Le nouveau régime sénégalais à frappé un grand coup. En suspendant les demandes de baux et les chantiers en cours dans plusieurs zones jugées « sensibles », dont le littoral dakarois, Mbour, Thiès et Saint-Louis, le gouvernement prétend protéger l’environnement et réguler le foncier. Mais derrière ce geste, à première vue noble se cache une décision précipitée, à haut risque pour l’économie nationale. Cette suspension est une erreur stratégique, un coup porté à l’investissement, à l’emploi et à la dynamique de croissance du pays.
Oui, le foncier est un sujet explosif en Afrique, et le Sénégal n’y échappe pas. L’opacité des attributions, la spéculation, et la prédation de terres agricoles par de puissants groupes immobiliers ont alimenté une méfiance généralisée.
Mais fallait-il pour autant geler tout un secteur vital de l’économie, sans consultation des principaux acteurs ? Cette décision unilatérale risque de casser la machine économique à un moment où le pays cherche à créer des emplois pour sa jeunesse.
Ce gel concerne non seulement les zones les plus prisées du pays, corniche ouest, Mamelles, Pointe-Sarène, Diacksao Bambilor, mais aussi tous les projets en lien avec les pôles urbains, les morcellements, les actes de vente ou d’hypothèque. En d’autres termes : c’est tout un écosystème d’investissements immobiliers, de start-ups foncières, d’artisans du BTP et d’ingénieries locales qui est mis en pause.
Cette mesure conservatoire est censée précéder un inventaire des données foncières. Mais pourquoi ne pas mener cette opération de transparence sans freiner l’activité en cours ? Pourquoi opposer brutalité à régulation ?
Les investisseurs, nationaux comme étrangers, observent avec inquiétude cette décision. Ils voient dans cette suspension non pas un signal de bonne gouvernance, mais un message d’instabilité réglementaire. Qui prendra le risque d’injecter des milliards dans un pays où les règles changent du jour au lendemain ? L’image d’un Sénégal attractif et ouvert au business est mise à mal.
Les chantiers gelés signifient également des milliers d’emplois à l’arrêt dans le bâtiment, un secteur qui emploie une main-d’œuvre abondante, souvent peu qualifiée. Chaque jour d’inactivité se traduit par des revenus perdus, des PME fragilisées, et des familles en détresse. À long terme, ce coup d’arrêt compromet aussi l’accès au logement pour les classes moyennes et populaires, déjà confrontées à une inflation foncière galopante.
Dans d’autres pays africains, comme le Ghana ou le Maroc, des mécanismes plus intelligents ont été mis en place pour encadrer le foncier sans casser la dynamique économique. Des audits fonciers sont menés en parallèle des activités, avec des phases de régularisation sans blocage systémique. En choisissant l’arrêt brutal, le Sénégal s’isole et envoie un mauvais signal au marché.
La réforme foncière ne doit pas être un prétexte à l’immobilisme ni à la casse économique. Le gouvernement doit revenir à la raison, impliquer les professionnels du secteur, organiser des concertations locales, et surtout rouvrir les canaux de l’investissement sécurisé.
Si le pouvoir persiste dans cette voie, c’est tout un pan de notre avenir économique qui risque de s’effondrer sous prétexte de moralisation. Protéger nos terres, oui. Mais tuer l’espoir et l’investissement, non. Il faut lever cette suspension, et vite.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mahtar Ba.
Mis en ligne : 30/06/2025
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