Nous vivons dans une illusion confortable : celle que les antibiotiques peuvent tout soigner, qu’une simple prescription nous protège de la mort invisible.
Cette illusion est en train de s’effondrer. La résistance aux antibiotiques n’est plus une menace hypothétique : c’est une réalité. Et pourtant, nous continuons à l’ignorer comme si l’urgence ne nous concernait pas. C’est une erreur. C’est même une folie.
Aujourd’hui, la résistance aux antibiotiques tue déjà plus de 1,2 million de personnes par an dans le monde. C’est plus que le VIH ou la malaria. Et ce n’est qu’un début. Nous entrons dans une ère post-antibiotique, où une infection banale pourra redevenir mortelle. Où une simple opération chirurgicale comportera des risques inacceptables. Et tout cela, parce que nous avons épuisé une arme que nous avons trop longtemps utilisée sans discernement.
Qui est responsable ? Tout le monde. Les médecins qui cèdent à la pression des patients en prescrivant des antibiotiques pour un rhume. Les patients qui n’achèvent pas leur traitement. Les éleveurs industriels qui bourrent les animaux d’antibiotiques pour accélérer leur croissance. Les gouvernements qui n’imposent aucune régulation sérieuse. Et bien sûr, les laboratoires pharmaceutiques qui, par manque de rentabilité, ont déserté la recherche sur les nouveaux antibiotiques. Nous avons collectivement creusé la tombe de la médecine moderne.
Mais le plus scandaleux, c’est le silence. La résistance aux antibiotiques est une crise mondiale silencieuse. On en parle peu, car elle ne crée pas de panique immédiate, pas de scènes spectaculaires à la télévision. Pas d’hôpitaux débordés sous les projecteurs. Et pourtant, elle est là, tapie dans l’ombre, avançant chaque jour un peu plus, rendant nos traitements inefficaces, nos hôpitaux plus vulnérables, nos maladies plus longues et plus coûteuses.
Il faut que cela cesse. Il faut des mesures drastiques, dès maintenant. L’interdiction de l’usage vétérinaire abusif des antibiotiques. Une surveillance mondiale des prescriptions. Des campagnes d’information massives pour expliquer que non, un antibiotique ne soigne pas un virus. Et surtout : des investissements massifs dans la recherche pharmaceutique pour développer de nouveaux traitements. Sans cela, nous allons tout simplement reculer de cent ans en arrière dans notre capacité à soigner.
Cette guerre ne fait pas de bruit, mais elle tue. Et si nous continuons à l’ignorer, elle nous enterrera avec notre ignorance. La résistance aux antibiotiques n’est pas une crise à venir : c’est une crise en cours. Et notre inaction est déjà une complicité.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Yannick Gueye.
Mis en ligne : 03/06/2025
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