertile aux dérives autoritaires.

Netanyahu n’est pas seulement un dirigeant controversé : il est devenu le symbole d’un Israël qui doute de son avenir. Son refus de quitter la scène politique, malgré les échecs sécuritaires, les scandales et la défiance d’une partie croissante de la population, pose une question fondamentale : jusqu’où une démocratie peut-elle tolérer qu’un seul homme incarne à la fois le problème et la solution ?

Les prochaines élections seront un test crucial. Mais au-delà du scrutin, c’est la capacité des Israéliens à restaurer l’équilibre des pouvoirs, à renforcer les institutions et à tourner la page d’une ère marquée par la division et l’impunité qui déterminera l’avenir du pays. Comme le résume un manifestant à Tel-Aviv : « Netanyahu n’est pas Israël. Israël est plus grand que Netanyahu. ».

La balle est désormais dans le camp des citoyens : sauront-ils faire entendre leur voix avant qu’il ne soit trop tard ?

Article opinion écrit par le créateur de contenu : John N.
Mis en ligne : 26/10/2025

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